
Le premier site de location de matériel, dédié au monde agricole, a été créé cet automne. L'occasion de moins investir ou de se faire un peu de trésorerie en louant des outils sous-utilisés.
VOUS CONNAISSEZ CERTAINEMENT AIRBNB, BLABLACAR, Drivy, quelques sites internet vedettes de ce qu'on appelle l'économie collaborative pour échanger voitures, appartements, déplacements, etc. Arrive aujourd'hui pour les agriculteurs WeFarmUp, un site de partage des matériels agricoles.
À l'origine, Laurent Bernede, agriculteur et concessionnaire dans le Lot-et-Garonne : « L'idée de ce site m'est venue quand j'ai dû renouveler mon tracteur de tête : un 200 ch comptant 13 000 heures. Vu le prix du neuf et pour une utilisation de quatre mois dans l'année, je me suis dit que ce n'était pas raisonnable. J'ai cherché à en louer un en passant plusieurs annonces. Personne ne s'est manifesté. Alors j'ai acheté un tracteur d'occasion et décidé d'investir pour créer cette plateforme de partage. »
COMMENT ÇA MARCHE ?
L'inscription sur le site internet est gratuite pour le loueur et le locataire. En quelques clics, le propriétaire met à disposition son matériel aux dates souhaitées et fixe son prix. Le locataire recherche le matériel dont il a besoin au moment où il le lui faut et contacte les loueurs présents sur le site. Cela crée, d'un côté, des revenus supplémentaires pour le loueur et, de l'autre, une disponibilité d'outils à un tarif avantageux, propre à éviter certains suréquipements, ou simplement pour pallier une panne imprévue. Ce serait donc le bonheur de la vie 2.0 que connaissent nombre d'internautes qui échangent ainsi biens et services.
« Le site WeFarmUP agit comme un tiers de confiance en cadrant le mieux possible la transaction, et en proposant plusieurs services et expertises : mise à disposition de modèles de contrat, conseils tarifaires, assurance du paiement par carte bleue, hotline d'accompagnement, etc. », vante le créateur du site. Cerise sur le gâteau : les locations sont assurées par Groupama qui a noué un partenariat avec WeFarmUp.
LA PUISSANCE DU WEB
La mutualisation, l'entraide entre voisins existent depuis des siècles dans le monde agricole. Il y a soixante-dix ans, les Cuma ont permis d'encadrer et de structurer cette économie de partage. En 2015, la puissance d'internet et les outils numériques ouvriraient donc de nouveaux horizons. « L'entraide traditionnelle suppose une proximité et souvent une véritable réciprocité entre les agriculteurs. Jusqu'à maintenant, un agriculteur n'a aucune information des besoins et des disponibilités de son collègue situé à trois collines de chez lui. Internet va aussi changer les comportements. Car il peut y avoir une barrière psychologique à emprunter un outil à son voisin. De quoi lui serai-je redevable ? Que se passera-t-il en cas de pépins ? Sur le site, tout est cadré. L'outil est disponible et la transaction parfaitement claire et sécurisée », insiste Laurent Bernede.
CRÉER UNE COMMUNAUTÉ
WeFarmUp insiste aussi sur la notion de communauté ainsi formée. En premier lieu, c'est un site réservé aux professionnels du monde agricole avec, comme sésame, le numéro de Siret de l'entreprise, qui est enregistré et contrôlé à chaque inscription. Cette communauté a aussi ses règles. La première, pour le locataire, est de respecter le matériel loué comme si c'était le sien. Et pour le loueur, de mettre à disposition un matériel conforme à la réglementation, et livré avec tous les documents et équipements nécessaires, dans un état satisfaisant. Ces règles auront leurs contrôles. Ce sera le rôle d'une modération que les auteurs du site promettent stricte pour éliminer les indélicats. C'est aussi la communauté des internautes qui s'évaluera elle-même en temps réel, grâce à des notes et des commentaires. Comme cela peut se faire sur d'autres sites de partage. À la différence que là, on est entre « pro » et dans un petit périmètre géographique. Les dérives seraient donc moins à craindre. Le système devrait ainsi éviter rapidement d'héberger des brise-fer ou des irresponsables, ce sera la clé de voûte de sa survie. « Ce qui n'est pas toujours facile à faire dans une Cuma », remarque Laurent Bernede.
UN SERVICE CLÉS EN MAIN
La plateforme WeFarmUp prend en charge la transaction financière. Le locataire paie dès la réservation mais ne sera prélevé qu'après l'acceptation du propriétaire. Le loueur est crédité à la fin de la durée de location. WeFarmUp se rémunère en prélevant environ 15 % du montant versé. Il ne sera donc plus question d'argent entre le loueur et le locataire, lors de leurs échanges. Le prix est fixé par le loueur et affiché sur le site. Le site peut apporter des conseils pour la tarification et proposera bientôt un calculateur pour donner une fourchette de tarifs journaliers. Un contrat pré-rempli est proposé avec un état des lieux contradictoire. Comme dans toute location, un chèque de caution est demandé au locataire. Pour encore plus de garanties, Groupama a développé un produit d'assurance spécifique qui intègre la responsabilité civile, les dommages à des tiers et le bris de machine. « Bien sûr, il sera vérifié que la responsabilité de l'utilisateur et du propriétaire n'est pas engagée. Le but n'est pas de louer une épave pour la remettre à neuf avec l'assurance. » Cette assurance est incluse dans le prix affiché au locataire. Cette prise en charge des formalités administratives et la sécurité du paiement devraient séduire d'autres professionnels de l'agriculture tels que les entrepreneurs de travaux agricoles ou les concessionnaires.
TESTER UN OUTIL AVANT ACHAT
Ces derniers disposent souvent d'un parc important de matériels d'occasion disponibles pour la location, mais sans média spécifique pour se faire connaître et trouver une clientèle. WeFarmUp leur propose un service clés en main. S'ils adhèrent, ils participeront grandement à développer l'offre aux agriculteurs.
Outre la compression des charges de mécanisation et la possibilité de remplacer rapidement une machine en panne, ce site de partage peut répondre à d'autres attentes, comme résoudre un besoin ponctuel d'une machine spécifique ou plus performante, mais aussi tester des outils que l'on envisage par la suite d'acheter.
« L'avantage est double : vous avez l'outil près de chez vous, disponible le nombre de jours que vous souhaitez avec, en plus, le conseil d'un utilisateur expérimenté qui n'est pas un vendeur et pourra vous donner un avis neutre et pertinent sur l'efficacité et les limites de la machine », insiste Laurent Bernede.
Du côté du dépositaire de matériel, le premier bénéfice est bien sûr de générer un revenu complémentaire et de mieux amortir du matériel sous-utilisé et, pourquoi pas, de promouvoir une activité de location. « L'intérêt est avant tout la grande flexibilité et la réactivité du système : louer et payer l'outil uniquement le nombre de jours dont on en a besoin, sans s'endetter, sans parts sociales à verser, sans délai d'attente. Un exploitant est en train de semer, la terre va bien, mais il n'a pas de rouleaux. Il peut l'avoir dès le lendemain chez quelqu'un à quelques kilomètres de chez lui. C'est cela que nous voulons proposer. »
DOMINIQUE GRÉMY
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