LE MARCHÉ À TERME PROTÉGERAIT LES ÉLEVEURS DE LA VOLATILITÉ

Renaud de Kerpoisson, exploitant agricole dans le Cher, il est le PDG du groupe ODA (Offre et demande agricole) qu'il a fondé en 1997. Cette entreprise forme et accompagne les agriculteurs européens aux techniques des marchés des matières premières agricoles et à l'utilisation des outils de gestion de risque de prix. « ODA se veut la référence en matière de collecte d'informations et d'analyse de marché, proche de la réalité et rapidement exploitable. »
Renaud de Kerpoisson, exploitant agricole dans le Cher, il est le PDG du groupe ODA (Offre et demande agricole) qu'il a fondé en 1997. Cette entreprise forme et accompagne les agriculteurs européens aux techniques des marchés des matières premières agricoles et à l'utilisation des outils de gestion de risque de prix. « ODA se veut la référence en matière de collecte d'informations et d'analyse de marché, proche de la réalité et rapidement exploitable. » (©)

Dans une économie instable, le marché à terme est un outil d'information et de protection du risque prix. Il ne fonctionne pas sur le lait, en grande partie par la volonté des transformateurs.

Les produits laitiers industriels sont aujourd'hui bien orientés, mais quelle visibilité avons-nous sur ces marchés ?

Renaud de Kerpoisson : Elle est assez faible. Nous avons vu en ce début d'année qu'une sécheresse en Nouvelle-Zélande, couplée à une demande internationale toujours dynamique, a créé une forte tension sur le marché du beurre et des poudres. Il faut s'attendre à de nouvelles hausses des cours, car ni les USA qui ont décapitalisé sur le cheptel ni l'Europe ne semblent en capacité de répondre aux besoins des acheteurs. Il n'y aura pas de détente avant le retour de la Nouvelle-Zélande sur le marché en octobre. Autre facteur, les protéines végétales, notamment le soja, resteront à des prix élevés jusqu'au milieu de l'automne. Difficile dans ces conditions d'augmenter la production de lait.

Quels éléments amènent le plus de volatilité sur ces marchés ?

R. K. : Dans un marché libéralisé, c'est la partie échangée de la marchandise qui influence le plus son prix. Or, l'Océanie qui ne produit que 26 Mt de lait (quand l'UE en produit 149 Mt) en exporte 21,5 Mt. On comprend le rôle important joué par le niveau de production de la Nouvelle-Zélande sur le prix mondial. Du côté de la demande, la progression d'une classe moyenne en Asie, notamment en Chine, sera le moteur d'une consommation accrue de protéines animales dans les prochaines années. Plus largement, la reprise économique qui se dessine aux USA devrait apprécier le dollar vis-à-vis de l'euro, un élément favorable aux exportations européennes. Mais après 2015, l'ambition affichée du nord de l'Europe à produire plus de lait pourrait amener à une nouvelle déstabilisation des marchés. Face à cette volatilité, la filière et surtout les éleveurs ont un besoin impératif d'outils pour s'informer et se protéger. Cela passe par l'existence d'un marché à terme sur les produits dérivés : le beurre et la poudre. Les céréaliers disposent depuis plusieurs années de cet outil qui leur donne une visibilité sur plusieurs mois et leur permet de garantir leurs marges : par exemple, aujourd'hui, le prix des contrats à terme sur du blé pour décembre est à 196 €/t. Connaissant mes charges et la marge de mon organisme stockeur (OS), si ce prix me convient, je décide de vendre sur le marché à terme. Ce n'est pas une vente physique mais un contrat. En décembre, au moment de la livraison à mon OS, que le prix du blé soit à 140 ou 240 €/t, j'ai la garantie du prix attendu six mois plus tôt en levant ma couverture sur le contrat à terme. Ce n'est en aucun cas de la spéculation mais un moyen de se couvrir.

Existe-t-il un marché à terme sur le lait et comment y accéder ?

R. K. : En octobre 2010, Euronext a mis en place des contrats à terme sur la poudre de lait. Ils n'ont jamais fonctionné car la filière laitière ne s'est jamais approprié ce marché, par volonté ou par ignorance. En théorie, les éleveurs pourraient vendre sur le marché à terme afin de se couvrir plusieurs mois à l'avance sur le prix du beurre et de la poudre, qui valorise les laits d'excédents et le quota B. Car, rappelons-le, ce ne sont pas des ventes physiques. Mais aujourd'hui, il y a trop peu d'acheteurs pour que ce marché fonctionne. Il faudrait pour cela que les transformateurs l'utilisent aussi. Ils n'en voient pas l'intérêt car le marché à terme apporte une transparence sur les prix que beaucoup redoutent. En effet, cette transparence profiterait aux éleveurs et aux acheteurs de l'agroalimentaire. Les transformateurs changeront-ils d'avis devant les risques accrus du marché, pour fixer leur marge ? Quoi qu'il en soit, les producteurs de lait, aujourd'hui regroupés en OP, devraient se former à suivre ces marchés à terme et à les utiliser. C'est un formidable outil d'information pour décider de produire davantage ou pas, et pour peser dans le rapport de force avec les collecteurs.

PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE GRÉMY

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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