« Des acides aminés pour monter en lait et en taux »

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Sur la base d’une ration non OGM riche en matières grasses, les premiers résultats d’un apport complémentaire de méthionine protégée dans la ration révèlent une amélioration rapide du TP et du lait, mais aussi du TB.

Les deux frères associés du Gaec Mavi sont collectés par leur coopérative (Laitnaa) en filière non OGM Bleu-Blanc-Cœur. Le cahier des charges implique un accès au pâturage de 120 jour/an sur 10 ares/vache minimum, mais aussi une alimentation du troupeau enrichie en oméga 3, via la distribution d’un aliment certifié, formulé à base de graines de lin extrudées. De la teneur en oméga 3 du lait livré dépend le montant du bonus perçu sur le prix du lait compris entre 15 et 30 €/1000 litres.

Dans le cadre de l’installation d’Antoine avec son frère Vincent en 2019, le projet est de doubler la capacité de la stabulation pour livrer à terme 1,5 Ml. Mais sans attendre la fin des travaux, les deux jeunes éleveurs ont anticipé l’agrandissement du troupeau par renouvellement interne, sans hésiter à surcharger les installations jusqu’à atteindre, à la fin de l’été, un effectif de 87 laitières pour seulement 56 logettes.

L’accès permanent à 8 ha d’herbe divisés en trois parcelles, conduites en pâturage libre, permet néanmoins d’atténuer l’inconfort du troupeau. Leur objectif : « Traire le maximum de lait pour diluer le montant des investissements, souligne Antoine Ledouble. Notre approche consiste d’abord à densifier la valeur énergétique de la ration de base. Dès que l’on s’approche de 40 kg de lait par vache, l’énergie devient le premier facteur limitant de la ration, avec un seuil à respecter de 25 % d’amidon. »

« Renforcer l’efficacité d’une ration riche en matières grasses »

La ration semi-complète est distribuée une fois par jour et le concentré de production « à la casserole », pour une performance de 10 382 kg de lait à 5,4 mois moyens de lactation. Pour renforcer la densité énergétique et la digestibilité de la ration de base à partir des aliments produits sur la ferme, les éleveurs ont substitué une part importante de maïs grain humide au maïs ensilage. Ils misent par ailleurs sur la disponibilité en coproduits régionaux : de la pulpe de betterave surpressée, pour apporter de l’énergie sous forme de cellulose digestible, mais aussi un mélange de coproduits semi-humide ensilé à la ferme dosant pas moins de 1,15 UFL et 28 % de MAT/kg de MS.

L’objectif est de caler à l’auge une ration équilibrée à 32-33 kg de lait (infographie ci-contre), complétée par un concentré de production équivalent à un VL 2,5 litres : il s’agit d’un mélange fermier qui intègre 38 % de pulpe sèche, 37 % de colza, 7 % de son, 9 % d’orge et 9 % du noyau oméga 3 de Valorex. « Jusqu’à 70 jours de lactation, les vaches en reçoivent jusqu’à 4 kg, pour laisser à chacune une chance d’exprimer tout son potentiel. Ensuite, le rythme de distribution est de 1 kg de concentré de production, tous les 2,5 kg de lait au-dessus de 35 kg/vache. Au quotidien, les compteurs à lait permettent d’être très réactifs pour ajuster les quantités. » Le noyau oméga 3 intègre également la ration de base à hauteur de 900 g à 1 kg. Cet apport de matière grasse insaturée contribue également à renforcer la densité énergétique de la ration (16,5 % de matière grasse et 1,35 UFL). Économiquement, il se justifie par le bonus Bleu-Blanc-Cœur sur le prix du lait. Cet apport doit être bien maîtrisé, car un excès de matières grasses (supérieur à 6 % MSI) peut être un frein à la digestion de la ration, potentiellement pénalisant pour le TB. Ici, la ration dose 5 % de matières grasses, presque le maximum recommandé.

Cette année, depuis le 8 septembre, les éleveurs ont décidé d’intégrer un apport complémentaire de 7,5 grammes de méthionine (12 g de Smartamine) : « L’objectif est de monter en lait et en taux. Cet apport d’acides aminés vise à renforcer l’efficacité d’une alimentation riche en acides gras insaturés, dans un contexte où le potentiel du troupeau est freiné par l’ambiance d’une stabulation surchargée. »

De plus, compte tenu du manque de disponibilité en soja non OGM, la complémentation à base de tourteau de colza peut s’avérer limitante en PDIA lorsque l’on recherche des performances supérieures à 10 000 kg de lait.

Toute chose n’étant pas égale par ailleurs, comparé à la campagne précédente, la production progresse de 0,5 à 1 litre par VL et par jour, de 0,75 point de TP et, plus surprenant, de 2,24 points de TB, soit une moyenne de 31,5 litres/VL/jour, à 39,26 de TB et 33,6 de TP.

« Ce que l’on voit en tant qu’éleveur, ce sont les résultats de productions. Mais c’est parce que le foie fonctionne mieux que le lait et les taux progressent. Mais il est encore trop tôt pour évoquer un impact positif sur les performances de reproduction. »

« Un préalable : couvrir les besoins énergétiques »

« La clé de la réussite repose sur un préalable : la couverture des besoins énergétiques, rappelle Reynald Baes, responsable technique Adisseo (voir ci-dessus). C’est ce qui explique les échecs associés à la complémentation avec de la Smartamine. » Pour autant, Antoine Ledouble poursuit la réflexion autour de matières premières locales, sources de protéines non dégradables, plus riches en méthionine (gluten d’amidonnerie, drèche de brasserie…) ou en lysine (soja non OGM…).

« Faire des analyses et un bilan de la ration pour coller au plus près des besoins est à la base d’une alimentation de précision. » Dans l’attente, la mise en service de l’extension de la stabulation doit permettre une meilleure expression du potentiel du troupeau. D’ici un an, les éleveurs projettent l’installation de deux robots de traite « pour se libérer de l’astreinte de la traite, mais aussi pour aller plus loin dans une alimentation de précision ».

Jérôme Pezon

© j.pezon - Stabulation. L’extension est prévue pour doubler la surface sur la largeur, soit 6 rangées de logettes (120 places) sur caillebotis, avec un objectif de 1,5 million de litres produits. j.pezon

© j.pezon - qMéthionine protégée. Pour ne pas casser leur protection, les acides aminés sont incorporés dans la mélangeuse après la fibre, en même temps que les concentrés. Suivent les ensilages, les coproduits, le maïs épi et la pulpe.j.pezon

Plus de précision pour doper la ration
Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,46 €/kg net =
Vaches, charolaises, R= France 7,23 €/kg net =
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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