« NOUS ÉTALONS LES VÊLAGES SANS NUIRE À NOS CONGÉS »

« L'étalement des vêlages permet d'avoir une meilleure gestion de la trésorerie, ce qui devient primordiale à une époque où le prix du lait varie fortement », estime Samuel Baty.© E.A.
« L'étalement des vêlages permet d'avoir une meilleure gestion de la trésorerie, ce qui devient primordiale à une époque où le prix du lait varie fortement », estime Samuel Baty.© E.A. (©)

Au Gaec du Hurlevent, les vêlages ont été étalés sur l'année pour pallier la saturation du bâtiment, tout en préservant les périodes de vacances et de travaux dans les champs.

LORSQUE NOUS AVONS REPRIS LA FERME DE NOS PARENTS RESPECTIFS , avec Vincent, mon cousin germain, nous avons continué de grouper les vêlages, explique Samuel Baty, l'un des trois associés du Gaec du Hurlevent. Ils avaient lieu entre le 15 août et le 15 novembre pour la majorité. » En 2011, le regroupement avec l'exploitation voisine de Gérard Guignard permet l'acquisition de 146 000 litres de quota. Mais le bâtiment construit lors de la mise aux normes, en 2011, et prévu pour 80 vaches laitières est vite saturé, malgré la marge prévue initialement. « En période creuse, le nombre de vaches à traire pouvait descendre à 40, se souvient Samuel. Mais en période haute, la traite dans la 2 x 6 postes pouvait prendre jusqu'à 2 heures pour passer jusqu'à 90 laitières ! Les cases à veaux étaient également saturées. Nous devions envoyer certaines génisses sur le deuxième site par manque de place. »

« UNE MISE EN PLACE EN DOUCEUR »

Alors que des vêlages de mai et juin avaient commencé pour rattraper la dizaine d'animaux en retard, leur étalement sur l'année s'imposa aux éleveurs. « Étaler, oui, mais tout en se gardant des périodes sans vêlage, précise Samuel. C'est nécessaire pour le vide sanitaire, ainsi que pour l'organisation du travail et des congés. » Désormais, les vêlages ont lieu toute l'année, sauf entre le 15 décembre et le 15 janvier, pour passer les fêtes de fin d'année tranquillement, et entre le 15 avril et le 15 mai, période d'ensilage d'herbe et de semis de maïs. « En dehors de ces deux périodes strictement sans vêlage, nous limitons le nombre de naissances l'été pour partir en vacances et gérer l'irrigation sur les deux sites. »

« DES RÉPERCUSSIONS ÉCONOMIQUES DIFFICILES À CHIFFRER »

Pour respecter au mieux les périodes de vêlage, les inséminations des femelles se font sur mesure. « Une vache qui a seulement 80 jours de lactation pourra attendre pour être inséminée alors qu'une génisse va l'être, quitte à ce qu'elle vêle au cours de l'été. » Ne voulant pas trop pénaliser la production laitière pendant la période de transition, le décalage des vêlages a été programmé sur trois campagnes.

« Nous avons mis à profit la bonne génétique du troupeau pour allonger les lactations autour de 540 jours. Nous nous sommes fixé une limite à 600 jours. La persistance est variable d'une femelle à l'autre. Certaines ont fini avec peu de lait mais, dans l'ensemble, ça s'est bien déroulé. Quelques-unes ont eu tendance à mettre du gras quand leur lactation se prolongeait. Heureusement, avec le Dac, nous avons pu restreindre la quantité de concentrés distribués avant le tarissement. »

Du côté des cellules, pas de problème à signaler. En atteste la campagne 2014-2015 seulement à 185 000 cellules de moyenne. Le travail conduit sur la génétique y est pour quelque chose. Le troupeau affiche un index de santé de mamelle (STMA) de + 0,56.

Grâce à cet étalement des vélages, ce sont près de 24 000 litres de lait d'été supplémentaires que le Gaec du Hurlevent a produits sur les 790 000 litres qu'il devrait atteindre en 2015. « Dommage que cette année, Eurial, notre laiterie, n'ait pas versé la prime saisonnalité de 20 à 30 €/1 000 l, qu'elle verse habituellement pour encourager le lait d'été, déplore Samuel. De plus, avec les changements de contexte, nous perdons d'un côté ce que nous avons gagné de l'autre. »

« NOS LIVRAISONS SONT PLUS RÉGULIÈRES »

En revanche, l'étalement des vêlages s'avère sécurisant vis-à-vis du système de prix A et B pratiqué par Eurial : « Nos livraisons sont plus régulières et nous sommes de fait moins touchés par cette mécanique qui fait qu'au-delà de 9 % de la référence annuelle produite mensuellement, les livraisons sont payées au prix B, plus volatil. C'est une vraie incitation. Sur ce point, les deux mois de pause que nous avons instaurés n'ont que peu d'impact sur les livraisons. »

Concernant les veaux mâles, ils sont désormais vendus à un prix moyen supérieur car il y en a moins qui sortent en même temps que tout le monde. « En contrepartie, l'alimentation des taries coûte un peu plus cher. Avant, elles étaient uniquement au pâturage. Cela faisait un gros lot à gérer car il pouvait y en avoir jusqu'à 35. Maintenant, certaines passent l'hiver au bâtiment. C'est en partie compensé par les génisses qui valorisent les prairies. »

« LA GESTION DE LA TRÉSORERIE EST PRIMORDIALE »

Le plus grand changement économique est visible au niveau de la trésorerie. « Juillet et août étaient des mois compliqués à passer, avec les factures d'inséminations et d'aliments qui arrivaient toutes d'un coup. Plus ça va et plus la gestion de la trésorerie est primordiale à cause des variations du prix du lait.Avant, quand la période de vêlage était finie, c'était du bonheur car cela représentait une grosse pointe de travail, se souvient Samuel. Pendant les travaux dans les champs, nous étions tranquilles. En contrepartie, dès qu'une vache délivrait mal, cela devenait compliqué pour gérer les autres. J'avais l'impression d'être débordé. Maintenant, nous avons plus de temps pour surveiller chaque vêlage. Il en est de même pour les veaux dont les soins sont devenus plus individualisés. » Les cases à veaux ne sont plus saturées et un vide sanitaire de deux ou trois semaines est réalisé tous les ans. La surveillance des chaleurs se passe également mieux maintenant. « Même s'il faut plus souvent les surveiller, il y a moins de femelles en chaleurs en même temps. Du coup, je les détecte mieux. »

« NOUS DISPOSONS DE PLUS DE TEMPS POUR NOUS POSER »

Grâce au Dac, l'alimentation des vaches en début de lactation reste individualisée.

Au final, Samuel considère que d'un point de vue technique comme économique, les vêlages groupés ou étalés s'équivalent, à la différence près de la trésorerie. Le fait d'avoir moins de pics de travail est vu comme un avantage. « Même si parfois, je regrette les périodes où il y avait peu de vaches à traire, notre nouvelle organisation du travail nous permet de mieux appréhender la suite. Nous avons plus de temps pour nous poser et prendre du recul sur notre élevage. Les périodes de non-vêlages sont suffisantes. Il n'y aurait pas d'intérêt à les allonger. Nous arrivons à prendre descongés en été et en fin d'année, même si pour celui qui reste, c'est plus compliqué qu'auparavant. » Avant le départ probable à la retraite de Gérard en 2017, la production laitière sera sûrement revue à la baisse pour ne pas dépasser 700 000 litres et conserver une qualité de travail et de vie.

EMILIE AUVRAY

Aujourd'hui, une seule case de vêlage est suffisante, contre deux auparavant, pour gérer jusqu'à cinq vêlages par jour.

© E.A.

Le Dac permet d'individualiser l'alimentation d'un troupeau dont les vaches sont à des stades de lactation différents.

© E.A.

Avoir moins de vaches simultanément en préparation de vêlage permet de mieux les suivre individuellement.

© E.A.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

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