« FINI LE TOURTEAU AVEC L'HERBE DÉSHYDRATÉE ! »

Nicolas Marguet et 120 éleveurs du Haut-Doubs et du Jura (70 km autour de Pontarlier) sont actionnaires de l'usine Désia 25 qui assure la déshydratation de leur récolte.© C.R.
Nicolas Marguet et 120 éleveurs du Haut-Doubs et du Jura (70 km autour de Pontarlier) sont actionnaires de l'usine Désia 25 qui assure la déshydratation de leur récolte.© C.R. (©)

Nicolas Marguet, en AOP comté, complémente en azote depuis 2013 sa ration foin-regain avec des granulés produits avec son herbe par Désia 25.

DDANS SON SYSTÈME TOUT HERBE ET FOIN-REGAIN DE L'AOP COMTÉ, NICOLAS MARGUET cherchait depuis longtemps à gagner en autonomie alimentaire. Il s'est d'autant plus décidé à suivre cette voie qu'à la retraite de son père, une fois passé en individuel, il a pendant un temps davantage complémenté le troupeau, sans résultat de production probant. « C'était il y a cinq ans, j'avais atteint 1,4 tonne de concentrés par vache et par an (1), mais ça répondait peu, la production moyenne étant montée à 7 000 kg/VL », précise l'éleveur. Au même moment prend forme, dans le Doubs et le Jura, un projet d'unité de déshydratation d'herbe, porté par des éleveurs en AOP comté.

Leur objectif premier : récolter une herbe très précoce, riche en protéines, pour en faire des granulés à même de remplacer une partie des concentrés achetés, qui doivent être sans OGM, comme le réclame le cahier des charges du comté.

Selon son optique d'autonomie, Nicolas Marguet s'engage donc, parmi 120 agriculteurs, comme associé dans Désia 25, la SAS (lire encadré) qui déshydrate, depuis 2013, l'herbe récoltée sur ces exploitations, dans un rayon de quelque 70 km autour de Pontarlier.« Le minimum d'engagement par adhérent est de 5 ha, explique Nicolas Marguet. Je suis limité en fourrage et j'assure mes volumes de foin pour l'hiver sur la première coupe. J'ai donc engagé 5 ha en 2013 et 2014 que j'ai fait récolter en deuxième et troisième coupes, puis 8 ha en 2015 fauchés en trois fois : 4 ha début juillet, 2 ha de temporaires fin août, puis encore 2 ha de temporaires début octobre. »

Les chantiers se déroulent de la façon suivante : « Désia 25 missionne une entreprise pour la fauche, je préfane, deux machines de Désia 25 ensilent, puis l'herbe part à l'usine en camions. La semaine suivante, je récupère, en vrac ou en big-bag, les granulés issus de mon herbe. C'est important, car lesvaleurs varientselon les types de prairies, les conduites... Et je tiens à récupérer mon herbe car je n'y mets aucun engrais minéral ! » Et de constater que les granulés issus des fauches de temporaires à l'automne 2015 s'avèrent plus riches en UFL (0,9 UFL/kg de MS) que ceux des fauches d'été en 2014 et 2015 (0,84 puis 0,83 UFL/kg de MS).

« J'AI 8 À 9 TONNES DE GRANULÉS PAR AN »

Les teneurs en matière azotée oscillent entre 16 (en 2014) et 18,45 % de MS (temporaire fauchée fin août en 2015). Des tendances confirmées par les analyses effectuées par Désia 25 sur les granulés produits lors des quatre périodes de coupe (voir tableau). Pour concilier quantité et qualité, Nicolas Marguet fait récolter « 40 jours après la fauche, au stade où [il] ferai[t] [ses] regains, et lorsque l'herbe fait environ 20 cm. Avec les surfaces engagées ces trois années, [il] dispose de 8 ou 9 tonnes de granulés d'herbe par an, suffisamment pour complémenter les laitières tout l'hiver ».

« CELA REPRÉSENTE UNE CHARGE DE 8 €/1 000 L »

D'octobre à avril, leur ration de base composée de foin (12 kg de MS) et de regain (5 kg) est complémentée au Dac avec trois ingrédients : un mélange de céréales aplaties comportant 60 % d'orge, 30 % de maïs et 10 % d'avoine (3 kg/VL/j maximum), des granulés d'herbe déshydratée (2 kg/VL/j maximum) et un complément minéral et vitaminé. Au pâturage, les vaches ne sont complémentées qu'avec des céréales (2 kg/j au maximum).

Du 1er novembre 2014 au 31 octobre 2015, Nicolas Marguet a distribué 816 kg de concentrés par vache. Sur la même période en 2014, il était à 700 kg. La production moyenne du troupeau s'est établie à 6 500 kg/VL au contrôle laitier en 2014 et 2015, avec respectivement 41,5 puis 40,8 de TB, 33,6 et 32,5 de TP. « C'est bien différent de la période où j'ai distribué 1,4 t de concentrés par vache et par an : cette complémentation comprenait alors 200 kg de tourteaux et des bouchons de luzerne ! Je n'utilise plus ces matières. J'ai réellement augmenté mon autonomie alimentaire avec les granulés d'herbe ! », se félicite l'éleveur.

La tonne de granulés est facturée 235 € par Désia 25. Sur 2015, ramené au lait produit, cela représente une charge de 8 €/1 000 litres de lait, soit un cinquième du coût total des concentrés des vaches laitières (39 €/1 000 l). Avec un prix du lait de 514 €/1 000 l, la marge brute de l'atelier lait de novembre 2014 à octobre 2015 a atteint 487 €/1 000 l.

« MON TROUPEAU RUMINE BIEN ET EST EN BONNE SANTÉ »

Adepte de la méthode Obsalim pour piloter l'alimentation, Nicolas Marguet constate : « Avec les granulés d'herbe, le troupeau rumine bien, est en bonne santé, a une situation de reproduction qui tend à s'améliorer et moins de problèmes de pieds... » Décidé à poursuivre l'utilisation d'herbe déshydratée, l'éleveur a refinancé 1 500 € dans la SAS Désia 25, dans laquelle il avait déjà engagé 5 000 €. « L'herbe déshydratée m'a de toute façon montré que je pouvais produire mon lait sans utiliser de soja importé ! », souligne l'éleveur.

En outre, en récoltant en fin d'été et début d'automne des troisièmes, voire quatrièmes coupes qu'il lui serait difficile de faire sécher, il est sûr de valoriser ces surfaces en herbe.

Cette meilleure exploitation de l'herbe est également observée chez les éleveurs qui, à l'inverse, font déshydrater des fauches précoces.

« Les premières récoltes ont lieu vers le 20 avril, ce qui permet de faire ensuite pâturer les vaches, notamment au moment où l'éleveur a un trou d'herbe : c'est particulièrement intéressant », souligne-t-on chez Désia 25.

CATHERINE RÉGNARD

(1) Le cahier des charges de l'AOP comté limite l'apport d'aliments complémentaires à 1 800 kg/VL/an en moyenne troupeau. L'herbe déshydratée entre dans ces aliments.

© C.R.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,1 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 6,94 €/kg net +0,02
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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