Quoiqu’en dise le médiateur des relations commerciales (voir l’interview de Thierry Dahan), les responsables d’organisations professionnelles (OP) n’ont pas vraiment le sentiment que les conditions contractuelles s’améliorent, bien au contraire ! En mai, France OP Lait et Poplait l’ont rappelé dans des communiqués. « Les producteurs sont maintenus à tout prix sous la dépendance des industriels », dénonce Poplait. « Les industriels contournent les OP», renchérit France OP Lait. Ce n’est pas la première fois que ces associations réagissent ainsi mais le déséquilibre des relations persiste.
Dénonciation de contrat par Savencia avec l’OP Sunlait, absence de contrat-cadre et fixation unilatérale du prix depuis des mois chez Saint-Père, les exemples sont nombreux. Saint-Père est allée jusqu’à envoyer des contrats individuels à des éleveurs adhérents à l’OP, ce qui est interdit comme l’a rappelé la CEPC (commission d’examen des pratiques commerciales).
Refus de reconnaissance des OP de la part des laiteries
Malgré la loi qui impose la fixation du prix en fonction d’indicateurs reconnus et négociés avec l’OP, certaines laiteries maintiennent un prix aligné sur la concurrence. Dans le même esprit, elles refusent aux éleveurs le droit de choisir leur acheteur de lait. Certaines clauses de contrat, chez Lactalis par exemple, s’apparentent à une exclusivité d’un autre temps. Poplait cite aussi le refus de transmettre les données de facturation ou de cogérer les volumes.
Si la médiation permet parfois de dénouer les conflits, elle demande du temps. Et les laiteries qui enfreignent la loi ne sont pas sanctionnées. Il faut pour cela aller en justice et l’exemple de Sunlait montre à quel point ce type de démarche est long et incertain.
La tendance à la baisse de la collecte devrait redonner du pouvoir aux producteurs. À l’inverse, elle pousse les industriels à sécuriser leurs approvisionnements et donc à verrouiller encore plus la liberté des producteurs.
France OP Lait et Poplait appellent les pouvoirs publics à réagir, bien que l’actualité récente montre que ces derniers se préoccupent d’abord du pouvoir d’achat, oubliant leurs belles paroles sur la souveraineté agricole. Le ministre de l’Agriculture lui-même ne semble pas encore avoir pris conscience du rôle des OP. Il ne répond pas à leur courrier.
Sortir de la subordination
Alors que faire ? La création de ces associations a au moins le mérite de permettre aux responsables d’OP de partager leurs réflexions et leurs expériences et de se soutenir. Elles ont aussi mis la pression sur le Cniel pour pouvoir prendre leur place en son sein. Il y a des résistances, y compris dans le collège des producteurs, mais au moins, le dialogue s’engage.
La structuration des OP ouvre aussi la voie à une mutualisation des moyens et des compétences de nature à alléger les freins quand il s’agit d’attaquer une laiterie en justice.
Cependant, cela ne suffit pas. « Nous voulons sortir de la subordination à un seul acheteur pour sécuriser nos débouchés », affirme Fabrice Guérin, président de Poplait. Lequel annonce «des projets structurants pour la maîtrise de la mise en marché ».
Car, si rien ne bouge, l’absence de rentabilité et de perspectives continuera de décourager les jeunes, tandis que le recul du chômage facilite les départs anticipés.
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