
Avec des vêlages à partir de septembre principalement, les marges de manoeuvre sont étroites pour produire plus cet été. Le Gaec de Gruchy compte davantage sur la souplesse de son système de production ... qu'il a mise en place.
SI LES ENTREPRISES JOUENT LE JEU, le prix de base des livraisons de juillet devrait monter à 380 €/1 000 l et restera sur cette lancée au troisième trimestre. À un mois du coup d'envoi, quels leviers peut-on actionner pour augmenter les livraisons mensuelles ? « Les marges de manoeuvre sont étroites, répondent les associés Sylvie Levéziel, Cyriaque Faelchlin (conjoint de Sylvie) et Jean-Yves Levéziel. Contrairement à bon nombre de nos collègues, nos livraisons ne seront pas freinées par le manque de fourrage. Même si nous avons rencontré beaucoup de difficultés pour le récolter l'automne dernier, nos stocks de maïs-ensilage sont suffisants pour faire la soudure jusqu'en septembre. » À très court terme, le Gaec n'envisage que deux leviers sur le troupeau. Le premier est l'expression du potentiel laitier. Grâce au passage en ration semi-complète avec l'installation en janvier de trois stalles de Dac, le concentré de production à partir de 25 kg de lait soutiendra plus efficacement que les années passées le pic de lactation, et plus globalement les vaches productives. Le second touche les vaches non gestantes. En temps normal, celles à 20 l/j sont réformées. Elles seront conservées. « Mais pas au détriment de la qualité du lait, précise Sylvie. Nous faisons beaucoup d'efforts pour être en super A toute l'année. Il n'est pas question de contaminer le troupeau avec quelques vaches à cellules. » Grâce à la qualité du lait, ils confortent en moyenne de 50 €/1 000 l le prix de base. Détériorer la qualité du lait pour profiter d'un prix de base plus élevé n'aurait pas de sens.
« Si le nombre de vaches à 20 l et moins devient assez important pour constituer un lot, nous sommes prêts à le faire, indique Cyriaque Faelchlin. Elles ne seront nourries qu'à l'herbe pâturée. Nous l'avons déjà fait. Cela demande plus de travail mais nous ne comptons pas nos heures. Pendant que deux traient, le troisième va chercher ce lot au pâturage. »
Ces mesures maximiseront l'existant mais ne feront pas de miracle. « Les dés sont jetés.
Les vêlages vont se dérouler surtout à partir de septembre, 66 sont prévus jusqu'en décembre, contre 21 programmés d'avril à août. » Conséquence : le stade moyen de lactation sera relativement élevé cet été, de sept à huit mois si peu de vaches sont réformées.
« NOUS ABANDONNERONS TOUTE NOTRE ACTIVITÉ VIANDE S'IL LE FAUT »
« De toute façon, nous ne voulons pas bouleverser notre conduite alimentaire de fond en comble sous prétexte que le prix du lait sera élevé cet été. Nous visons la constance pour avoir des animaux en bonne santé. Dans une conjoncture difficile, nous ne réduisons pas drastiquement les concentrés. Nous espérons récupérer cet investissement en conjoncture favorable. Les bonnes années compensent ainsi les mauvaises. »
En 2011-2012, le coût du concentré des vaches s'élevait à 82 €/1 000 l pour 1 808 kg distribués par vache, contre 67 €/1 000 l et 1 755 kg pour le groupe de comparaison du CER France Manche.
Sylvie, Cyriaque et Jean-Yves croient davantage à la souplesse de leur système de production pour s'adapter aux aléas climatiques et à la conjoncture. Ainsi, s'ils disposent aujourd'hui de maïs-ensilage alors que l'année écoulée n'est pas propice aux fourrages, ce n'est pas le fruit du hasard. Ils cultivent toujours quelques hectares de maïs en plus pour constituer des stocks de report... bien utiles cette année. Cette politique fourragère axée sur le lait s'est accentuée il y a deux ans. Ils ont choisi d'abaisser l'âge au premier vêlage (27 mois aujourd'hui contre 36 mois auparavant), réservant ainsi moins de surface de maïs à l'élevage des génisses. « Nous concentrons nos forces de production sur le lait. S'il faut abandonner les ateliers allaitantes et veaux de boucherie pour la développer, nous le ferons », affirment-ils, preuve à l'appui. En octobre, les 20 à 25 vaches allaitantes n'ont pas été saillies, libérant ainsi progressivement les trois travées de la stabulation paillée qu'elles occupent habituellement. « Cela nous permet d'héberger la vingtaine de vaches laitières que nous vendons d'ordinaire en fin de campagne pour éviter le dépassement de quota. Nous avons ainsi assuré les 8 % de rallonge alloués en 2012-2013, soit 46 000 l supplémentaires. Nous continuons de traire ces vaches qui nous fournissent 10 000 à 12 000 l de plus tous les mois par rapport à l'an passé.
Ce surplus de volume bénéficiera du prix du lait élevé du second semestre », expliquent-ils.
Le Gaec n'exclut pas de réduire, voire d'arrêter la production de 50 veaux de boucherie. Élevés au lait doux, ils consomment 90 000 l de lait.
« NOUS FONDONS NOSPRÉVISIONS SUR 100 000 L DE PLUS EN 2013-2014 »
« Nous pouvons pousser plus loin la démarche s'il le faut, en élevant au lait en poudre les 40 à 45 génisses laitières qui valorisent aujourd'hui 30 000 l de lait doux, à condition bien sûr que cette substitution soit économiquement intéressante. »
La coopérative, Les Maîtres laitiers du Cotentin, a annoncé le 10 mai une allocation provisoire de 10 % pour la campagne 2013-2014. « Si les livraisons des producteurs ne sont pas suffisantes, peut-être montera-t-elle à 15 %. Il faut y ajouter la dernière hausse européenne de quota de 1 % et sans doute des attributions du bassin. » Les trois associés font le compte : ce sera peut-être 680 000 l qu'ils seront autorisés à livrer. Dans un contexte de prix du lait favorable, au moins sur une partie de la campagne, c'est une chance qu'ils veulent saisir.
CLAIRE HUE
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