Quand les chercheurs découvrent ce que les éleveurs savent depuis vingt ans.
Dans l’excellentissime revue que tu tiens entre tes mains , le numéro de février traitait d’une étude de la coopérative Évolution sur la comparaison entre le croisement deux voies et la race pure. Si ça ne te dit rien, retrouve l’exemplaire car c’est quand même dommage de claquer « 100 boules » pour un abonnement. Depuis que l’homme est descendu du singe qui, lui-même, descendait du baobab, on parle d’évolution comme de l’ensemble des changements des règnes animal et végétal ayant eu pour résultat l’apparition de formes nouvelles considérées comme un progrès. Le concept a été poussé à l’extrême avec la holstein qui est devenue très productive, mais très « fragile », dans les années 2000. En race pure, les quatre classes de taureaux préconisés par la coopérative en fonction des orientations que l’on veut donner à son troupeau sont plutôt pertinentes. Depuis peu, on parle de croisement trois voies rotatif comme d’un outil pour améliorer la rentabilité d’un troupeau. L’appellation Procross est une marque commerciale qui est au croisement trois voies ce que Frigidaire est au réfrigérateur.
Étant moi-même un pionnier du croisement, que j’ai commencé en 2003 alors qu’Évolution venait de naître, j’aimerais apporter ma petite pierre à l’édifice. Le postulat d’Évolution est de simuler par informatique les performances d’un troupeau pur holstein à 8 500 kg et le même croisé avec de la normande ou de la jersiaise, puis d’en tirer des conclusions sur vingt ans. Les Américains ne disent pas que des conneries. Ils en font aussi. Ils ont prouvé que le croisement normand répond assez mal en système intensif, par rapport à la montbéliarde et à la rouge scandinave. Le croisement jersiais se conçoit sur des systèmes à forte valorisation de la composition du lait. Bref, Évolution n’a pas pris les bonnes races dans ce schéma précis. Sans doute parce qu’il n’a pas seul la main sur le programme de sélection montbéliard ou ne marge pas quand il vend du rouge suédois.
Étayer des conclusions sur une étude à partir d’un modèle informatique inventé par Oniris (l’école vétérinaire de Nantes) et affirmer qu’au bout de vingt ans, il y a une différence de marge brute de moins de 300 € en faveur de la race pure (soit moins de 10 %) me semble hasardeux. Comment comptabiliser tous les avantages induits par le croisement comme la facilité de vêlage, la vigueur des veaux, la capacité de ces vaches à faire l’accordéon, l’amélioration de 8 % de l’efficacité alimentaire (confirmée par Less Hansen, grand spécialiste américain), la sérénité qu’apportent ces vaches « faciles à vivre » ?
Comme souvent en France, les chercheurs cherchent pendant que les éleveurs expérimentent sur le terrain, mais on n’en tient pas compte. Les Américains, encore eux, sont beaucoup plus pragmatiques. Ils comparent dans un même troupeau les pures et les croisées, et en déduisent depuis longtemps que les croisées sont plus rentables en dollars par jour de vie.
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