Comment la filière laitière a-t-elle réagi après la publication de l'étude semblant démontrer un risque OGM ?
Thierry Geslain : Nous nous sommes intéressés de près au contenu de cette étude très surprenante et très médiatisée. Même si des voix s'élèvent sur sa pertinence et son sérieux, ce n'est pas à nous de juger de sa valeur. La balle est aujourd'hui dans le camp des scientifiques. Nous attendons notamment l'avis du Haut conseil des biotechnologies et de l'Agence française de sécurité sanitaire (Anses). Notre première réaction a été de dire que le maïs OGM résistant au Roundup, mis en cause dans cette étude, ne peut pas se retrouver dans l'alimentation d'une vache laitière française. Car nous sommes autosuffisants en maïs et sa culture n'est pas autorisée sur le territoire, pas plus que d'autres OGM. La seule variété de maïs autorisée à la culture en Europe fait l'objet d'un moratoire. Ce n'est pas un maïs résistant au Roundup, mais un autre résistant à la pyrale.
Mais tout le monde sait que nos vaches laitières peuvent consommer du soja OGM résistant au Roundup ?
T. G. : C'est indéniable, car nous ne sommes pas autosuffisants en protéines et 80 % du tourteau de soja importé en France est OGM. Mais il faudra toujours rappeler aux consommateurs qu'une vache laitière se nourrit avant tout des fourrages produits sur l'exploitation. La part de soja entrant dans les concentrés se situe entre 0 et 5 % de la ration totale. Avec l'essor des biocarburants, les disponibilités en tourteau de colza ont crû et la consommation de tourteau de soja a baissé de plus de 20 %. De plus, en 2009, le Cniel a commandé une étude à l'Inra et à l'Institut de l'élevage pour chercher des séquences d'ADN transgénique dans le sang des vaches nourries avec un maïs ensilage OGM, en l'occurrence le Bt176 synthétisant une protéine insecticide. Les chercheurs ont montré que des petits morceaux d'ADN provenant de la nourriture peuvent traverser la membrane intestinale et se retrouver dans le sang. En revanche, l'ADN modifié du maïs n'a pas pu être détecté dans le sang (et a fortiori dans le lait). La protéine insecticide du Bt176 n'a pas davantage été retrouvée. L'étude a donc conclu que les outils actuels de contrôle ne permettent pas de savoir si un animal a consommé ou pas des aliments transgéniques et que leurs produits (lait, viande) sont équivalents. Ceci a confirmé la décision des pouvoirs publics de ne pas imposer un étiquetage obligatoire sur les produits animaux issus d'élevages utilisant des aliments OGM.
N'y a-t-il pas une confusion chez le consommateur entre produit contenant des OGM et produit issu d'animaux nourris avec des OGM ?
T. G. : Effectivement, tout cela n'est pas clair pour le consommateur. Une enquête que nous avons menée en 2009 sur la perception du lait vis-à-vis des OGM le démontre. Un quart des consommateurs considèrent que le lait d'un animal ayant mangé des OGM est OGM, alors que cela n'a rien à voir ! C'est pourquoi la filière laitière française reste très attentive à toutes les nouvelles suspicions sur le risque OGM. L'utilisation de produits transgéniques dépasse souvent le cadre de la sécurité sanitaire. C'est ainsi que nous devons nous adapter à une nouvelle règle d'étiquetage des denrées alimentaires qui s'applique en France depuis le 1er juillet 2012. Le « sans OGM » concerne les ingrédients végétaux pouvant contenir au maximum de 0,1 à 0,9 % d'OGM. Mais il existe aussi une mention « nourri sans OGM » pour les produits provenant d'animaux élevés avec des aliments contenant au maximum 0,9 % d'OGM. La filière des Volailles de Loué utilise déjà cette mention sur son packaging et ses publicités. La filière du lait est beaucoup plus prudente dans sa communication, consciente du risque de confusion pour le consommateur.
DOMINIQUE GRÉMY
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