J. Chatoux, éleveur (23), combine méthanisation et photovoltaïque

En s’appuyant sur les dernières technologies, notamment en matière de production d’énergie renouvelable, Jouany et ses associés ont su développer un modèle d'élevage porteur en zone de montagne, axé sur une démarche globale d’économie circulaire.

La ferme des Nautaus, pilotée par Jouany Chatoux et ses deux associés depuis 20 ans, est située dans la partie creusoise du plateau de Millevaches, sur les contreforts du Massif-Central. Culminant à 950 mètres d’altitude, ce territoire rude et isolé de la montagne limousine a vu disparaître bon nombre d’agriculteurs en deux siècles, au profit de l’agriculture de plaine plus productive. Jouany fait partie de ceux qui ont choisi de redynamiser cette zone de montagne, en s’appuyant sur un modèle biologique extensif pour son exploitation de polyculture-élevage.

Tous les déchets végétaux et tous les fumiers sont valorisés

Jouany le reconnaît, sa motivation était avant tout environnementale. Première étape : le passage en AB, il y a 15 ans, ouvrant très vite à une réflexion plus large autour de l’économie circulaire appliquée à sa ferme. Petit à petit, un projet de production d’énergie renouvelable, associant méthanisation et photovoltaïque, fait son chemin. « Chez nous, rien ne se perd, tout se transforme. Grâce au méthaniseur, on valorise tous nos déchets végétaux et aussi nos fumiers », sourit-il.

L’unité de méthanisation de la ferme des Nautas est sortie de terre en 2016. Elle permet de valoriser les déchets végétaux et les fumiers en énergie, électricité et chaleur. « Notre objectif de départ n'était pas de vendre de l'électricité mais plutôt de favoriser la création de nouvelles activités, la diversification et l'amélioration agronomique de nos fermes. », souligne Jouany. Car valoriser les effluents c’est bien, mais le faire en produisant en plus de l’énergie c’est encore mieux, surtout dans cette zone de montagne où les conditions d’humidité ne permettent pas toujours de sécher les récoltes.

Aujourd’hui, un séchoir, alimenté par le méthaniseur permet de sécher luzerne et blé noir dont les dates de récoltes sont tardives en altitude. Par ailleurs, Jouany reconnaît qu’outre la production de biogaz, la méthanisation présente des avantages par rapport au fumier : pas de nuisances olfactives pour le digestat et une meilleure assimilation par les plantes des matières fertilisantes qui sont directement épandables sur ces terres, car minéralisées.

Une production de 100 kWé

Le process de l’unité de méthanisation, dite voie sèche discontinue, est spécifique. La matière sèche est rentrée dans quatre garages de 200 tonnes de capacité chacun qui restent fermés pendant 40 jours et est arrosée d’eau de pluie pour maintenir un taux de matière sèche de 20 %. Tous les 9 à 10 jours, l’un des garages est vidé et réalimenté pour un nouveau cycle.

Avant incorporation dans les digesteurs, la matière est préparée durant 3 à 5 jours, et brassée avec un retourneur d’andains pour homogénéiser les intrants et activer la pré-fermentation aérobie et la montée en température. En fin de cycle, le digestat est stocké dans une fumière couverte avant épandage au moment opportun.

Méthanisation agricole
Avant incorporation dans les digesteurs, la matière est préparée et brassée durant 3 à 5 jours pour activer la pré-fermentation aérobie. (©Terre-net Média)

La puissance électrique de l’installation s’élève à 100 kWél. Le biogaz produit est acheminé vers le moteur de co-génération qui entraîne une turbine produisant de l’électricité revendue sur réseau. La chaleur produite par le moteur est réinjectée pour chauffer des bâtiments, alimenter les séchoirs à grain, à bois, à luzerne, à chanvre…. « Un modèle d’avenir au service de la souveraineté en énergie, en cette période d’envolée des tarifs », insiste Jouany.

Location de la toiture de deux bâtiments

Pour compléter le tableau, les énergies renouvelables sont également présentes avec le photovoltaïque sur la ferme des Naudas. Deux bâtiments équipés de toitures photovoltaïques de 250 kWc chacun ont été construits, le premier en 2010 et le second en 2012. Un investissement qu’il ne regrette pas car avec le changement climatique, le plateau de Millevaches est plus souvent ensoleillé.

Jouany et ses associés ont choisi cette option car c’était une façon de monter un bâtiment d’élevage à moindre coût, par le biais d’un bail emphytéotique. Aujourd’hui, la production d’électricité contre balance les frais de construction. Pour l’instant, le bénéfice reste minime, car l’exploitation a pour obligation de revendre à EDF. Mais dans moins de 10 ans, Jouany récupèrera les bâtiments et compte bien passer à l’autoconsommation pour réduire ses factures.

Jouany revient sur l’unité de méthanisation : « Bien sûr, il s’agit d’un investissement lourd : 1,5 millions d’euros, dont 1 million pour le méthaniseur proprement dit et le reste pour aménager, bétonner, récupérer les jus. A l’époque, nous avions été subventionnés à hauteur de 40 %. Mais le rendement énergétique est excellent, avec la génération de 100 kW électrique et 121 kW thermique. Attention toutefois, avant de se lancer dans un tel projet, il est capital de sécuriser l’approvisionnement du méthaniseur, idéalement avec des gisements locaux. Car on peut vite se retrouver avec de la matière en moins en n’ayant pas contractualisé comme il faut ou avec des contractants qui se rétractent. »

Réagir à cet article
Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,4 €/kg net +0,05
Vaches, charolaises, R= France 7,21 €/kg net +0,06
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Jean-Michel Diard éleveur laitier dans le Maine-et-Loire

Des sols en bonne santé, même avec des Cive

Intercultures

Tapez un ou plusieurs mots-clés...