Blocage à durée indéterminée pour le plus grand abattoir du Massif Central

Villefranche-d'Allier (France), 15 juin 2015 (AFP) - Deux bus, des bottes de foin et du ravitaillement pour deux semaines : près d'une centaine d'éleveurs d'Auvergne, du Centre et du Limousin bloquent depuis dimanche soir le plus gros abattoir du Massif Central, pour obtenir une hausse des prix du boeuf et mettre la pression sur le ministère avant une réunion mercredi.

« Belote et rebelote ! » Installés sous un grand barnum, venus du Cher, de l'Indre et du Cantal, ils tuent le temps en jouant aux cartes devant les grilles des abattoirs Socopa (groupe Bigard), à Villefranche-d'Allier. « On restera tout le temps qu'il faut. On est déterminé à ne pas lâcher », lance l'un d'eux, Bruno Dufayet.

« On vend la viande en dessous de notre prix de production alors que celui de la viande dans les grandes surfaces ne baisse pas. C'est honteux, la différence n'est ni dans la poche du consommateur, ni dans la nôtre », s'indigne sa collègue Delphine Freysinnier, 30 ans, qui a quitté sa ferme de Trizac (Cantal) et ses vaches Salers pour lancer « un cri d'alarme ». Cette ancienne salariée d'une Chambre d'agriculture a choisi ce métier « par passion » mais elle supporte de plus en plus mal aujourd'hui « le manque de reconnaissance ». « Depuis mon installation, il y a cinq ans, je n'ai pas pris un seul jour de vacances. Je n'ai pas le temps et surtout pas les moyens », explique la jeune femme dont le revenu mensuel s'élève à 800 euros.

« En cinq ans, on a perdu 200 euros par tête. Or les éleveurs ne vendent pas seulement quatre-cinq vaches, mais des lots de 150. Au final, la différence se fait chèrement sentir d'autant qu'on doit toujours investir », ajoute, désabusé, Jérôme Colin, accoudé à une immense remorque vide.

Le salut, c'est l'export

« On est au pied du mur. Si ça continue, on ne pourra plus payer nos charges qui n'arrêtent pas d'augmenter. Autour de nous, on connaît tous des éleveurs qui arrêtent », déplore un autre Cantalien, Jean Tissandier, tandis qu'un camion frigorifique essaie d'entrer dans l'abattoir, sans succès. Comme les autres, il pointe la responsabilité des abatteurs comme le groupe Bigard qui tournent le dos à l'export : « Avec la crise de la vache folle, on a retrouvé une virginité sanitaire et cela nous ouvre de nouveaux marchés, en Chine, en Malaisie. Mais les abatteurs préfèrent tirer les prix vers le bas et servir la soupe aux grandes surfaces », déplore cet éleveur de 55 ans, en Gaec avec ses deux fils.

« Le marché européen est saturé. Notre planche de salut, c'est l'export. Par exemple, on pourrait répondre à la demande des pays du pourtour méditerranéen, qui se fournissent en Australie et en Uruguay », renchérit Joël Piganiol, éleveur de Limousines de 42 ans.

Pour beaucoup, la réunion de mercredi au ministère de l'Agriculture est cruciale. « On attend que le ministère réagisse et prenne ses responsabilités en reprenant son rôle dans le contrôle des cotations sur la filière via son organe FranceAgriMer », espère Bruno Dufayet.

Avant le relais mardi d'éleveurs du Puy-de-Dôme et de Haute-Loire, ils dormiront à tour de rôle dans les bus stationnés devant l'abattoir. « Sinon, il y a a de place dans la bétaillère », lance l'un deux, qui préfère encore la paille aux ronflements de ses collègues.

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Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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