Pourquoi appelez-vous à ne pas signer la deuxième version du contrat Lactalis ?
Franck Guéhennec : Du 8 juillet au 27 septembre, une délégation de dix responsables de groupements, représentant 55 % à 60 % des producteurs Lactalis, a rencontré à plusieurs reprises l'industriel pour négocier sa première proposition de contrat. La nouvelle version demande encore à être discutée. Prenons l'exemple de la clause pénale.
En cas de rupture abusive, elle instaure une pénalité forfaitaire de 30 €/1 000 l appliquée sur le volume annuel. Pour Lactalis, ce montant est dérisoire. Pour un producteur, cela représente 10 % de son chiffre d'affaires annuel ! Le coeur du déséquilibre concerne surtout la clause de sauvegarde sur le prix du lait. En l'absence de recommandations du Cniel ou de valeurs diffusées par le Criel, le groupe mayennais calera son prix sur son environnement concurrentiel. Il ne donne pas la place aux négociations avec les producteurs. Or, c'est ce que nous réclamons. Nous ne voulons pas être de simples fournisseurs mais être considérés comme des véritables partenaires économiques.
Votre principal désaccord avec Lactalis porte finalement sur la reconnaissance des organisations de producteurs.
F. G. : Nous sommes fiers de la valeur ajoutée qu'apporte Lactalis à notre lait mais nous voulons avoir droit au chapitre. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Bien évidemment, nous ne déciderons pas à la place de l'entreprise. Notre objectif est de protéger le producteur des risques d'une relation directe. Le contrat individuel, tel qu'il est présenté dans la seconde version, ne lui donne aucune possibilité de négocier. Nous défendons donc le principe d'un contrat-cadre définissant les conditions générales de la relation commerciale. Il ferait l'objet d'une signature bipartite entre Lactalis et les représentants des organisations de producteurs (OP).
Les spécificités régionales pourraient être ensuite négociées en région. La démarche aboutirait à une convention d'application que le producteur signerait accompagnée des données de son exploitation.
Ce schéma n'aboutit donc pas à une signature tripartite.
F. G. : Le terme de signature tripartite a sans doute semé la confusion dans l'esprit d'éleveurs. Il s'agirait bien d'une signature de la convention d'application bipartite Lactalis-producteur. Si l'éleveur n'adhère pas à une OP, il bénéficiera malgré tout des discussions menées en amont. Ce projet a reçu une fin de non-recevoir de Lactalis. Malgré tous les signes de bonne volonté envoyés en novembre– engagement pour une OP non commerciale, OP composée uniquement de producteurs Lactalis, mandat de facturation de l'OP confié à Lactalis –, force est de constater que cela n'a pas abouti à son retour à la table des négociations. Sans doute a-t-il cherché à gagner du temps en vue de la date d'expiration de son offre le 1er décembre. Le 23 novembre, les représentants des groupements Lactalis ont donc saisi le médiateur des contrats et la Commission Cniel des pratiques contractuelles sur les clauses toxiques.
Pourquoi estimez-vous qu'une fois le contrat signé, il sera trop tard ?
F. G. : La proposition n'intègre pas une clause de basculement du contrat individuel vers un contrat-cadre négocié collectivement avec des OP non commerciales. Même si les groupements de producteurs sont reconnus OP par les pouvoirs publics après la parution du décret OP, le contrat signé ne permettra plus au producteur de bénéficier des discussions collectives. Il sera engagé individuellement face à l'entreprise, avec le risque d'un traitement différencié sur les volumes, pénalités, sanctions, etc., surtout après 2015. Signer ou pas aujourd'hui conditionne l'après-quotas. J'ajoute qu'il n'y a pas d'urgence. Le contrat tacite qui lie les éleveurs aujourd'hui à Lactalis est plus protecteur que la « V2 »
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