Fin mai, toujours pas de pluie sur la France. Excepté les microrégions arrosées par les orages, c'est tout le territoire qui subit une sécheresse exceptionnelle. Dans les zones les plus sensibles, les éleveurs sont déjà en situation de rupture fourragère et contraints de consommer les stocks de l'hiver. Une situation d'autant plus délicate que cette sécheresse fait suite à une année 2010 qui n'était pas favorable à la production fourragère, en particulier dans l'Ouest.
Et que dire des maïs à venir ? Les semis précoces ont connu une bonne levée et rien n'est perdu si la pluie revient. En revanche, les semis tardifs, derrière les dérobées, sont en mauvaise posture. Le drame des éleveurs laitiers serait de ne pas pouvoir se rattraper sur la prochaine récolte de maïs. Les conseils aux éleveurs(1) se multiplient pour tenter de compenser les pertes fourragères : ensilage de céréales immatures, substituts à la paille pour la litière, achat de coproduits, mise en place de dérobées d'été.
Quelle que soit la stratégie d'interculture, elle dépendra de la pluie estivale que personne n'est capable de prédire (voir p. 14) et des disponibilités en semences. Et comme dans toutes catastrophes, le business trouve sa place. Des éleveurs nous signalent des pressions de marchands d'aliments agitant le spectre de la pénurie ou d'une hausse colossale des prix. La spéculation est déjà enclenchée sur la prochaine récolte de paille. Un fourrage de qualité médiocre mais qui permettra d'assurer la ration hivernale des génisses. Les prix les plus fous ont circulé (100- 150 €/t). À sécheresse précoce, réactions précoces des politiques et des syndicats pour tenter d'organiser les échanges de paille entre céréaliers et éleveurs. Bruno Le Maire se contente de plaider la solidarité : « Que lescéréaliers fournissent de la paille aux éleveurs. » La Confédération demande l'interdiction du broyage. FNSEA et JA proposent un modèle de contrat de vente de paille en andains et pour éviter la spéculation, avancent un prix entre 20 et 25 €/t qui tient compte de l'exportation minérale et organique. Un prix qui ne paraîtra pas « raisonnable » à tout le monde. Dans la plaine de Caen par exemple, des céréaliers estiment à 35 €/t le juste prix.
95 euros la tonne livrée
Ailleurs, ce serait 40, 50 €/t, voire plus. « Interdire le broyage est une idiotie, argumente un céréalier de la Beauce. Qui achètera ma paille derrière une moissonneuse axiale ? Le problème n'est pas la disponibilité, mais la logistique à mettre en place pour le pressage et le transport. On a déjà connu ça en 2003. »
Des FDSEA, comme dans la Manche ou l'Aveyron, ont pris les choses en main. Les commandes sont enregistrées, les contacts avec les céréaliers établis et parfois même le pressage et le transport prévus. Dans la Manche, on attend environ 8 000 t en provenance de l'Eure à 95 €/t livrée. En cas de proximité avec des céréaliers, des échanges fumier-paille peuvent s'envisager. On parle aussi de la possibilité de valoriser les intercultures des céréaliers en leur proposant le semis et la semence.
DOMINIQUE GRÉMY
(1) L'Institut de l'élevage propose un dossier sécheresse complet sur www.inst-elevage.asso.fr
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