Confiner les animaux, seule solution en cas d'épizootie ? Les élevages en plein air avicoles ou porcins défendent leur modèle fermier dans le cadre d'une expérimentation en cours à travers la France, avec l'espoir de voir évoluer une réglementation jugée injuste.
« Aujourd'hui vous avez les mêmes règles ici, dans mon champ, que dans un élevage industriel de 40 000 poulets claustrés », déplore Matteo Villatte, 23 ans, producteur de poulets fermiers bio à Bergouey-Viellenave (Pyrénées-Atlantiques).
Chez lui, quelques centaines d'animaux évoluent à l'air libre dès leurs huit semaines, jusqu'à leur abattage, sur place, quatre mois plus tard.
S'il n'a pas été touché par la grippe aviaire, il a dû mettre en place, comme tous les éleveurs, des procédures pour éviter les contacts entre les lieux dits « publics » et ceux où évoluent ses poulets. Idem pour ses porcs gascons, qui vivent en extérieur.
Mais il s'est toujours refusé à « claustrer » ses bêtes - les confiner dans des bâtiments en temps de crise - comme l'exigent pourtant les services vétérinaires. « Ce serait nocif pour leur croissance et leur bien-être, sans compter que j'aurais davantage de mortalité », justifie-t-il.
Pour la Confédération paysanne, son pendant basque ELB et le Modef, ce renoncement imposé au plein air, même temporaire, revient en outre à mentir aux consommateurs.
La réglementation est d'autant plus injuste, selon eux, que ces élevages fonctionnent le plus souvent en circuit fermé et ne diffusent pas le virus : poulets, canards ou porcs ne sortent pas de la ferme et n'entrent jamais en contact avec des intervenants extérieurs.
À l'initiative de ces syndicats, le ministère de l'Agriculture a lancé une expérimentation de biosécurité destinée à évaluer les mesures de prévention spécifiques à ces exploitations.
Elle est en cours, depuis mars, dans quelque 140 fermes-pilotes de taille modeste, réparties dans 25 départements. Le but ? Identifier « des mesures alternatives et efficaces qui pourraient conduire à une évolution de la réglementation » d'ici mai 2025.
Vertus
Une évolution réclamée à cor et à cri, depuis des années, par les tenants du modèle dit « autarcique », à rebours d'un modèle industriel aux flux de déplacements beaucoup plus importants, parfois d'un département à un autre.
« Le problème, c'est qu'au fil des années, on a remplacé 5 à 10 élevages autarciques par de grosses fermes qui sont devenues des "foyers bombes" parce que les effectifs les plus importants sont les plus à risques », estime Julien Mora, porte-parole de la filière avicole et représentant du Modef.
« 2017 était un incendie et on a ensuite adopté la politique de la terre brûlée », poursuit cet éleveur des Landes, qui a dû abattre près de 8 000 canards au fil des différentes crises. D'après le syndicat, depuis 2015, 50 % des élevages de plein air ont disparu dans ce département.
À Ilharre (Pyrénées-Atlantiques), Jean-Philippe et Valérie Harismendy placent aussi beaucoup d'espoir dans l'expérimentation à laquelle ils participent.
Il y a deux ans, des manifestants avaient empêché les services vétérinaires d'accéder à leur ferme pour y abattre les canards. Les bêtes n'étaient pas infectées, mais l'exploitation était à trois kilomètres d'un cas positif dans une commune voisine.
Le couple d'exploitants a reçu des lettres de relance puis une mise en demeure pour se mettre aux normes. « On était à deux doigts d'arrêter, on travaillait avec la trouille, on a reçu ce courrier le 23 décembre, j'étais harcelée par les services vétérinaires », raconte Valérie.
Pour autant, elle et son mari ne changeraient de modèle sous aucun prétexte. « On y tient mordicus, on a considéré que les problèmes venaient des petits élevages parce qu'on est en plein air, moi je trouve aberrant que l'expérimentation ait lieu sur nous et pas les industriels », affirme Jean-Philippe.
Après l'épisode 2021-2022 d'influenza aviaire, qui a conduit à abattre 22 millions de volailles en France dont 30 % préventivement, un rapport parlementaire avait appelé à soutenir les modèles autarciques, « vertueux sur le plan de la biosécurité et qui répondent aux attentes citoyennes ».
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