
Au Gaec Losser, en Alsace, l’utilisation de mélange de coproduits régionaux ensilés répond aux objectifs d’un haut niveau de production laitière à un coût maîtrisé en filière non OGM.
Les organisations de conseil en élevage du Grand Est, dans le cadre du projet Coprame, ont créé cet automne un rallye portes ouvertes en élevages dans toute la région, sur le thème des coproduits. À travers des retours d’expérience et échanges en bout de silo, il s’agissait notamment de capitaliser sur le savoir-faire d’éleveurs utilisateurs.
Fin octobre, le rallye a fait halte au Gaec Losser, à Mussig, en Alsace. Sur une surface fourragère limitée, les associés distribuent depuis une dizaine d’années un mélange de coproduits régionaux. « À partir de 2014, nous avons choisi de miser sur les mélanges de matières premières, face à la hausse du prix du correcteur azoté dans un système maïs/soja, indique Alexis Losser, l'un des gérants. Cette option est donc d’abord une question de coût qui a permis de réduire le poste de charge des concentrés par deux, mais elle a aussi contribué à améliorer la productivité du troupeau. »
Plus de 18 000 litres de lait/ha de SFP
À l’issue de la campagne 2023, le troupeau de 170 holsteins conduites en zéro pâturage affiche une production moyenne de 13 254 litres de lait/vache, soit 2 005 000 litres de lait livrés en filière non OGM, avec une SFP de 110 ha. Outre le confort d’une stabulation à logettes équipée de ventilateurs, avec brumisation et douches à vaches, la qualité de la préparation au vêlage assurant un IVV de 385 jours, cette performance laitière s’appuie sur un haut niveau de densité énergétique et protéique d’une ration semi-complète intégrant une large palette de coproduits.
Dans le détail, la ration de base comprend 10 kg MS de maïs ensilage et 5 kg de pulpe de betterave surpressée stockés dans un même silo sandwich. Sous climat continental soumis à des épisodes de canicules estivales très marquées, l’irrigation du maïs est ici devenue indispensable. Elle stabilise à la fois la qualité du fourrage et assure des rendements de 22 à 25 t de MS/ha. Le maïs est complété par 1 kg de foin et 7 kg de MS de mélange Pollen. Il s’agit d’un mélange de coproduits réalisé deux fois par an dans un silo de 500 m², soit un volume total de 900 t brut. « La première fois cela représente une avance de trésorerie importante. Mais avec le temps cet achat est intégré dans un cycle de fonctionnement »,précise Alexis Losser.
La société Pollen est à la fois fournisseur des matières premières et prestataire de chantier : les ingrédients sont livrés par camion sur une plateforme bétonnée propre pendant deux ou trois jours. Le prestataire vient ensuite avec une mélangeuse, tandis qu’à l’aide du télescopique les éleveurs confectionnent le silo tassé uniquement au godet. Le chantier représente 6 heures de travail à deux, couverture comprise (bâche fine + bâche noire).
Un aliment complet à 31 % de MAT et 0,99 UFL
L’association de coproduits secs et humides dans un même silo permet de stocker un aliment complet entre 42 et 45 % de MS avec des pertes quasi nulles, grâce à un silo dont les dimensions permettent de respecter un avancement du tas de 30 cm en été : 6 m de large, 40 m de long et 2 m de haut maximum, pour éviter l’éboulement du front d’attaque.

La composition du mélange est variable selon le prix d’intérêt des différentes matières premières. Cette année, par exemple, le tourteau de soja jugé trop cher est remplacé par du colza et du colza tanné. Le tarif rendu ferme s’élève à 163 €/ tonne de produit brut (prestation comprise) pour un mélange dosant 31 % de MAT, 0,99 UFL/kg de MS et 144 g de PDI (BalproRu 98) avec 6 ingrédients au total : 34,5 % de corn feed humide ; 34,5 % de drêche de brasserie ; 7,8 % d’okara ; 6,4 % de crack de soja ; 8,7 % de colza et 8,1 de colza tanné. « Depuis 3-4 ans, nous faisons l’impasse sur les analyses, car nous avons constaté que les valeurs alimentaires du mélange sont très proches des valeurs théoriques. » Seul le taux de MS peut varier de 45 % à moins de 40 %, « dans l’idéal, cela justifierait une analyse juste sur cet aspect », conseille Christophe Bertrand, de la Chambre d’agriculture.
Seulement 1 kg de correcteur azoté distribué au DAC
Sur cette base, avec un complément de 2 kg de maïs grain et sans tourteau à l’auge, la ration semi-complète hivernale dose 0,96 UFL et 95 g PDI/kg MS pour une production permise de 35 kg de lait. Au Dac, les vaches reçoivent en moyenne de 2,9 kg de VL 2,5 + 1 kg de correcteur azoté protégé pour une production permise de 43 kg de lait.
De fin mai à mi-octobre, la ration intègre 4 kg MS d’ensilage d’herbe en remplacement du foin et d’une part équivalente du mélange Pollen et de maïs/pulpe. Les éleveurs misent à la fois sur la prairie naturelle et sur quelques ha de seigle fourrager implanté en dérobée. Si les rendements des premières coupes précoces n’excèdent pas 2,5 t MS/ha, la qualité est au rendez-vous : les dernières analyses affichent des valeurs de 0,94 UFL pour les ensilages de prairies et de 1.0202 UFL pour le seigle, avec une moyenne de 16,8 % de MAT. Ainsi, le coût alimentaire 2022 s’élève à 134 €/1 000 litres, pour une marge brute de l’atelier lait de 266 € et un coût de production de 345 €. « Le mélange de coproduits à la ferme a de nombreux atouts, estime Alexis. Il permet de mieux maîtriser le coût alimentaire avec des ressources locales qui amènent à la fois de la MAT et des UF, de garantir une bonne conservation des aliments achetés, d’assurer stabilité de la ration et la régularité des performances. De plus, le principe de regrouper tous les aliments dans un même silo simplifie au quotidien la préparation de la ration. Nos pistes de progrès portent désormais sur l’amélioration des taux par l’incorporation d’acides aminés et de matière grasse fractionnée. »
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