La Cour des comptes était chargée depuis début septembre - soit avant le début de la crise agricole - de passer au crible les contrôles effectués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes (DGCCRF), organisme chargé de vérifier les contrats conclus entre producteurs et premiers acheteurs dans la filière bovine dans le cadre des lois Egalim.
« Les sanctions prévues par la loi n'ont pas encore été appliquées. Cette situation doit être corrigée dans les meilleurs délais », a constaté la Cour lors de son investigation, soulignant que les contrôleurs avaient seulement procédé pour le moment « à des rappels à la réglementation lorsqu'elle n'était pas appliquée ».
Les lois Egalim 1 et 2, respectivement promulguée en 2018 et 2021, visent à protéger la rémunération des agriculteurs de la guerre des prix féroces entre supermarchés d'une part, et distributeurs et fournisseurs de l'agro-industrie d'autre part.
« S'il est compréhensible et même souhaitable que les contrôles réalisés lors de l'entrée en vigueur d'une loi présentent un caractère pédagogique, il apparaît peu justifiable que cette situation perdure », note le rapport.
« Il faut passer à une approche qui soit clairement plus dissuasive ou répressive », a recommandé mercredi le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici, lors d'une conférence de presse.
Afin d'améliorer les contrôles effectués par la DGCCRF, la Cour des comptes a édicté trois recommandations, dont la principale consiste à « mettre en place une plateforme de signalement destinée aux agriculteurs avec des garanties de confidentialité ».
Actuellement, les agriculteurs, « comme toutes les entreprises », peuvent effectuer des signalements sur le site de la DGCCRF, rappelle la Cour des comptes. Mais cette possibilité n'est pas toujours bien connue. La Cour préconise donc « à court terme » d'assurer « rapidement la promotion de cette possibilité auprès du monde agricole » et sur le « plus long terme » de créer « une plateforme structurée de recueil des signalements », afin de « faciliter l'identification des risques directement auprès des producteurs ».
Un rapport de force défavorable aux éleveurs
Au-delà des sanctions, le rapport de la Cour des comptes pointe aussi « l'asymétrie » des relations entre les « très nombreux » éleveurs bovins et « un faible nombre d'acheteurs » : ainsi, 76,3% de la collecte de lait est réalisée par 28 établissements collecteurs et pour la viande, 143 abattoirs assurent 92 % des tonnages. Il en résulte que les acheteurs « bénéficient d'un rapport de force à leur avantage dans la négociation des prix », estime la Cour des Comptes.
Si bien qu'elle encourage les producteurs agricoles à « se structurer (...) pour faire face efficacement au petit nombre » d'acheteurs qui bénéficient de ces « déséquilibres commerciaux », a indiqué son président Pierre Moscovici, rappelant que ce problème exigence était l'un des motifs de la « colère » des agriculteurs ces dernières semaines.
Cette publication intervient alors que la France, comme d'autres pays européens, est secouée par la colère du monde agricole. Après deux semaines de blocages et d'actions, les manifestants ont levé le camp début février après trois salves d'annonces du gouvernement.
Le gouvernement a notamment promis de « renforcer la loi Egalim », annonçant une « mission d'évaluation » du texte, et de renforcer les contrôles auprès des industriels et des distributeurs.
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