« JE FAIS DES GALETTES DE BOUSES POUR CALER LES RATIONS »

REPORTAGE PHOTOS : © J.-M. VOCORET
REPORTAGE PHOTOS : © J.-M. VOCORET (©)

Pour apprécier la quantité de fibres courtes, signe d'une bonne efficacité du rumen, Bruno Giboudeau a trouvé une solution empirique : compacter les résidus d'un tamisage de bouses.

VÉTÉRINAIRE PRATICIEN DANS LE MASSIF DU JURA, Bruno Giboudeau est de ceux qui, il y a quinze ans, ont contribué à remettre l'oeil des éleveurs au coeur des réglages alimentaires. Il en a tiré un livre au titre évocateur : Les vaches nous parlent d'alimentation. Mais aussi une méthode, Obsalim, déclinée sous forme d'un jeu de 63 cartes, très pratique en élevage. Son principe : faire le lien entre dérèglement alimentaire (excès ou déficit d'énergie fermentescible ou globale, d'azote soluble ou global, de fibres fermentescibles ou de structure) ou stabilité ruminale et sa traduction sur la vache. Cela via les signes observés sur les poils, la peau, les yeux, le nez, les pieds, l'ingestion, la rumination, l'état général, les urines... et, bien sûr, les bouses. C'est sur ces dernières qu'il apporte aujourd'hui un plus.

BESOIN D'ALLER AU-DELÀ DE L'ASPECT

« Une bouse souple, à peine ferme, sans élasticité (avec le puits du laitier) signe un faible résidu d'éléments visqueux ou fibreux et une ration bien digérée. A contrario, une bouse molle qui reste collante et élastique (sans le puits du laitier) marque la présence de résidus non assimilés, et donc d'une ration mal digérée. Mais on ne sait pas les quantifier. C'est le même problème quand on s'intéresse à la présence de fibres courtes de 3 à 5 mm récupérées après, par exemple, l'utilisation d'un tamis chinois. Il y en a toujours, mais combien pour juger si la digestion a été complète. Je butais sur la même question pour interpréter la présence de grains. Si on en trouve avec peu de fibres courtes, c'est que ces grains sont bien digérés. Mais s'il y en a beaucoup, c'est signe qu'ils ne le sont pas. Encore faut-il pouvoir quantifier ce "beaucoup" pour en être sûr », illustre Bruno Giboudeau.

Pour passer de cette appréciation qualitative de la présence de fibres, via un lavage de bouses dans un tamis, à une évaluation plus quantitative des résidus fibreux, le vétérinaire a cogité pendant trois ans. Dans un premier temps, il pense à mesurer la densité. La présence de bulles (signe d'amidon toujours en fermentation) ou de beaucoup de fibres doit permettre à une poignée de bouses prélevées dans un gant plastique fermé, de flotter ou non dans un seau d'eau. La théorie se révèle exacte, mais la technique, est très délicate pour mesurer un seuil. Sans parler du délai de prélèvement après que la vache a bousé, celui-ci jouant sur la quantité d'amidon toujours en fermentation. Sans parler non plus de l'air qu'il faut aspirer avant de nouer le gant... Abandonnée la densité.

L'OUTIL IDÉAL : UN PRESSE-PURÉE AVEC UN FOND AMOVIBLE

La solution viendra de l'idée « toute simple » de compacter ces résidus en partant d'un volume de référence, idéal pour voir des évolutions dans le temps et apprécier le recalage d'une ration. Encore fallait-il trouver l'outil de compactage des résidus, fibres ou grains isolés après tamisage à l'eau. Ce sera un presse-purée à levier... avec un fond amovible pour pouvoir récupérer la galette de bouses (voir page précédente). Facile ensuite de mesurer son épaisseur avec une pige en son centre ou en la cassant en deux. Reste à faire cette mesure avant et quelques jours après un recalage de la ration, pour savoir si l'option retenue était la bonne ou doit encore être ajustée, selon que la galette a « maigri » ou non.

Bruno Giboudeau est le premier à reconnaître les limites de précision des mesures de cette méthode, qu'il qualifie de semi-quantitative. « Les chiffres obtenus n'ont pas de valeur absolue. L'important est qu'ils puissent servir de comparaisons. » Mais aussi empirique soit-elle, cette méthode offre un réel bénéfice par rapport à un simple tamisage de bouses.

MÉLANGER CINQ À DIX BOUSES OU PLUS, SELON LES SITUATIONS

Elle est aussi très pédagogique pour illustrer de visu à un éleveur ce qu'il peut gagner en améliorant l'efficacité alimentaire de sa ration. Il suffit de comparer les galettes avant et après calage. Elles se conservent aisément. Le diamètre (8 cm) et la hauteur (8 cm) du presse-purée ont leur importance. Ils déterminent le volume de référence pour se situer par rapport aux seuils établis à la suite de moult mesures en élevage. « Fort de mes observations, je considère ce seuil pour une vache au pâturage, au foin ou à l'ensilage maïs respectivement à 1 cm, 2 cm et 2,5 cm. En deçà, il est difficile de faire beaucoup mieux. Au-delà, il y a du lait permis par la ration à récupérer facilement », déclare Bruno Giboudeau.

Concernant l'échantillonnage de ces bouses, Bruno Giboudeau procède ainsi : l'idéal est de mélanger des bouses de consistance identique.

« Si tel est le cas, cinq bouses pour un troupeau de 80 vaches suffisent. Si ce sont des bouses de consistance variable, il convient d'en mélanger plus de dix », explique-t-il.

JEAN-MICHEL VOCORET

COMMENT PROCÉDER EN SIX ÉTAPES

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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