
Dans ce cas particulier de traitement des diarrhées néonatales, l'automédication mal raisonnée a entraîné l'apparition de résistance aux colibacilles dans le troupeau.
A LA FIN D'UNE VISITE CLASSIQUE DANS UN ÉLEVAGE LAITIER, alors que je rédige l'ordonnance, l'éleveuse s'approche et je vois poindre l'une de ces « visites à tiroirs » où on est appelé pour un cas et finalement, puisqu'on est là, on nous montre en plus des cas qui traînent. Elle me demande si « je n'aurais pas un flacon d'antibiotique (du Bay en l'occurrence) à lui laisser pour un veau qui a une diarrhée qui ne guérit pas ». D'emblée, je me rends compte du fossé médical qui me sépare de ma cliente et j'entame avec calme et pédagogie une demande de précisions sur ce cas particulier. « Je fais toujours une injection avec cet antibiotique quand ils ont de la diarrhée ! », fut l'essentiel de sa réponse, sous-entendu : « Au prix où ils sont, on ne va pas vous appeler pour ça. » Bref, rien de nouveau dans la gestion du veau laitier... Je demande néanmoins à voir l'animal en question. Il n'est pas dans un état alarmant. Je commence à expliquer que la délivrance d'antibiotique ne peut se faire maintenant que dans le cadre d'un bilan sanitaire mettant en évidence la répétition de certaines pathologies. Pour celles-ci, une prescription hors examen clinique peut se justifier en attendant l'efficacité de mesures préventives à mettre en place.
UNE ANALYSE BACTÉRIOLOGIQUE AVANT LA PRESCRIPTION
En outre, l'antibiotique demandé fait partie des familles d'antibiotiques critiques (fluoroquinolones en l'occurrence) dont la prescription doit être justifiée par une analyse bactériologique. Je dois être assez convaincant puisque ma cliente accepte un traitement local par voie orale en attendant le résultat de l'analyse de selles du veau.
Après quelques jours, les résultats reviennent avec une force pédagogique digne des meilleurs cas d'école.
J'explique à la propriétaire que deux microbes ont pu être isolés : un virus (rotavirus) et une bactérie (coli du sérotype CS31A). Pour le virus, pas d'antibiotique, et concernant le colibacille, le test de sensibilité (antibiogramme) révèle qu'il est résistant à tous les antibiotiques de la famille des fluoroquinolones. Cette situation laisse sous-entendre que cette famille d'antibiotiques a dû être largement utilisée dans cet élevage, ce qui a fini par générer des adaptations de la part des bactéries qui sont devenues résistantes. Cela pose un problème sanitaire dans la ferme qui dépasse le cas des seuls animaux. En effet, j'explique à la famille qu'il n'y a pas de barrière entre les espèces et que les colibacilles intestinaux des veaux finiront par transmettre leur résistance acquise aux antibiotiques aux colibacilles intestinaux humains, ce qui risque de poser un problème de santé si on doit utiliser ces antibiotiques pour soigner les personnes. À trop utiliser ces antibiotiques, on les a rendus inefficaces sur les animaux, mais aussi sur les personnes qui les entourent. Finalement, il a été décidé de mettre en place une vaccination des vaches gestantes avec un vaccin qui contient les valences virale et bactérienne des microbes en cause. Pour que cette mesure soit efficace, il faudra ensuite s'assurer de la prise de colostrum par le veau nouveau-né en quantité et en qualité. Ces mesures, accompagnées d'une hygiène rigoureuse dans les locaux des veaux, devraient permettre de diminuer les diarrhées néonatales.
L'INTÉRÊT DU BILAN SANITAIRE
Ce cas précis illustre parfaitement le bien-fondé des visites de bilan sanitaire régulières pour discuter des pathologies récurrentes de l'élevage et des mesures sanitaires et médicales à mettre en place. Il ne faut pas laisser dériver une automédication qui devient non seulement inefficace sur les animaux, mais également dangereuse pour la santé humaine.
L'analyse bactériologique a mis en évidence un virus (rotavirus) et une bactérie (coli du sérotype CS31A) résistante à tous les antibiotiques de la famille des fluoroquinolones. © CHRISTIAN WATIER
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