« JE FABRIQUE MOI-MÊME MON COMPLÉMENT AZOTÉ

Denis Tranchant devant les différents composants de la ration qu'il prépare.PHOTOS A.B.
Denis Tranchant devant les différents composants de la ration qu'il prépare.PHOTOS A.B. (©)

Pour sa ration de base comme pour sa complémentation azotée, le Gaec Le Vernay, à Hauteville-sur Fier (Haute-Savoie), n'utilise que des matières premières nobles.

DEPUIS 2010, LE GAEC LE VERNAY dans l'avant-pays savoyard a opté pour une ration sèche semi-complète à l'année, fondée sur la luzerne, avec fabrication du concentré azoté à la ferme. « Dans notre ancien système avec affouragement en vert l'été, nous avions un coût alimentaire trop élevé, explique Denis Tranchant, l'un des trois associés du Gaec. Le concentré arrivait à 100 €/1 000 l, ce qui correspond au niveau moyen des élevages du groupe lait CER de Haute-Savoie aujourd'hui. D'après notre dernier exercice comptable clos au 30 septembre dernier, nous sommes tombés à 72 €. Vous imaginez le gain sur 500 000 l ! » La ration de base des laitières est distribuée à la mélangeuse une fois par jour. L'hiver, elle se compose de 14 kg de foin (à 70 % de luzerne), de 10 kg de maïs épi ensilé(1) (55 % de MS), 1 kg de Levumel (composé pour moitié de levures de brasserie riches en azote soluble et pour moitié de mélasse de canne, ce liant liquide titre 20 % de MAT), 1 kg de complémentaire azoté (composé à la carte, il contient 40 % de soja, 30 % de colza et 30 % de drèches de brasserie et titre 38 % de MAT), et 150 g de minéral. D'une valeur de 0,85 UFL/ kg de MS et de 100 g de PDI, elle est équilibrée pour 22 à 24 kg de lait par vache et par jour. « Grâce à la mélangeuse qui permet de couper les brins de luzerne à 4-5 cm et à l'ajout du Levumel, la ration de base est entièrement consommée, se félicite Denis. L'hiver, dans les auges, on ne récupère que des pierres et des bouts de bois. L'épi de maïs, autorisé par le cahier des charges IGP du 15 octobre au 15 mai, s'associe idéalement à la luzerne que nous valorisons dès le mois de mai avec notre séchoir en grange équipé de capteurs solaires. Les première, troisième et quatrième coupes de luzerne, qui titrent de 19 à 23 % de MAT, sont réservées aux laitières. La deuxième coupe, moins riche en protéines, est donnée aux génisses. Le liant liquide aide à faire fonctionner la panse des vaches. Celle-ci est en effet soumise à rude épreuve avec les rations sèches savoyardes, riches en amidon mais insuffisantes en sucre. Les apports d'azote soluble et de sucre du Levumel aident à dégrader en énergie la cellulose de la ration. Un point important en absence d'urée dans nos tourteaux. »

« LE SOJA PASSE BIEN »

En choisissant de n'avoir que des matières premières nobles dans leur mélange de tourteaux (40 % soja, 30 % de colza et 30 % de drèches de brasserie), les éleveurs sont sûrs d'avoir toujours la même proportion de chaque ingrédient. « Ce qui n'est pas toujours le cas quand on achète un aliment complet, précise Denis. La composition de l'assemblage varie en fonction de l'intérêt technique des matières de base et du rapport qualité/prix de chacune d'elles. Nous tenons compte aussi de la teneur en acides aminés de chacun des tourteaux (méthionine, lysine, choline). Jusqu'au printemps 2012, le mélange était composé à 70 % de soja et 30 % de colza. Malgré un prix élevé cet été (600 €/t pour un soja non-OGM), nous n'avons pas souhaité réduire la proportion du soja en dessous de 40 %. C'est une matière première noble qui passe bien. L'éliminer serait prendre des risques. »

« NOUS AVONS TROUVÉ UN ASSEMBLAGE SATISFAISANT »

Par souci de simplification, le mélange composé à la carte est livré prêt à l'emploi par une coopérative locale.

La même attention est portée à la confection du concentré de production distribué au Dac. Celui-ci se compose de céréales produites sur l'exploitation (trois quarts de maïs et un quart d'orge), du tourteau 38 utilisé dans la ration de base, et d'un noyau cellulosique qui titre 18 % de MAT. Livré en granulés, cet aliment est fabriqué avec des coques de soja, du son, des drèches et du tourteau de tournesol selon une formule permanente. Pour couvrir les besoins des vaches en minéraux (calcium, phosphore et substances tampon), un mélange est fabriqué deux fois par an avec la bétonnière de l'exploitation. Il comprend du carbonate de calcium (30 %), du bicarbonate de sodium (60 %) et de l'oxyde de magnésium (10 %). « Il nous revient à 350 €/t contre 650 € dans le commerce. », note Denis. Stocké dans des big-bags, il est incorporé aux céréales dans l'aplatisseur en petites quantités (50 g de mélange pour 1 kg de céréales). Avec ce système, la proportion de carbonate de calcium consommé par les laitières suit la consommation de céréales et agit comme un aliment tampon, prévenant l'acidose des vaches laitières hautes productrices.

Les quantités et proportions de la complémentation donnée au Dac varient selon le statut des laitières (primipares ou multipares), leur niveau de production et leur stade de lactation. « La proportion du noyau cellulosique augmente fortement jusqu'au pic de lactation au détriment des céréales et des tourteaux. Elle décroît ensuite fortement alors que les céréales et les tourteaux montent en force. » Le niveau de la complémentation azotée est saisi vache par vache dans le logiciel de l'ordinateur par l'éleveur et le nutritionniste indépendant qui intervient dans l'élevage. Il est ajusté mois par mois en fonction du taux d'urée du lait communiqué par le Contrôle laitier (moins de 90 j de lactation, de 90 à 200 j, plus de 200 j). « On reprend également les trois résultats mensuels de l'analyse de tank fournis par la laiterie. En novembre, le TP était de 36 ! Un niveau qui témoigne du bon fonctionnement de la panse, de la couverture énergétique et azotée suffisante de la ration. Les sources de matières azotées semblent correspondre aux besoins de notre ration de base produite à partir d'aliments issus de l'exploitation. Nous avons trouvé un assemblage satisfaisant. Les résultats de réussite en IA (1,8 IA par IA fécondante) sont bons. La perte d'état des vaches en début de lactation n'empêche pas d'inséminer 60 à 80 j après vêlage. » Le suivi mensuel effectué par le nutritionniste, diplômé de l'École nationale vétérinaire de Toulouse, est très apprécié.

« Au cours de ses visites de 2 à 3 heures chacune, il suit la partie technique de la ration et le coût alimentaire du lait, explique Denis Tranchant. Son oeil extérieur est précieux car nous, éleveurs, avons vite fait de nous habituer aux choses qui ne vont pas. En valorisant les données objectives du troupeau et les conseils indépendants, nous restons maîtres de nos décisions. Et nous améliorons notre revenu. »

ANNE BRÉHIER

L'été, l'épi de maïs est remplacé par du maïs grain.

Les quantités et les proportions du concentré de production distribué au Dac varient selon le statut des laitières (primipares, multipares), leur niveau de production et leur stade de lactation.

L'utilisation de matières premières implique une installation pour la fabrication des aliments à la ferme, avec des cellules pour stocker les céréales et un aplatisseur. « À condition de passer au moins 20 t par an, un tel équipement est rapidement amorti », souligne Denis.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,4 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 7,21 €/kg net +0,06
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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