Les bons gestes pour réduire les antiparasitaires

Vaches laitières au pâturage
Avec de bonnes pratiques de pâturage, on peut réduire la fréquence des traitements antiparasitaires et le nombre d'animaux à traiter. (©Terre-net Média)

Comme pour les antibiotiques, les antiparasitaires, c’est pas automatique. Pour préserver leur efficacité et réduire leur impact environnemental, la lutte contre les strongles digestifs doit passer par une vermifugation sélective.

« Les strongles digestifs sont présents partout dans les pâtures, a rappelé Nadine Ravinet, enseignante-chercheuse à Oniris, lors d’une conférence organisée par les GTV des Pays de la Loire et le laboratoire Ceva. Les ruminants ingèrent des larves qui évoluent dans le tube digestif et pondent des œufs, qui sont relargués via les bouses, ce qui recontamine la prairie ». Une infestation par des strongles porte préjudice à la santé et aux performances zootechniques des ruminants. Pour contenir ce risque, il existe des traitements antiparasitaires, ou anthelmintiques, mais pour rappel : le troisième programme Écoantibio les a intégrés à la liste des traitements pour lesquels les pratiques doivent évoluer.

En effet, un usage raisonné est nécessaire pour préserver leur efficacité face aux parasites résistants. « La résistance est un phénomène naturel. Il y a toujours un faible pourcentage de parasites qui ne sont pas affectés par les molécules anthelmintiques, explique Nadine Ravinet. Un traitement ne laisse vivants que ces parasites qui vont se reproduire. En cas de traitement régulier, la proportion de ces parasites résistants va augmenter jusqu’à faire perdre de l’efficacité au vermifuge. » Des signaux inquiétants quant à la montée des résistances apparaissent. « Une enquête dans le Cantal a montré que 100 % des lots de génisses portaient des parasites résistants », souligne la chercheuse.

Diminuer les traitements pour limiter les résistances

Limiter la pression de sélection, en diminuant la fréquence de traitement et le nombre d’animaux traités, permet de garder une population refuge non-résistante. « S’il reste une population refuge suffisante, les parasites résistants vont pouvoir se reproduire avec des individus qui ne le sont pas, ce qui donnera des descendants sensibles aux traitements. Déjà réduire de 20 % le nombre d’animaux traités c’est efficace », encourage Nadine Ravinet.

Les traitements ont aussi un impact environnemental, du fait de rejet de matières actives via les déjections. Ces molécules vont perturber la vie du sol et les insectes coprophages, nécessaires à la dégradation des bouses. « Les traitements par application cutanée entraînent un fort relargage par voie fécale, de molécules qui gardent leurs propriétés insecticides, explique William Perrin, chercheur écologie des sols anthropisés à l'Université de Montpellier. Le taux de mortalité des larves de bousiers est multiplié par 7 après le pâturage par un troupeau. »

« Dans toute leur vie, mes génisses ne reçoivent qu’un seul anti-parasitaire »

Installé avec son épouse à Parné-sur-Roc (Mayenne), Antoine Pannard est passé en bio depuis 2020. Le jeune éleveur fait de plus en plus pâturer ses laitières. « Le pâturage a plein d’avantages, estime Antoine Pannard, mais il a un inconvénient : il faut faire attention au parasitisme. »

Pour qu’elles développent une immunité face aux strongles, Antoine Pannard sort ses génisses dès leurs 6 mois. « Elles vont passer dans des parcelles qui ont déjà été pâturées par les vaches », explique l’éleveur. Il suit le niveau d’infestation par des coproscopies sur les génisses, celles qui ont une croissance plus faible, celles qui sont sorties en dernier et fait des analyses de sang (pepsinogènes) à l’entrée en bâtiment « Ça me permet de ne traiter que les génisses atteintes, souligne-t-il. En moyenne, les génisses n’ont besoin que d'un traitement sur toute leur vie. Une fois adultes, il n’y en a plus besoin ».

Diminuer la pression en parasites

Les pratiques de traitements anti-parasitaires doivent évoluer pour préserver la santé des cheptels, tout en pérennisant l’efficacité des traitements et en réduisant leur impact sur les écosystèmes. « Ce qui demande d’avoir une utilisation raisonnée et non pas systématique, encourage Nadine Ravinet. Selon ses contraintes, les conditions climatiques de l’année, chaque éleveur doit trouver le juste équilibre entre traitement systématique et absence de traitement, qui pénaliserait les animaux fortement infestés. »

Pour une immunité pérenne et durable, il faut 8 mois de contact.

Il faut avoir en tête que les bovins peuvent acquérir une immunité par un contact modéré et régulier avec des strongles. « Pour une immunité pérenne et durable, il faut 8 mois de contact », précise Vincent Legoupil, vétérinaire dans la Manche. Pour des génisses, cette immunité peut s’acquérir en passant dans des prairies, déjà pâturées par des vaches. « Les animaux immunisés ingèrent des strongles sans rejeter d’œufs, donc la pression parasitaire diminue pour les jeunes animaux », détaille Vincent Legoupil.

Comme la rotation selon le niveau d’immunité, d’autres leviers aident à diminuer le risque, par exemple réduire le taux de chargement, faire pâturer différentes espèces. Pour une bonne gestion du risque, il faut garder un œil sur la météo : un temps chaud et humide accélère le cycle, alors que des conditions froides ou sèches limitent les risques. À plus long terme, il pourrait être intéressant de développer une immunité innée par sélection génétique.

Des traitements sélectifs

Pour pérenniser leur efficacité, les traitements anti-parasitaires doivent être ciblés sur les animaux à besoins, les génisses dont la croissance est inférieure à la moyenne, des vaches au pic de lait décevant. « 20 % des animaux hébergent 80 % des parasites », rappelle Vincent Legoupil. Le choix peut être fait en s’appuyant sur des coproscopies ou des outils de prédiction des risques, comme www.jefaisletri.com.

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