Un défi difficile à relever sans dégrader le résultat de l'exploitation

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Réduire les animaux improductifs en jouant à la fois sur le taux de renouvellement et sur l’âge au vêlage est l'un des leviers pour réduire son empreinte carbone. (©Terre-net Média)
Réduire les animaux improductifs en jouant à la fois sur le taux de renouvellement et sur l’âge au vêlage est l'un des leviers pour réduire son empreinte carbone. (©Terre-net Média)

Pour une exploitation typique du Pas-de-Calais, réussir à diminuer de 45 % ses émissions de CO2 dès 2030 comme le préconise le Giec, est un challenge qu’il sera difficile à relever. Si plusieurs leviers existent comme réduire les animaux improductifs, rechercher l’autonomie fourragère ou encore implanter des haies, ils permettent une réduction de l’empreinte carbone de l’ordre de 12 à 13 %. Bien loin de l’objectif fixé par le groupe d’experts climatiques.

« Dans un rapport, publié fin 2018, le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) insiste sur l'urgence de contenir la hausse des températures à 1,5°C. Pour atteindre cet objectif, un premier impératif : la diminution de 45 % des émissions de CO2 dès 2030 par rapport à 2010 », expliquent Nadège Viel, consultante agro-environnement chez Seenorest (alliance Optival - Oxygen) et Elisabeth Castellan, chef de projet environnement à l’Idele.

« Pour une exploitation typique du Pas-de-Calais, dont les résultats techniques sont dans la moyenne, le défi sera compliqué à relever », poursuivent-elles, exemple à l'appui. 

Pour l’exploitation moyenne du Pas-de-Calais (définie dans l’encadré ci-dessus), plusieurs leviers peuvent être mis en place en vue de réduire son empreinte carbone :

  • « Réduire les animaux improductifs en jouant à la fois sur le taux de renouvellement (objectif 30 %) et sur l’âge au vêlage (objectif de 24 mois) en cohérence avec le système en question. La conduite alimentaire des génisses correspond déjà à un vêlage précoce, un travail autour de la surveillance des chaleurs et la mise à la reproduction permettrait de réduire l’âge au vêlage. Le troupeau étant en rythme de croisière et sans problème sanitaire majeur, le taux de renouvellement peut être réduit à 30 %. L’éleveur peut faire le choix d’utiliser des semences sexées sur ces bonnes vaches et du croisement sur les autres.
  • Rechercher de l’autonomie par des fourrages de qualité. La réduction des effectifs génisses libère des surfaces en prairies à valoriser. Dans notre cas, l’herbe sera ensilée à destination des vaches laitières. De plus, 5 ha de prairies temporaires de luzerne (à la place du maïs) seront implantés pour distribuer 2 kg MS/VL/j. Les stades de récolte seront surveillés de près pour avoir des fourrages de qualité (fauche précoce et régulière).
  • Optimiser l’alimentation des vaches laitières tout en recherchant de la productivité animale. La ration initialement composée de pulpes de betterave et de maïs évolue avec 30 % d’ensilage herbe ou de luzerne. La complémentation en concentrés est adaptée avec une ration semi-complète, contenant du tourteau de colza à l’auge et au Dac tourteau tanné et VL18. Ces évolutions permettraient d’atteindre les 10 000 litres avec 200 g/litre de concentrés. Le suivi du troupeau, la gestion du tarissement et des démarrages de lactation restent essentiels pour atteindre ce niveau de production.
  • Réduire les engrais minéraux en valorisant les effluents de l’exploitation peut permettre de réduire de 20 unités l’engrais sur le maïs sans impacter le rendement (soit 35 t de fumier et 80 unités d’azote minéral). 
  • Augmenter le stockage du carbone par le biais du stockage des 5 ha de prairie temporaire et en implantant 1 km de haie ».

Une réduction de l’empreinte carbone possible mais pas suffisante

« La combinaison de l’ensemble des leviers permet de réduire l’empreinte carbone de 12 % (0,75 kg CO2/ litre de lait) par rapport à la situation initiale. Économiquement, cela représente un gain de 33 €/1 000 l. L’ensemble des optimisations mises en place sur cette exploitation permet d’aboutir à ce que l’on qualifie aujourd’hui de "ferme bas carbone".

Malheureusement, l’objectif de - 45 % fixé par le Giec pour contenir la hausse des températures à + 1,5 °C n’est pas atteint. Même en passant ce système type sur une base herbagère extensive, la réduction d’empreinte carbone attendue n’atteint que - 13 %, avec une perte de 19 €/1 000 l par rapport à la situation initiale (productivité moindre, sans plus-value économique si l’exploitation reste en agriculture conventionnelle) et une performance nourricière moindre.

Cela démontre que, pour les systèmes agricoles typiques du Pas-de-Calais, une optimisation seule ne suffira pas. Il est fortement probable que les exploitations agricoles de demain diffèreront de ce que nous connaissons : méthanisation, agroforesterie, autoconsommation d’énergie dans les exploitations, nouvelles techniques culturales, additifs alimentaires… pour réduire les émissions de méthane entérique ».

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