La Brique Rose, marque locale et équitable par et pour les éleveurs

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producteurs de lait associés de La Brique Rose
Créée en 2022 sous statut association loi 1901, La Brique Rose réunit désormais 12 producteurs de lait locaux. En 2025, ils devraient être 17. (©Thomas Salva pour Lune Bleue)

La Brique Rose, brique de lait UHT demi-écrémé, a été fondée par des éleveurs de Haute-Garonne, sous statut associatif et en lien avec YéoFrais, l’une des dernières usines du centre-ville de Toulouse. La marque évolue encore avec de nouveaux projets, quitte à revoir son statut initial.

L’histoire de La Brique Rose, dans la région de Toulouse, est avant tout une histoire d’hommes et de rencontres. « Avec Sébastien Albouy, président de la chambre d’agriculture de Haute-Garonne, cela nous trottait dans la tête depuis longtemps, entame Florian Leguay,  président de l’association d’éleveurs La Brique Rose et éleveur au Gaec de Sepx, près de Saint-Gaudens, dans le Sud-Ouest, zone de déprise laitière. Nous avions fait nos armes ensemble aux Jeunes agriculteurs, mais, en tant que JA, nous n’avions pas de poids. Pourtant, dès 2009, nous avions dans l’idée de créer une marque laitière en Haute-Garonne.

La brique de lait La Brique Rose n’existe qu’en lait demi-écrémé UHT sans bouchon. L’association peut racheter des palettes de lait à YéoFrais afin que des éleveurs puissent les proposer en vente directe. (© E. Durand)

Nous avons essayé aussi de remonter au niveau régional, mais cela a avorté. » Ce n’est qu’aux dernières élections des chambres d’agriculture, en 2019, que le projet a pris une autre tournure. La Haute-Garonne était le seul département dont les Jeunes agriculteurs avaient pris la tête.

Un projet porté de longue date

« Nous avons remis au jour notre projet, avec un poids politique accru. Nous avons rencontré plus de monde et notamment Jérôme Servière, le DG de YéoFrais, continue Florian Leguay. Nous avons travaillé en petit comité jusqu’au salon des Pyrénéennes, en 2021, où nous avons annoncé le lancement de la marque. Un an après, en novembre 2022, nous sortions notre première brique de lait, avec une collecte démarrée en juillet. Au début, nous pensions créer la marque et garder de 10 à 20 % des volumes de lait produits pour elle, comme pour une vente directe, mais cela n’est pas passé auprès des laiteries. Aussi avons-nous sauté le pas avec un apport total. Nous avons commencé avec huit producteurs, essentiellement du Comminges, en visant le marché de Toulouse. »

Trois d’entre eux n’avaient pas de contrat avec Lactalis, mais ont respecté un préavis de trois mois par principe. Quatre autres avaient un préavis de douze mois avec Lactalis et le dernier dépendait de la laiterie Onetik avec un préavis de dix mois. En juillet 2023, quatre autres producteurs arrivent, à la suite de la réorientation de production du site de Villecomtal-sur-Arros (Gers) de Danone vers du lait végétal. Et, pour 2025, se greffent encore cinq autres producteurs (quatre issus de Lactalis avec douze mois de préavis et un issu de Sodiaal en fin de contrat de cinq ans).

Tous ensemble, ils représentent entre 9 et 10 millions de litres collectés. « Cependant, nous ne vendons pas 10 millions de litres La Brique Rose !, relève Florian. Notre objectif, en 2024, était d’un million de litres. Nous sommes à environ 600 000 litres. Le fait d’être un lait UHT demi-écrémé sans bouchon nous pénalise pour une vente au consommateur, mais pas pour la restauration collective. Nous sommes la seule marque française de lait UHT à tout réaliser dans le même département : production, collecte et embouteillage. Le tout en lait tracé. »

Un statut associatif loi 1901

La Brique Rose est une association loi 1901. « Il a fallu aller vite », explique Florian. Toujours avec une longueur d’avance, il enchaîne : « Nous voulons créer notre propre laiterie afin de transformer environ 5 millions de litres en fromage et fromage blanc à destination de la restauration collective. C’est un projet à 6 millions d’euros pour aller encore plus loin dans la recherche de valeur ajoutée. » Une recherche que Florian érige presque en mantra au vu du développement de son exploitation, en lien avec sa femme Christine (lire, page 70).

Côté contrat, il en existe deux avec YéoFrais. Le premier concerne l’achat du lait, avec « un prix discuté ensemble et basé sur les coûts de production (50 %), le prix FranceAgriMer (45 %) et le rapport beurre-poudre (5 %), déclare Florian. Cent pour cent de notre lait est acheté avec cette formule de prix, revue tous les ans, et nous rajoutons un indicateur Sud-Ouest de 20 €/1 000 l, car certaines charges sont plus importantes du fait d’être dans le Sud-Ouest. Et 20 €/1 000 l se rajoutent au volume vendu sous la marque La Brique Rose, avec une régulation par trimestre. Le prix final au consommateur est réfléchi ensemble. » Pour octobre, le prix de base du Gaec de Sepx était de 458 €/1 000 l et de 493 €/1 000 l, toutes primes incluses. Le second contrat avec YéoFrais porte sur une licence de marque. « Nous confions notre commercialisation à YéoFrais. Aussi, nous discutons ensemble de nos objectifs de vente et de pourquoi ils ne sont pas atteints », indique Florian. L’un des prochains défis est de développer la crème, pas les yaourts, car YéoFrais a déjà sa marque propre où apparaît le logo La Brique Rose. « Pour faire de la crème, il faut 100 000 litres de lait d’un coup pour lancer la machine. Demain, avec les nouveaux producteurs, nous pourrons le faire », projette Florian.

L’association La Brique Rose tourne avec un salarié à mi-temps. Elle ne fait pas de bénéfice car tout est redistribué aux producteurs. Seuls 5 €/1 000 l sont prélevés pour le fonctionnement. Avec le projet de laiterie à venir, nécessitant l’achat d’un terrain situé au centre des fermes des producteurs, se pose la question de maintenir ce statut ou de le faire évoluer en Société coopérative d’intérêt collectif (Scic), Société coopérative de production (Scop) ou même de rester en association. « Cela reviendrait à refaire une coopérative. Nous n’avons rien inventé. Nos aïeux l’avaient déjà fait avant », pointe Florian, sourire aux lèvres, en évoquant « un esprit de fruitière ». Selon lui, « le fonctionnement associatif est plus souple qu’une organisation de producteurs et nous pourrions aussi vendre du lait spot ».

Un lait certifié Max Havelaar

En parallèle, les six derniers mois ont porté sur une labellisation Max Havelaar, avec la construction d’un cahier des charges adapté au contexte climatique et d’élevage local afin de justement pouvoir aller sur le marché de la restauration collective et labelliser un maximum de producteurs. « Nous devons rentrer dans le cadre d’égalim pour atteindre ce marché », justifie l’éleveur, qui imagine vendre entre 2 et 3 millions de litres supplémentaires par ce biais d’ici deux à trois ans. Pour être certifié, en plus de répondre au cahier des charges, l’éleveur doit remplir l’une des trois conditions : soit avoir un revenu inférieur à 1,5 Smic, soit être un jeune agriculteur, soit être en conversion à l’agriculture biologique. Une prime de 20 €/1 000 l est alors versée sur le lait vendu certifié. Cet argent est tracé et doit être utilisé dans un cadre bien précis de projets collectifs ou d’ordre sociétal. Un cahier des charges existe également pour valider la traçabilité de la production avec l’association de producteurs et un autre avec YéoFrais.

À travers cette certification, le collectif a posé une deuxième brique pour atteindre son objectif de répondre au marché de la restauration collective. Reste l’achat du terrain pour la future laiterie et un possible changement de statut, deux thématiques sur la table de l’assemblée générale de l’association début décembre.

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Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,3 €/kg net +0,07
Vaches, charolaises, R= France 7,11 €/kg net +0,05
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo

Le prix du lait Spot dégringole

Lait Spot

Les cours du beurre en baisse

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