« Le lait est enfin payé à son juste prix, c'est maintenant qu'il faut produire ! » C'est ce que conseille Yann Martinot, directeur technique d'Elvup à l'occasion d'une journée technique destinée aux éleveurs laitiers.
Il faut faire du produit en maîtrisant les charges.
Il rappelle par ailleurs : « Tout le monde a les yeux rivés sur les charges, et c'est légitime car elles ont beaucoup augmenté (et même plus vite que les produits), mais il faut que la quantité de lait par vache augmente pour justement ne pas se faire rattraper par ces charges. » Il poursuit : « La marge en élevage, c'est 2/3 de produits et 1/3 de charges. »
La marge sur coût alimentaire à compter en €/vache plutôt qu'en €/1 000 l
Pour commencer, sur quelle base calcule-t-on sa marge brute ? En €/1 000 l, €/UTH, €/vache productive, €/ha... les possibilités sont nombreuses. « Le critère doit se baser sur le facteur de production limitant. Si c'était les quotas avant, aujourd'hui les laiteries sont plus souples donc on va plutôt prendre en compte les outils de production types bâtiment, surface, main d'œuvre... »
Pour la marge sur coût alimentaire (qui prend en compte les charges opérationnelles), Yann Martinot recommande de s'intéresser au lait vendu par vache présente (vaches traites et vaches taries), donc d'utiliser l'unité €/vache. « Le critère d'€/1 000 l est trop relatif. Sur votre compte en banque, c'est de l'absolu qui reste à la fin ! »
Maximiser la production par vache
Les données recueillies par Elvup chez ses éleveurs de l'Orne affichent une moyenne de 232 €/vache présente/mois de marge sur coût alimentaire (toutes races et productions confondues). En race normande, elle est de 213 €, « moins importante que la moyenne car la valorisation des taux n'a pas augmenté contrairement au lait ». Et ce n'est pas beaucoup mieux pour les éleveurs de Normandes livrant en AOP : 218 €/vache présente/mois. En effet, ces élevages font moins de lait par vache et consomment des aliments plus chers.
+ 1 litre de lait/jour, c'est + 10 €/vache présente/mois
Viser le lait plus que les taux
Le discours du conseiller est clair : raisonner marge avant les charges. « On vise le rendement marginal, qui se fait par le litrage », insiste-t-il. Il cite cet exemple :
Ajouter 2 kg de concentrés à 380 €/t pour une réponse de 2 l de lait supplémentaire (sans parler des incidences TP, TB et NEC) :
23 litres | 25 litres | Différence | |
Coût alimentaire | 120 €/1000 l | 141 €/1000 l | + 21 €/1000 l |
Soit par VL | 2,76 €/VP* | 3,52 €/VP | |
Produit lait (550 €/1000 l) | 12,65 €/VP | 13,75 €/VP | |
Marge sur coût alim (€/VP/j) | 9,89 €/VP | 10,23 €/VP | |
Marge €/1000 l | 430 €/1000 l | 409 €/1000 l | -21 €/1000 l |
Marge sur coût alim (€/VP/mois) | 301,6 €/VP | 312 €/VP | +10,4 €/VP |
Marge sur coût alim sur l'année (85 VL) | 307 632 € | 318 255 € | + 10 623 € |
(*VP = vache présente, soit VL + taries)
« Si on regarde la marge aux 1 000 l elle diminue, mais ce qui reste vraiment sur le compte en banque c'est bien la dernière ligne, qui elle augmente. Dépenser plus pour gagner plus, c'est valable (dans la limite du raisonnable bien sûr) », conclut Yann Martinot. L'idée est bien de faire du produit en maîtrisant les charges.
« Aujourd'hui pour gagner + 0,50 €/jour, il faut faire environ 1 litre. Pour gagner la même somme par les taux, il faut 9 points de TP, ce n'est pas la même chose ! » Pour l'expert, le litrage compte plus que les taux. « Et ce n'est pas qu'une question de concentrés. Il faut des animaux efficaces et de bons fourrages. Le premier facteur de production est d'ailleurs le confort ! »