La vache brahmane, icône rustique des élevages de Martinique et égérie du Sia

Sur les 15 000 bovins en Martinique, la majorité sont de la race brahmane.
Sur les 15 000 bovins en Martinique, la majorité sont de la race brahmane. (©Sia 2026)

Originaire de la Martinique, Biguine est une vache brahmane, race frugale aux racines indiennes, devenue emblématique de l'île. Elle sera la vache égérie du salon de l'agriculture, une première pour un bovin d'outre-mer.

Sur la presqu'île de la Caravelle, cernée par les flots agités de l'océan Atlantique dans l'est de la Martinique, l'exploitation bovine du Galion est nichée à l'écart de la départementale qui serpente entre le centre-bourg de La Trinité et le hameau touristique de Tartane.

Au creux de ce vallon, fleuri en cette fin de saison pluvieuse, l'exploitation s'étend sur 120 hectares. A l'appel d'ouvriers agricoles, un troupeau de vaches au corps svelte quitte le pré et se laisse mener vers un enclos entouré de buissons de bougainvillées.

« Regardez comme elles sont belles », s'enthousiasme André Prosper, le directeur de cette ferme de 300 têtes de bétail. L'éleveur de 60 ans observe les « longues oreilles » de ses vaches et leurs « grands yeux entourés de fard ».

Avec leur démarche altière, leur pelage gris clair, leur bosse dorsale et leurs longues cornes, ces bovins ressemblent davantage à des vaches sacrées d'Inde, leurs lointaines cousines, qu'aux bestiaux typiques des fermes européennes : ce sont des brahmanes, une race bovine créée aux États-Unis au XIXe siècle à partir de croisements de zébus indiens et d'animaux bouchers.

Importée en Martinique au début des années 1950, cette variété rustique s'est rapidement imposée dans les élevages bovins de l'île. « Cette race est bien spécifique à la Martinique : on l'utilise surtout pour sa résilience et sa rusticité », résume M. Prosper.

En raison de ces facultés d'adaptation à ce territoire tropical, « on parle même de 4x4 des savanes », plaisante le directeur d'exploitation.

Le Salon international de l'agriculture a désigné mercredi une vache issue du troupeau d'André Prosper comme égérie de la prochaine édition (21 février-1er mars 2026) au Parc des expositions de Paris.

Biguine, la vache choisie, est née en 2019 dans l'exploitation du Galion. Une sélection « inédite », précise le Salon, qui met pour la première fois à l'honneur un animal issu des territoires ultramarins, à travers cette race faisant la « fierté des élevages martiniquais et guyanais ».

Montrer « ce que les ultramarins savent faire » 

« Représentante du patrimoine agricole ultramarin », Biguine sera accompagnée Porte de Versailles de quatre autres vaches de l'élevage d'André Prosper et montrera aux visiteurs « toute la richesse et la diversité des productions des territoires d'Outre-mer », selon le SIA.

« C'est vraiment un sentiment de fierté, puisque quand on voit le travail réalisé depuis les années 1950, le résultat est là aujourd'hui : nous avons fixé une race », se réjouit André Prosper, qui s'enorgueillit de pouvoir montrer « ce que la Martinique, ce que les Ultramarins sont capables de faire ».

La brahmane a pu s'épanouir en Martinique grâce à une particularité : au niveau du cou, sa peau forme un « fanon », « chargé en glandes sudoripares » qui lui permet de supporter facilement la chaleur, explique l'agriculteur, vice-président de l'Union des éleveurs bovins brahman de Martinique (UEBB) et président de la Coopérative des éleveurs martiniquais (CODEM).

Le cheptel total de la Martinique, estimé à 15 000 animaux, est très majoritairement constitué de brahmanes.

Avec cette race d'une grande frugalité, les éleveurs martiniquais parviennent à produire « de la viande avec très peu d'intrants » : juste « de l'herbe et de l'eau », poursuit M. Prosper. La filière produit 400 tonnes par an, soit 12 % de la consommation locale.

Les animaux destinés à la boucherie sont généralement issus du croisement entre « une mère brahmane et un taureau européen », précise Sandrine Hayot, gérante d'une exploitation de 80 vaches brahmanes dans la commune du François (est) et présidente de l'UEBB.

Ces croisements permettent d'améliorer les qualités bouchères de la viande, « mais avec une rusticité qui permet de ne pas avoir des coûts d'élevage trop élevés », poursuit-elle.

Fort d'une quinzaine de membres, l'UEBB veille principalement « à ce que la diversité génétique des troupeaux reste importante ». Car depuis 1992, l'Union européenne n'autorise plus l'importation d'animaux vivants : une contrainte de taille, les élevages de Martinique et de Guyane concentrant 98 % du cheptel européen de brahmanes.

Cependant, les éleveurs martiniquais sont optimistes. « Y compris en métropole, l'évolution climatique fait que les éleveurs se tournent vers des races plus rustiques », constate Sandrine Hayot, qui espère que la présence de Biguine au Salon de l'agriculture « va déclencher l'intérêt de beaucoup d'éleveurs ».

 

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