Les grands pays européens producteurs de lait accueillent favorablement la fin des quotas laitiers le 1er avril prochain. Tous les éleveurs européens l’ont anticipée, chacun à leur façon. Mais certains d’entre eux ont déjà saisi les limites de ce changement : la fin des quotas va porter au premier plan de nouvelles réglementations auxquelles ils n’échapperont pas.
L’expérience des éleveurs en Nouvelle-Zélande, coutumiers de la volatilité des prix de la poudre et du beurre, pourrait illustrer ce que sera le quotidien de leurs collègues européens. Les contraintes environnementales liées à la dimension de leur ferme et à la densité des animaux élevés, sont de plus en plus prégnantes. Incontournables, elles constituent d’importants facteurs limitants de la croissance de la production de lait . La surface agricole des îles n’est pas extensible !
Les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole sont en effet très importantes (50 % des quantités produites en Nouvelle-Zélande) et la qualité de l’eau est dégradée. Par ailleurs, la sécheresse est devenue une menace récurrente. Or la sécurité alimentaire et la lutte contre le réchauffement climatique font partie des défis que la Nouvelle-Zélande veut contribuer à relever à son niveau.
Cette urgence environnementale et économique se traduit par des investissements massifs et, pour rester compétitifs, par de nouvelles acquisitions de terres. D’où la flambée des prix du foncier multipliés par 4 en 15 ans (un hectare vaut en moyenne 20.000 €), ce qui n’est pas sans conséquences sur l’équilibre économique des exploitations.
A la différence de leurs collègues néo-zélandais, les producteurs européens ne sont pas habitués à la volatilité des prix des produits laitiers . De très forte amplitude, elle crée d’importants décalages entre les évolutions des prix à la production et des prix des intrants. D’où la nécessité de se constituer d’importants fonds de roulement.
En France, cette volatilité constitue même une nouvelle contrainte pour produire plus de lait, en offrant peu de lisibilité aux porteurs de projets dorénavant très liés à leur contrat qu’ils peinent à faire respecter. Des marges sur coût alimentaire de 270 €/1.000 l ont parfois été réduites à 170 €/1.000 l en quelques mois, ce qui rend difficile l’élaboration de plans de financement viables.
Maintenir des systèmes de dimension familiale
Les Néerlandais et les Irlandais affirment s’être bien préparés à la fin des quotas. Les premiers envisagent d’augmenter de 20 % leur production de lait et les seconds de 50 %, selon Benoît Rouyer du Cniel qui intervenait lors du colloque Saf agr’iDées du 21 janvier dernier. Mais il appartient aux collecteurs de lait de trouver de nouveaux débouchés à l’export avec des produits à forte valeur ajoutée pour tenter de protéger leurs éleveurs de la volatilité des prix. Car les outils de régulation de la production de lait de la Commission européenne ne les convainquent pas, qu’ils soient Néerlandais, Irlandais et surtout Français ; ces derniers n’ayant pas pleinement bénéficié de la bonne conjoncture des prix en 2013/2014.
Avec la fin des quotas, se pose davantage que par le passé, la question de la durabilité de la production laitière. Elle porte dorénavant les contraintes environnementales au premier plan, réduisant ainsi les ambitions expansionnistes des producteurs de lait des grands pays exportateurs.
Justifier les aides auprès du contribuable
Aux Pays-Bas, le coût des nouveaux investissements environnementaux est renchéri par la convergence des aides et la diminution de leurs montants qui s’en suivra (jusqu’à 10.000 € par exploitation) en plus de la baisse du prix du lait .
Avec des élevages à la fois plus importants et moins nombreux, l’expansion de la production laitière doit par ailleurs prendre en compte les exigences des contribuables européens. Or ces derniers tiennent à ce que les aides versées aux éleveurs soient bien employées.
Aux Pays-Bas, les éleveurs sont ainsi tenus de maintenir les vaches à l’herbe une partie de l’année. La fin des quotas renforcera certes la concentration des élevages mais ils devront conserver une dimension familiale (au plus 100 VL).
Enfin, le maintien de la production de lait sur l’ensemble du territoire et dans les zones défavorisées en particulier est aussi un défi important à relever. Il est incontournable en Allemagne, comme en France.
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