Deuxième poste de dépense derrière l’alimentation, la mécanisation pèse lourd dans les élevages bovins, notamment en bio. Une étude menée dans 28 fermes du réseau Inosys en Auvergne-Rhône-Alpes, couplée aux diagnostics réalisés avec l’outil Mécagest développé par le réseau Cuma, met en lumière une forte hétérogénéité et des marges de progrès importantes.
Dans les systèmes bovins, la mécanisation pèse pour 22 % sur les coûts de production, presque autant que le poste « alimentation et surfaces » (25 %) et souvent plus que le poste « travail », soit la rémunération de l’éleveur et de ses éventuels salariés (21 %). Ce poste de dépense représente donc un enjeu économique central, qui a été amplifié depuis l’inflation. Alors que le prix du lait bio n’a progressé que de 5 % en deux ans, les coûts liés à la mécanisation ont explosé, en particulier le carburant.
57 653 € de charges de mécanisation en moyenne
Une étude menée par Inosys, l’Idele et la FRCuma vise à évaluer les charges liées à la mécanisation en élevages bovins bio. Elle s’appuie sur les outils Diapason et Mécagest, permettant de suivre les fermes et d’évaluer le coût réel d’usage du matériel. Ce travail révèle qu’en moyenne, les charges de mécanisation atteignent 57 653 € par an dans les 28 fermes du réseau Inosys qui ont été étudiées, avec des écarts vertigineux : de 21 819 € à 120 656 €. « On observe jusqu’à 100 000 euros de différence entre deux exploitations, souligne Jean-Pierre Monier, conseiller élevage laitier de la chambre d’agriculture de la Loire. Rapporté à 1 000 litres de lait, le coût varie de 79 € à 206 €, soit du simple au triple. »
Ces écarts ne s’expliquent pas seulement par la taille des exploitations (de 36 à 185 ha de SAU, cheptels allant de 44 à 188 vaches). Ils traduisent surtout des choix stratégiques. Comme le rappelle Jean-Pierre Monier, « l’organisation du travail, l’assolement et la conduite agronomique influencent fortement les charges de mécanisation ». Si les tracteurs sont utilisés en moyenne 782 heures par an en bio, contre 995 heures en conventionnel, cette différence reste limitée et ne suffit pas à compenser les écarts structurels de charges.
Le couple tracteur carburant : 59 % des dépenses
Le premier poste de dépense est sans surprise constitué de la traction et du carburant, qui représentent en moyenne 59 % des charges de mécanisation (36 % pour les tracteurs, 23 % pour le carburant). Là encore, les écarts sont notables d’une exploitation à l’autre, allant de 48 % à 70 % des charges. La récolte représente 19 %, et le transport et la manutention, 14 %. Seules 12 % des heures d’utilisation d’un tracteur concernent des travaux nécessitant une forte puissance, soit environ 72 heures par an. Pourtant, beaucoup d’éleveurs s’équipent de modèles puissants, parfois surdimensionnés. « Choisir la puissance du tracteur est souvent un choix passionnel plus que rationnel », note le conseiller de la chambre d’agriculture Loire. L’achat d’un matériel plus gros que nécessaire entraîne mécaniquement une hausse des charges fixes, sans gain de productivité évident. D’autant que la flambée des prix du machinisme après la crise du Covid a accentué la pression économique.
Concernant l’externalisation de la mécanisation par des tiers, l’étude montre deux grands profils d’éleveurs : une moitié qui internalise 80 % ou plus de ses charges de mécanisation, privilégiant l’autonomie, et une autre moitié qui fait appel à la Cuma ou à des entrepreneurs de travaux agricoles (ETA) pour 20 à 40 % des interventions, avec parfois jusqu’à 53 % de frais délégués. La mutualisation permet un accès à du matériel performant, un gain de temps sur les chantiers, une mutualisation du temps d’entretien mais offre aussi moins de souplesse d’organisation. L’étude révèle aussi que le recours à une Cuma ou à des ETA n’a pas d’impact sur le montant des charges de mécanisation, ces dernières étant équivalentes dans un système autonome ou mutualisé.
Le rôle déterminant du système fourrager
Les choix agronomiques influencent directement la consommation de carburant, et donc les charges de mécanisation. Plus la place du maïs est importante, plus la consommation grimpe, en moyenne de 100 à 200 litres de gazole non routier par ha. En revanche, lorsque le calcul est rapporté aux 1 000 litres de lait, la différence tend à s’estomper : le niveau d’autonomie alimentaire et de valorisation du pâturage devient alors déterminant. « Le recours au pâturage est un levier de sobriété mécanique », insiste Jean-Pierre Monier. Chaque hectare pâturé est un hectare où le tracteur reste au hangar. La conduite du troupeau sur herbe, l’organisation du parcellaire et les rotations culturales se révèlent donc autant de leviers pour contenir la facture énergétique.
L’étude a également permis de contrer une idée reçue : garder un tracteur plus longtemps n’induit pas forcément des charges d’entretien plus élevées. « À taux de vétusté égale, on observe des charges à l’hectare qui varient fortement, et l’entretien n’augmente pas de façon linéaire avec l’âge du matériel », relèvent les conseillers. Les fermes en agriculture biologique n’ont d’ailleurs pas de coûts d’entretien plus élevés que leurs homologues conventionnelles.
En conclusion, les charges de mécanisation ne varient ni en raison de la surface exploitée, ni de la taille du troupeau, ni du recours aux travaux par des tiers, et ni à l’ancienneté du matériel. Par ailleurs, l’augmentation de la production laitière ne garantit pas une réduction des charges. Les pratiques agronomiques, notamment le pâturage, la rotation et les assolements, influencent fortement le niveau des charges. Enfin, l’étude rappelle que le montant du poste mécanisation ne représente pas le seul argument en faveur d’une sobriété mécanique, le confort de travail et la question environnementale, centrale dans les systèmes bio, sont également à prendre en considération.
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