La ferme expérimentale bio de Thorigné-d’Anjou (Maine-et-Loire) a démontré que se passer de céréales et de minéraux permet des économies tout en simplifiant le travail, sans altérer les performances des animaux. Cette conduite économe passe toutefois par une période d’hivernage courte et par des prairies à flore variée riches en légumineuses.
« On peut se passer de matières premières mais aussi d’intrants tels que les minéraux, la simplification des stratégies alimentaires est vraiment possible ». C’est le constat formulé par le directeur de la ferme expérimentale de Thorigné-d’Anjou Julien Fortin, à l’issue des années d’essais pratiqués sur le site. Pour cela, il y a une clé, c’est le pâturage qui doit être au centre de la stratégie, et qui doit être associé à des fourrages de qualité. Cela passe aussi par un objectif de réduction de la phase hivernale. « Les animaux arrivent en bâtiment avec un bon état corporel, s’ils perdent un peu cela ne va pas perturber leurs performances laitières ».
La luzerne, une solution robuste
Ici, les vêlages sont en deux périodes. Pour les vaches qui vêlent à l’automne, qui ont donc des besoins énergétiques importants en phase hivernale, deux lots ont été conduits pendant trois ans sur des multipares avec un fourrage pivot constitué d’association de céréales et protéagineux (triticale – pois fourrager – vesce).
Le premier lot avait un fourrage complémentaire de Procer (plus de protéagineux que de céréales), le second avait de l’enrubannage de luzerne en 1ère et 2ème coupe comme fourrage complémentaire, ce qui donnait une très bonne valeur protéique.
Les résultats pour ce second lot sont plutôt bons, les vaches ont pris du poids, les besoins ont été satisfaits. « C’est une solution robuste qui amène de la solidité au système », commente Julien Fortin. En revanche, sur le premier lot (Procer), il y a eu beaucoup de refus, en raison des brins trop longs plus difficilement ingérables. Ce mélange était enrubanné, « peut-être que ça aurait été différent avec de l’ensilage ».
Les animaux ici ont perdu significativement du poids. Ils ont toutefois réussi à compenser cette perte hivernale lors de la période de pâturage qui a suivi. Les vaches ont également produit un litre de lait de moins que le lot luzerne, ce qui a eu « de gros effets sur la croissance des veaux », remarque Jean-Paul Coutard, ingénieur et ancien responsable de la ferme. L’écart de croissance s’établit à 96 grammes par jour entre les deux lots. Au sevrage, les veaux du lot Procer pesaient 16 kg de moins que ceux du lot luzerne.
Pas de différence pour les animaux sans minéraux
Pour les vaches dites de printemps (vêlages fin février), il s’agissait de vérifier s’il était possible de se passer de complémentation minérale sur les vaches gestantes. Les essais, là aussi conduits sur trois ans, ont donné des résultats intéressants : les performances zootechniques n’ont pas été altérées. Ces animaux ont des besoins énergétiques relativement modérés, bien inférieurs à ceux des vaches d’automne.
Pour ces essais, deux lots étaient constitués pendant trois hivers avec une ration commune de foin (de qualité modeste, pauvre en azote) et féverole. Le premier lot n’avait pas de compléments minéraux, le second en avait. Aucune différence n’a donc été constatée sur les performances zootechniques entre les deux lots : pas d’effet de régime sur les performances autour du vêlage (conditions et poids de naissance, mortalité), pas d’impact de la ration sur la qualité du colostrum, aucune différence sur les performances des vaches et pas d’effet non plus sur le gain moyen quotidien (GMQ) des veaux. « Cela s’explique par l’effet pâturage, les veaux sont mis à l’herbe sans complémentation », analyse Julien Fortin.
Cet essai sur les vaches de printemps démontre qu’il est totalement possible, sous conditions, de se passer de complémentation minérale. « Il faut bien avoir en tête que c’est suite à une période de pâturage, pendant une courte durée hivernale d’environ 80 jours et avec une ration de base légèrement déficitaire », précise Jean-Paul Coutard.
Cette absence de complémentation minérale est donc une solution qui permet de simplifier le travail d’une part et de supprimer l’apport de concentré fermier généralement nécessaire pour faire consommer le minéral.
Cela permet aussi de réaliser potentiellement quelques économies. Les essais conduits ont montré un écart lié au prix du minéral et de la féverole. Cela représente au total 1 160 € pour l’ensemble des 25 vaches en hiver.
Période d’hivernage courte et prairies de qualité
Se passer de minéraux est « vraiment une piste à creuser pour ceux qui ont des durées d’hivernage courtes », insiste Julien Fortin. Les animaux arrivent en bâtiment avec une bonne note d’état corporel, s’ils perdent un peu sur ce plan, cela ne perturbera pas leurs performances ensuite. Et ce qui conditionne ce bon état, c’est la qualité du pâturage. Ce sont les prairies à flore variée, riches en légumineuses, qui permettent de se passer de minéraux.
Par ailleurs, les deux périodes de vêlages ici n’ont rien d’anodin. Elles sont complémentaires, permettent d’avoir des animaux en état et des durées d’hivernage courtes. « En mettant la prairie au centre du système, il est possible d’avoir un élevage de ruminants qui ne mangent que du fourrage, au service de l’agronomie », met en avant le responsable de la ferme expérimentale.
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