Hiver comme été, les associés du Gaec La Voie verte ont adopté la technique de l’affouragement au pâturage, ou bale grazing. Avec en plus la fermeture de la salle de traite pendant deux mois, ils réduisent à la fois leur temps de travail et les charges de l’exploitation.
Pour Arnaud et Martine Baranger, installés depuis dix ans à Campbon, en Loire-Atlantique, le métier d’éleveur laitier rime avec temps de travail maîtrisé. Ils estiment leur durée d’activité hebdomadaire à 35 heures en moyenne sur l’année pour une rémunération de 1 300 euros par mois chacun. Pour atteindre leur objectif, ils ont fait le choix de simplifier au maximum leur système. Depuis cinq ans, les vaches sont à l’extérieur toute l’année, pâturant l’herbe fraîche ou consommant du foin quand la pousse des prairies est à l’arrêt (hiver, été). « On ne s’interdit pas de les mettre à l’abri en cas de mauvaises conditions mais, de manière générale, nous pensons qu’elles sont mieux dehors », déclarent-ils.
Avant de basculer sur cette organisation, l’étape préalable a été de grouper les vêlages au printemps afin de fermer la salle de traite en janvier et février. Durant cette saison hivernale, les éleveurs sélectionnent une prairie dégradée parmi les terres drainées de l’exploitation (70 % de la surface). Ils découpent la parcelle de trois à quatre hectares en huit paddocks couloirs, et disposent une quinzaine de bottes de foin sur chacun. Chaque paddock ainsi constitué doit subvenir aux besoins des vaches laitières durant une semaine environ. « Nous prévoyons une botte pour une dizaine de vaches au maximum, expliquent-ils. Nous avons fabriqué des râteliers à l’aide de tuyau PVC de diamètre 25 mm et de rouleaux pour le film d’enrubannage. Ils sont légers et faciles à déplacer manuellement par une personne seule. Nous avons fait sans râtelier la première année mais les vaches poussent les bottes ! » Chaque jour, au fur et à mesure de la consommation du foin, les vaches sont déplacées à l’aide d’un fil avant et d’un fil arrière. L’objectif est qu’elles ne piétinent pas trop le terrain et que les bouses soient réparties le mieux possible sur l’ensemble de la parcelle. « Les pertes de foin dépendent des conditions climatiques, observent les éleveurs. Nous pensons qu’elles ne sont pas trop supérieures à celles que l’on observe en râteliers ou aux cornadis. De plus, ce foin n’est pas vraiment perdu puisqu’il retourne au sol pour l’enrichir. C’est aussi un moyen de répandre dans la prairie les semences prairiales contenues dans les bottes. »
Semis de mélange céréalier à l’automne
À l’issue de cette période de deux mois d’affouragement au pâturage (ou bale grazing), les animaux quittent la parcelle en direction des prairies à déprimer. « Le plus souvent, nous faisons sur cette parcelle une fauche tardive mi-juin, puis du pâturage, et nous semons un mélange céréalier à l’automne après deux passages de déchaumeur à disques et avant un roulage. L’objectif de ce semis de céréales dans une prairie fatiguée est de la relancer. Toutefois, cet effet est difficile à évaluer. »
Cette prairie céréalière(1) est moissonnée l’année suivante, ou alors elle intègre la sole pâturée si le développement de la culture est compromis. En cas de moisson, la récolte (d’environ 10 à 15 quintaux) est divisée en deux lots : le premier, non trié, servira de semence fermière (il contient aussi des graines prairiales) ; le second, trié, ira à la complémentation des vaches laitières en fonction des besoins (grand épeautre en début de lactation à la mise à l’herbe, féverole l’été). Les 40 bottes de foin paille réalisées ont également leur utilité pour les quelques animaux en bâtiment (génisses de moins de 1 an, vaches nourrices en adaptation).
Arnaud et Martine Baranger pratiquent également l’affouragement au pâturage en été, y compris sur les terres non drainées. Plutôt qu’une parcelle parking fixe, ils utilisent là aussi un fil avant et un fil arrière afin de répartir au mieux les bouses. « Pour le foin de pâturage d’été, nous ne rentrons même pas à l’abri les bottes confectionnées quelques semaines plus tôt, soulignent les éleveurs. La fauche des prairies étant effectuée au stade épi à 5 cm, puis le bottelage fin mai-début juin, ça n’en vaut pas la peine ! En revanche, nous rentrons les bottes destinées au foin de pâturage d’hiver car nous faisons pâturer les repousses sur ces parcelles. »
Moins de 1 500 litres de gasoil par an
Environ 40-45 hectares sont fauchés chaque année, en alternant les prairies d’une année sur l’autre. Les éleveurs récoltent 400 bottes de foin par an, dont la moitié à peu près est consommée l’hiver : cela suffit en général aux besoins du troupeau.
Outre le gain de temps généré par ce système, Arnaud et Martine Baranger apprécient l’économie réalisée en matière de mécanisation. Ils ne possèdent qu’un tracteur de 70 chevaux et une faneuse et font appel à la Cuma pour la fauche et le pressage, ainsi que pour la moisson de la prairie céréalière. « Nous consommons moins de 1 500 litres de gasoil par an, y compris pour le matériel de la Cuma », remarquent-ils.
Concernant le fumier, quelque 50 tonnes sont produites chaque année au niveau de la nurserie, des cases d’adaptation pour les vaches nourrices, et de l’accès à la salle de traite, paillé pour éviter les glissades. Ce fumier n’est pas épandu par les éleveurs sur leurs terres mais récupéré par des maraîchers à proximité, en échange d’un approvisionnement en légumes.
(1) Voir L’éleveur laitier n° 337, décembre 2023, page 30.
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