
Passionné de production laitière, Cédric Landrein s’est reconverti dans l’élevage de génisses pour être capable de faire face à la charge de travail au moment du départ à la retraite de ses parents. L’activité est encadrée par un groupement et une société de conseil.
Quand il s’installe aux côtés de ses parents en 2010, Cédric Landrein est un mordu de production laitière. Il a passé une année en Nouvelle-Zélande à traire des vaches au moins sept heures par jour, et il a adoré ça. Et puis, après l’installation, ses enfants sont arrivés. Et ses parents ont commencé à préparer leur retraite : une échéance en 2019 pour son père, 2021 pour sa mère. « Cela me faisait peur en matière de travail. Je ne voulais pas dépendre au quotidien de leurs coups de main après la retraite. Il fallait anticiper pour que mon système soit prêt au moment de leur départ. La crise du lait en 2016 m’a également fait réfléchir.»
Le second atelier de l’exploitation à l’époque, trois poulaillers de Loué, plaît aussi au jeune homme. En parallèle, il se renseigne sur le fonctionnement du Groupement des éleveurs spécialisés de la Sarthe (GESS) comptant une dizaine d’éleveurs de génisses laitières. «J’y voyais pas mal d’avantages : la possibilité de valoriser mes bâtiments et mes prairies, et la libération de l’astreinte de la traite et des vêlages, tout en restant dans la filière laitière en proximité avec les producteurs. »
Cédric Landrein se porte alors candidat pour une place au GESS. En attendant, il investit en 2017 dans deux poulaillers de Loué supplémentaires, avec l’objectif de créer un poste de salarié pour sécuriser la force de travail de son exploitation. L’année 2019 est celle de la transition avec le recrutement du salarié à plein temps, la diminution progressive de la production de 500 000 litres de lait, et l’arrivée des premiers lots de génisses. «J’ai fait la dernière traite en décembre. La salle de traite était très ancienne, elle aurait dû être remplacée si j’avais continué. Elle est partie pour rien chez un jeune éleveur. »
« Une tournée de 600 km pour récupérer les génisses »
Excepté un vide sanitaire, Cédric n’a pas réellement de travaux d’adaptation à prévoir dans ses bâtiments. La nurserie est divisée en quatre cases paillées pour l’accueil des lots de 25 génisses. Elles sont ensuite transférées dans un bâtiment contigu de post-sevrage où elles sont divisées en deux lots selon leur poids ; puis dans l’ancien bâtiment des vaches laitières où elles sont réparties dans sept box en fonction de leur croissance. « Les logettes sont un peu larges donc elles se couchent dans tous les sens, mais ça ne pose pas vraiment de problème. »
En ce mois de février 2023, le dix-huitième lot de génisses qui seront élevées sur l’exploitation est en cours de constitution. Elles sont nées dans douze exploitations différentes de la Sarthe. « Le GESS coordonne la création de mes lots de 25 animaux, explique Cédric Landrein. Cette capacité a été calculée selon la taille de ma nurserie et de mon bâtiment de post-sevrage. Une fois la liste prête, j’organise ma tournée pour aller chercher les génisses. Je fais trois voyages avec une moutonnière de neuf places, soit environ 600 kilomètres sur tout le département. »
Les génisses sont âgées de 14 à 35 jours. Elles sont vaccinées (RS + PI3), testées à la BVD et pesées. En fonction de leur poids, le prix d’achat est fixé entre 130 et 230 euros. « Il y a un effet important de l’élevage d’origine, observe Cédric. Les génisses en tête de lot au début y restent jusqu’à la fin de leur croissance. C’est pourquoi le GESS a fait un travail d’accompagnement des naisseurs visant à maximiser la croissance avant le départ des veaux. Ils sont en meilleure santé, ce qui est positif pour les futures laitières, et le naisseur peut toucher jusqu’à 100 euros de plus quand il nous vend sa génisse. »
« Nous avons l’obligation de les faire pâturer »
En fonction de leur poids, les 25 petites génisses sont divisées en quatre cases paillées dans la nurserie. Elles sont nourries avec un aliment d’allaitement pendant environ six semaines, et un aliment en granulés à volonté. L’éleveur augmente progressivement les quantités en fonction des besoins, en pesant précisément ce qu’il apporte chaque matin. À partir de deux kilos d’aliment en moyenne par génisse, il réduit progressivement le volume de lait sur deux semaines, dans l’objectif de sevrer les animaux à 2,5 kg d’aliment. Entre les quatre cases, la date de sevrage peut différer jusqu’à trois semaines.
Au post-sevrage, Cédric introduit l’ensilage de maïs vers l’âge de quatre mois, ainsi que du tourteau de colza, de la paille de fétuque et un minéral. À l’âge de six mois, c’est au tour de l’ensilage d’herbe d’entrer dans la ration, dans l’objectif d’arrêter les apports d’aliment. « Au sevrage, la ration doit être très concentrée en énergie et protéines pour atteindre un GMQ de 1 100-1 200 g à l’aide de 3,5 kg d’aliment par jour environ. Et à six mois passés, on déconcentre progressivement en introduisant l’ensilage d’herbe, puis l’enrubannage. La difficulté de l’herbe est que sa qualité est très aléatoire. Je fais donc des analyses pour piloter la complémentation en colza. Les éleveurs du GESS utilisent une alimentation sans OGM et donc sans soja car certains producteurs sont engagés dans ces filières chez Bel ou LSDH. Nous avons également l’obligation de les faire pâturer : en ce qui me concerne, elles vont à l’herbe quand elles sont confirmées pleines. »
« Le travail du week-end est assez rapide »
À l’arrêt de l’aliment, les génisses sont transférées dans l’ancien bâtiment dédié aux vaches laitières. Il est organisé en sept cases. Quatre rations différentes sont fabriquées à la mélangeuse pour les différents stades de croissance, en pesant chaque ingrédient. La distribution n’est faite que trois après-midi par semaine (lundi, mercredi, vendredi). « Mon salarié s’occupe de la préparation et la distribution des rations. De mon côté, je gère chaque matin l’alimentation des veaux en nurserie et post-sevrage, avant de préparer mes enfants pour l’école. C’est toujours mon père qui nettoie les matelas des logettes, avant le raclage automatique des couloirs. Dans la journée, il faut aussi s’occuper des cinq poulaillers. Je vois toutes les génisses au moins une fois par jour et je repousse les fourrages, mais sans horaire fixe, cela dépend des jours. Le travail du week-end est assez rapide. Dès que les veaux sont à 1,7 kg d’aliment par jour, ils n’ont plus que six buvées de lait par semaine. »
En dehors du travail d’astreinte, une demi-journée par mois est consacrée à la pesée de l’ensemble des animaux pour un suivi précis de leur croissance. L’insémination des animaux en dépend. Un collier pour la détection des chaleurs est installé à partir du poids de 370 kg, dans l’objectif d’inséminer quand la génisse atteint 400 kg. Cela peut être le cas dès l’âge de 11,5 mois pour les têtes de lot et s’étaler jusqu’à 15 mois. « Nous obtenons de bons taux de réussite à l’IA et l’âge moyen au premier vêlage est de 23 mois sur les derniers lots. Les génisses retournent dans leur élevage de naissance entre 40 et 80 jours avant vêlage. Elles doivent alors avoir atteint le poids de 550 kg sous peine d’une pénalité minimale de 100 euros ; ce qui ne m’est arrivé qu’une seule fois jusqu’à présent. Un transporteur spécialisé avec un chauffeur très attentif aux animaux, est informé des vêlages des trois prochains mois et organise la tournée de ramassage et de dépôt chez les naisseurs. »
Cédric Landrein trouve son compte dans cette nouvelle activité d’éleveur de génisses qu’il exerce depuis quatre ans. « La traite ne me manque pas. J’aime beaucoup le côté relationnel entre éleveurs de génisses du GESS et avec les naisseurs. Je n’ai pas de surprise liée aux vêlages ou à des problèmes sanitaires, je vois peu le vétérinaire. Et j’ai davantage de lisibilité et de stabilité du point de vue économique. »


« J’ai opté pour un système très simple car c’est rentable »
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