« Pas de vache, ni outil de production : tout était à créer »

S’installer en montant un élevage de toute pièce.
S’installer en montant un élevage de toute pièce. (©Pixabay)

Chez Didier comme Valentin, installation rime avec création d’un élevage bovin, lait dans le Calvados pour le premier, viande dans le Maine-et-Loire pour le second. Partis de rien ou presque, tous deux ont sollicité un financement participatif sur Miimosa. Jean-François, lui, a fait appel au crowdfunding pour agrandir sa stabulation. De jeunes éleveurs, qui croient en l’avenir de la production de vaches laitières et allaitantes, ça existe !

Didier, 40 ans, est éleveur laitier bio dans le Calvados. Mais lorsque ce fils d’agriculteur s’est installé en hors cadre familial en 2018, « il n’y avait ni vache, ni outil de production sur la ferme : tout était à créer » ! Il commence à produire du lait en 2019, avec 16 premières bêtes. L’année suivante, il peut le commercialiser en AB pour fabriquer des yaourts de la marque Les 2 Vaches.

Depuis, le troupeau s’est bien développé et compte 55 mères, à 85 % normandes vs 15 % Holstein et… Kiwi. Cet « amoureux des vaches » prévoit « d’adopter » six génisses bordelaises, une race ancienne à faible effectif.

Didier commence à produire du lait en 2019, avec 16 vaches. Aujourd'hui, il a un troupeau de 55 mères. ( © DR)

Pour s’engager vers l’agriculture biologique, Didier convertit une grande partie des terres cultivables en prairies, où il a planté, l’hiver dernier, 600 m de haies bocagères et envisage d’en replaner 1 600 m l’an prochain. Les animaux y pâturent 300 jours/an. Le producteur fait également du foin bien sûr et de l’ensilage d’herbe. Son objectif est de « valoriser l’herbe au maximum afin de devenir autonome en fourrage et arrêter le maïs ensilage ».

« Agrandir l’étable, stocker les fourrages »

L’exploitation reprise étant à l’abandon, certains bâtiments étaient « vétustes », d’autres « fonctionnels vu leur âge » mais de surface « insuffisante » pour stocker tous ces fourrages, ainsi que la paille, et loger l’hiver l’ensemble du cheptel avec les jeunes. C’est pourquoi Didier projette de « rénover et agrandir la stabulation » et de construire un hangar de stockage. Il souhaite « améliorer le confort des vaches » pour augmenter la production laitière et qu’elles soient « en bonne santé » pour les « garder le plus longtemps possible ».

À travers ces différentes évolutions au niveau du corps de ferme et de l’alimentation des vaches, le jeune éleveur espère diminuer les émissions de gaz à effet de serre, et donc réduire l’empreinte carbone de l’élevage de 16 % (soit 144 teq CO2 émis en moins), comme préconisé dans le diagnostic Cap’2ER réalisé dans le cadre du programme Les deux pieds sur Terre mené par la laiterie Les 2 Vaches, Danone et l’institut de l’élevage Idele.

« Faciliter le travail quotidien »

Seul sur sa structure, il veut également « faciliter le travail quotidien » en stockant les fourrages dans un bâtiment accolé à l’étable. Terminé « la confection annuelle du "meulon" », cet « empilement de rangées de balles sur plusieurs étages », à l’extérieur ou protégé par un simple toit. En plus « d’économiser beaucoup de temps et d’énergie, je pourrai distribuer un aliment bien conservé, au sec, sain et de qualité », appuie le jeune producteur.

Un éleveur, bien dans ses bottes… de foin.

Au total, il doit investir 60 000 € environ (près de 40 000 € pour les 360 m2 de hangar de stockage et un peu plus de 20 000 € pour l’agrandissement et l’aménagement de la stabulation), dont 17 000 € financés par la laiterie via la démarche Les deux pieds sur Terre et 20 000 € collectés sur la plateforme de financement participatif Miimosa. Grâce à ces investissements, « je suis un éleveur bien dans ses bottes… de foin », conclut-il.

« Une meilleure santé et un meilleur lait »

Jean-François ambitionne lui aussi « d’être bien dans ses bottes » d’éleveur, comme il dit. Il y a une dizaine d’années, il a repris le flambeau sur l’exploitation familiale, derrière trois générations de producteurs laitiers, dans un village du Jura où il est désormais le seul qui subsiste. Le troupeau se compose d’une soixantaine de vaches (et d’un atelier de 150 taurillons), en traite robotisée pour « pérenniser l’activité laitière » après le décès de son père.

Jean-François élève 60 vaches laitières et engraisse 150 taurillons/an. ( © DR)

Pour limiter la charge de travail au sein de l’élevage, l’exploitant a acquis, en plus, un robot repousse-fourrage permettant « d’alimenter les bêtes en continu », et des détecteurs de chaleur pour suivre les cycles de reproduction de manière précise. Et il travaille avec un salarié et un apprenti. À noter : le lait est livré chez Danone pour la fabrication de Danette ; la structure comporte également une partie culture – des céréales (blé, orge brassicole, maïs grain séché à la ferme), des betteraves fourragères, etc. sur 120 ha de SAU – et de la prestation de services (pressage de foin et paille, épandage de lisier…).

Comme Didier, Jean-François aimerait agrandir l’aire paillée des laitières afin « qu’elles aient davantage de place ». « Leur santé et leur lait ne pourront qu’être meilleurs, un cercle vertueux », souligne-t-il. Toujours comme Didier, cette décision résulte du bilan carbone effectué sur la ferme, qui recommande par ailleurs « d’optimiser les quantités d’aliment données aux VL et d’engrais épandus dans les champs ». Le but est de réduire de 8 % les rejets de GES d’ici trois ans. De même que Didier enfin, l’agriculteur bénéficie d’une participation de la laiterie, à hauteur de 7 500 € ici, si la collecte sur Miimosa atteint l’objectif de 1 000 €. Il reste une quinzaine de jours pour y parvenir.

« L’élevage par goût et pour la ferme »

De même que Didier, Valentin souhait réintroduire l’élevage sur son exploitation. ( © DR)

Le projet de Valentin présente, de même, des similitudes avec celui de Didier. Certes il n’est pas enfant d’agriculteurs, mais son grand-père lui a fait « découvrir le métier d’éleveur, devenu une passion ». Après des études dans ce secteur, il est salarié agricole une dizaine d’années sur l’ancienne exploitation de son beau-père, avant de s’installer en août 2021 (avant son installation en élevage, Didier a eu plusieurs expériences professionnelles en fermes). Là aussi, elle était "abandonnée" et n’était plus utilisée que pour stocker le matériel et les fourrages des voisins.

Valentin a eu envie « de la faire revivre » pour y réaliser sa « vocation ». À l’image de Didier, il est passé en agriculture biologique. Et en plein bocage des Mauges (Maine-et-Loire), il lui « tenait à cœur de réintroduire l’élevage », par goût et pour le « bon fonctionnement » de sa structure. Les bovins, viande dans le cas présent, lui permettront « d’être autonome » sur les apports d’engrais organiques azotés aux cultures (pommes de terre et autres cultures de printemps) et entretiendront ses 10 % de surfaces inaccessibles et non cultivables. Ayant lancé, à l’instar de Didier, un appel aux dons sur miimosa.com, les 9 000 € récoltés serviront à acheter des génisses de six à huit mois.

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Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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