« L' AUDIT QUALITÉ DU LAIT A PERMIS D'ÉVITER L'ARRÊT DE LA COLLECTE »

De gauche à droite : Nicolas le salarié, Agnès, Armand et Jean Dufour, les trois associés.PHOTOS : © A.B.
De gauche à droite : Nicolas le salarié, Agnès, Armand et Jean Dufour, les trois associés.PHOTOS : © A.B. (©)

Confronté à une hausse des cellules et à une fl ambée de mammites cliniques, le Gaec de La Boulaye en Saône-et-Loire a revu un certain nombre de ses pratiques. Alors que la nouvelle réglementation des “laits hors normes” s'est durcie, il fallait réagir vite.

DANS DE NOMBREUSES RÉGIONS, L'ÉVOLUTION CELLULAIRE des troupeaux et des mammites cliniques constituent une préoccupation majeure. Le Cniel (Centre national interprofessionnel de l'économie laitière) et l'Institut de l'élevage ont d'ailleurs engagé une vaste étude pour faire un état des lieux, et définir de nouvelles méthodes d'approche en élevage. Alors que les premières observations officielles de ce travail ne seront communiquées qu'à l'automne, la situation sur le terrain incite à la vigilance. En Côte-d'Or, département dans la moyenne au regard des premiers retours de l'étude nationale, la situation était de 18 % des élevages « à améliorer d'urgence » en fin de campagne 2011-2012. En effet, certains troupeaux affichaient alors des niveaux cellulaires moyens de 700 000 à 800 000. « Quand on dérape, observe Jean-François Dessolin, de Conseil élevage Côte-d'Or, on dérape fort ! » Même si en cette fin d'hiver, la situation s'améliore sans que l'on soit capable d'en cerner exactement les raisons, l'impact de la réglementation des laits hors normes, en vigueur depuis le 1er janvier 2012, amène les organisations d'élevage à se mobiliser. C'est le cas dans la Saône-et-Loire et l'Ain où une équipe de techniciens suit une centaine d'élevages, dont le Gaec de la Boulaye.

Comme tous les rares élevages laitiers de l'ouest de la Saône-et-Loire, une région spécialisée en élevage allaitant, celui du Gaec de la Boulaye dispose d'une belle structure : une centaine de vaches depuis 2000 pour un quota de 700 000 l. Ce dernier n'est plus atteint aujourd'hui à cause des problèmes sanitaires rencontrés sur le troupeau. « En 2012, 150 mammites ont été dénombrées sur nos 100 montbéliardes, explique Jean Dufour, l'un des trois associés du Gaec, responsable du troupeau laitier. Dans l'élevage, nous avons toujours eu un fond de mammites cliniques, mais nous arrivions à les guérir. L'an passé, la situation s'est dégradée fortement. Les traitements antibiotiques ne faisaient plus d'effet. Parallèlement, les concentrations cellulaires moyennes augmentaient, passant de 250 000 cellules par millilitre à 500 000. »

« 125 ANALYSES POUR IDENTIFIER LES BACTÉRIES EN CAUSE »

Par ailleurs, les analyses effectuées par la laiterie qui travaille en lait cru révélaient des comptages de staphylocoques élevés. « Plus de 500 à certains moments. » Avec la nouvelle réglementation concernant le lait hors normes, une menace d'arrêt de collecte pesait sur l'élevage. En mai 2012, un suivi qualité de lait a alors été engagé avec la chambre d'agriculture de Saône-et-Loire. Dans le cadre d'une étude menée par le pôle laitier bourguignon avec l'Institut de l'élevage, 125 analyses ont été réalisées pour identifier les bactéries en cause. Les prélèvements ont été effectués sur les quatre quartiers de vingt-cinq laitières sélectionnées pour leur profil cellulaire ainsi que sur les cinq vaches ayant eu des mammites cliniques récentes. Les résultats ont montré que deux tiers des infections étaient dus à des staphylocoques (mammites de contagion) et qu'un tiers était causé par des streptocoques Uberis (mammites d'environnement). Cela recoupait ainsi les résultats des analyses réalisées par la laiterie et confirmait la présence de deux sources de contamination dans l'élevage : les animaux infectés en salle de traite et la litière.

« L'HYGIÈNE DE TRAITE A ÉTÉ ENTIÈREMENT REVUE »

Abrités sous une stabulation à aire paillée et aire d'exercice sur caillebotis, les vaches disposaient jusqu'en octobre dernier, d'une surface de couchage insuffisante : 5 m2 par laitière. Alors que les laitières pâturent deux mois et demi au printemps sur 14 ha (les silos ne sont jamais fermés), l'été, période où les prairies en raygrass et trèfle ne poussent plus, elles disposaient d'un parcours de 2 ha dont la couverture végétale disparaissait avec la concentration des animaux et favorisait les contaminations des mamelles. Pour assurer un couvert végétal digne de ce nom, il aurait fallu au moins 10 ares/VL, soit 10 ha pour un cheptel de 100 animaux. Avec l'agrandissement de l'aire paillée de 150 m2, le troupeau dont l'effectif a été réduit d'une dizaine de vaches (95 en début d'hiver, 85 mi-mars) dispose désormais d'une surface totale de 650 m2 (soit 7,6 m2/VL). Curée toutes les trois semaines au lieu d'une fois par mois, l'aire de couchage des animaux est paillée à raison de 1 kg/m2/ jour, contre 1,4 kg précédemment. Moins serrées, les vaches sont plus propres et la litière chauffe beaucoup moins. En salle de traite, où officie toute la semaine et deux fois par jour Nicolas, le salarié de l'exploitation, l'hygiène de traite a entièrement été revue depuis mai dernier. La laine de bois utilisée auparavant systématiquement n'est plus employée que pour nettoyer les trayons les plus sales. Le protocole en place désormais se compose d'un prétrempage des trayons sur tous les animaux, d'un essuyage à l'aide d'un papier jetable et d'un post-trempage. La détection des mammites a été améliorée. « Nous faisons les premiers jets sur tous les animaux, souligne Jean, alors que nous ne les tirions que partiellement sur quelques vaches hautes en cellules, ce qui pénalisait les détections précoces. » Les soins notés jour après jour sur un agenda par Nicolas sont reportés par Jean sur le carnet sanitaire. Une douzaine de vaches ont été réformées : les laitières hautes en cellules depuis au moins deux lactations et les vaches à mammites récidivantes. Il reste encore neuf incurables à réformer rapidement ainsi que dix taries à surveiller après leur vêlage.

« LA FRÉQUENCE DES MAMMITES A ÉTÉ DIVISÉE PAR DEUX »

Ces mesures ont porté leurs fruits. Après être monté à 693 000 cellules/ml en juin 2012, le taux cellulaire mensuel est tombé à 205 000 en décembre 2012, 270 000 en janvier 2013 et 196 000 en février dernier. La fréquence des mammites a été divisée par deux en un an. Les récidives sont moins nombreuses. Les mammites graves sont traitées avec les mêmes antibiotiques qu'autrefois « mais nous parvenons mieux à les guérir. En revanche, si l'animal récidive, il est réformé immédiatement ». Deux cures avec des produits à base de plantes, distribués sous forme de granulés dans l'alimentation, ont également été effectuées en début d'hiver à un mois d'intervalle. Jean estime qu'elles ont contribué à réduire la moyenne cellulaire en renforçant l'immunité des animaux. Depuis décembre, l'éleveur recourt également à la phytothérapie pour traiter les mammites peu graves détectées précocement. « Le produit est injecté dans la mamelle. Sur la dizaine de vaches traitées, nous n'avons pas eu de récidive. L'avantage, c'est qu'il n'y a pas de délai d'attente sur le lait. » Les méthodes de tarissement (antibiotique intramammaire) n'ont pas été modifiées car les taux de guérison étaient bons. Ce printemps, les vaches bénéficieront de 10 ha supplémentaires pour la mise à l'herbe.Avec le semis de ces nouvelles prairies, la surface à pâturer s'élèvera à 24 ha. Outre son intérêt économique, la démarche limitera l'accès au parcours extérieur de 2 ha et devrait donc avoir un impact positif sur la santé des mamelles. Jusqu'à présent, les éleveurs ne portaient pas une attention particulière aux index fonctionnels des taureaux retenus pour les inséminations. « Nous nous intéressions en priorité aux taux, à la quantité de lait, à la morphologie, à la vitesse de traite, aux mamelles et au tempérament, explique Jean. Depuis trois ans, le programme informatique d'accouplement de la coopérative d'IA intègre automatiquement ces paramètres. Des taureaux négatifs en cellules ne sont pas retenus sur des vaches laitières hautes en cellules. » Un nouveau point sera réalisé dans le troupeau à l'automne pour mesurer l'impact des dernières mesures mises en place.

ANNE BRÉHIER

150 m2 de plus pour l'aire paillée L'aire paillée a été agrandie de 150 m2 pour atteindre 650 m2 où sont aujourd'hui menées 95 laitières en début d'hiver. Elle est aussi curée plus fréquemment : toutes les trois semaines au lieu d'une fois par mois. Le plan de réforme a aussi été ajusté. Une douzaine « d'incurables » a été réformée. Neuf autres le seront prochainement.

Premiers jets pour toutes les vaches Parallèlement à l'hygiène de traite, les éleveurs ont amélioré la détection des mammites. Les premiers jets sont désormais tirés sur tous les animaux.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

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