AGIR SUR LA VOLATILITÉ EN FIXANT LE PRIX DES ALIMENTS

©  CLAUDIUS THIRIET
© CLAUDIUS THIRIET (©)

L'approvisionnement en aliments sur le marché des matières premières est un outil d'optimisation du coût alimentaire. Cela requiert de l'anticipation et un suivi des tendances du marché.

IL EXISTE DES MARGES DE MANOEUVRE EN ÉLEVAGE ruminant pour optimiser le prix d'achat des aliments. Un enjeu d'autant plus indispensable dans ce contexte de baisse de prix du lait, assure Sébastien Poncelet, consultant chez Agritel, cabinet conseil présent à travers toute l'Europe et en Chine, spécialisé dans l'analyse des marchés des matières premières agricoles. Il ne s'agit pas de passer une demi-journée au téléphone avec les différents fournisseurs pour acheter au prix le plus bas à un instant T, mais bien de décider en amont quand acheter, en fonction des tendances du marché. »

Cette stratégie d'approvisionnement consiste à suivre l'évolution des cours des matières premières et à être en capacité d'acheter mais aussi de réceptionner la marchandise quand le prix d'achat correspond à ses objectifs. « De cette manière, au lieu de subir le marché, j'agis sur la volatilité en fixant le prix d'achat sur une période de six à dix-huit mois. »

COMMENT S'APPROVISIONNER SUR LE MARCHÉ À TERME ?

Le marché à terme en tant que tel est un marché financier dédié aux cours des matières premières. « Il offre l'opportunité d'acheter à tout moment, même lorsque cela n'est pas possible sur le marché physique ou si j'ai encore des stocks disponibles. De cette manière, si le prix est alléchant, je peux réaliser un achat sur papier. La marchandise physique sera réceptionnée et payée à livraison, rappelle Sébastien Poncelet. Suivre l'évolution de la conjoncture sur ce marché vise donc à mieux gérer la volatilité des prix, dans une logique de couverture anticipée de mes besoins. » Pour se tenir informé, Agritel propose notamment une lettre de conjoncture hebdomadaire (Milkhebdo), accompagnée d'un conseil d'expert. De multiples sources d'information sont disponibles par ailleurs (négociants, presse, chambres d'agriculture...). Mais il n'est pas toujours nécessaire de s'abriter directement sur ces marchés financiers : « Pour cela, il faudrait au préalable ouvrir un compte-titre d'instruments financiers auprès d'une banque, avec dépôt de garantie et appels de marges. Une démarche qui n'est pas nécessaire si mon fournisseur me propose un système clés en main de contrat à prix fixe. » Ce mode d'approvisionnement, exclusivement par camion complet de 29 tonnes, concerne les matières premières simples : céréales, tourteaux, déshydratés ou coproduits. Il s'adresse à tout éleveur capable de stocker 30 tonnes de marchandise ou à tout groupe d'éleveurs qui se sera entendu pour réceptionner la marchandise en un lieu unique. « Les céréaliers utilisent beaucoup les marchés à terme pour sécuriser la vente de leurs récoltes, observe le consultant. Mais les éleveurs laitiers l'utilisent encore peu pour leurs achats, car ils consomment beaucoup d'aliments composés. Certains fabricants innovent néanmoins et proposent les mêmes contrats pour ce type d'aliment. »

COMMENT GÉRER MON TAUX DE COUVERTURE ?

La première étape de cette stratégie consiste avant tout à définir ce qu'est un bon prix. « Un bon prix, c'est celui qui me permet de gagner ma vie ! Il est illusoire et risqué d'attendre le prix le plus bas pour acheter, car les cours peuvent augmenter brutalement et sans raison apparente (embargo, crise sanitaire...). Pour l'éleveur, cela consiste à émettre des hypothèses de prix de vente (du lait ou de la viande) pour savoir quel prix d'aliment lui permet d'obtenir une marge suffisante. » C'est ce que Sébastien Poncelet appelle le prix d'intérêt ou prix objectif. « Avoir un repère-objectif vise à se prémunir des incertitudes du marché. Dès lors, si mon fournisseur me fait une proposition d'achat inférieure ou égale à ce prix d'intérêt, je dois être capable de fixer mes achats. Mais je ne suis pas obligé de me couvrir à 100 % si le prix objectif est atteint. Le pilotage de mon taux de couverture dépend aussi de l'analyse des tendances du marché, poursuit-il. Pour simplifier, lorsque la conjoncture est porteuse, je me couvre à long terme. Dans le cas contraire, je vis au jour le jour. »

QUATRE CAS DE FIGURE

1)Prix objectif atteint et conjoncture baissière

Par mesure de bonne gestion, on couvre en partie ses approvisionnements à long terme (30 à 50 %), car une hausse brutale et inattendue n'est jamais exclue. Parallèlement, on complétera ses achats en accompagnant la conjoncture baissière.

2)Prix objectif atteint et conjoncture haussière

Dans cette situation, on couvre ses besoins à hauteur de 80 à 100 %, en fixant le prix avec son fournisseur. Si, par exemple, les cours sont en dessous de son prix d'intérêt et qu'un risque climatique se profile, on se couvre à 100 %.

3) Prix objectif non atteint, en conjoncture baissière

L'anticipation doit permettre d'attendre que les prix baissent avant de mettre en place une couverture sur le long terme.

4) Prix objectif non atteint, en conjoncture haussière

On travaille à contre marge. Donc, il n'est pas question de fixer le prix à terme. C'est une situation de crise qui condamne à vivre au jour le jour. L'enjeu consiste à anticiper ses besoins d'au moins six mois pour réaliser des gains réguliers en conjoncture favorable, qui permettront de passer plus facilement les situations de crise. Car s'il y a des cours hauts, il y en a aussi des bas, et c'est là qu'il faut agir. « Nous considérons que c'est un métier à part entière. C'est pourquoi Agritel propose des formations de deux jours aux agriculteurs sur le thème de la gestion des risques et des stratégies de couverture. »

JÉRÔME PEZON

SÉBASTIEN PONCELET, CONSULTANT POUR LA SOCIÉTÉ AGRITEL, spécialisée dans l'analyse des marchés internationaux des matières premières agricoles : « Attendre pour acheter au plus bas n'est pas possible, car le prix le plus bas, on ne le connaît que quand les cours remontent. »

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
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Maladies
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Herbe

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