
Depuis le mois d’avril, les taureaux holsteins canadiens sont évalués sur l’efficience du méthane. Une première mondiale qui ouvre la voie à une réduction des émissions des bovins laitiers grâce à la génétique, sans perte de production.
Savez-vous qu’une vache holstein produit en moyenne 500 g de méthane entérique par jour, soit environ 180 kg par an ? En moyenne, car les différences individuelles sont estimées autour de 30 %. Le méthane est un puissant gaz à effet de serre et de nombreux pays, dont la France, se sont engagés à en réduire les émissions. Il provient en partie de l’élevage de ruminants en raison des fermentations dans le rumen. 90 % du méthane excrété par les vaches en est issu et est rejeté par éructation. C’est ce qu’on appelle le méthane entérique.
Ces émissions de méthane sont associées à une perte de l’apport énergétique brut de l’animal de l’ordre de 5 à 7 %. L’importance de ces pertes et des différences individuelles suggère qu’il est possible d’agir via la génétique.
La recherche a montré que près d’un tiers des émissions de méthane d’un bovin sont liées à la génétique. 24 % dépendent directement de la vache tandis que le reste s’explique par la génétique de la flore du rumen. L’alimentation, la conduite du troupeau et l’environnement conditionnent aussi les émissions de méthane entérique.
Émissions prédictibles à partir du lait
Dans un premier temps, les émissions individuelles d’environ 500 bovins ont été mesurées directement à partir d’auges sophistiquées (système green feed) permettant de recueillir ce gaz à chaque fois que l’animal vient manger. Cette méthode complexe et coûteuse peut difficilement être généralisée. Toutefois les chercheurs de l’université de Guelph (Canada) ont découvert un lien entre ces mesures individuelles et les données recueillies par infrarouge sur le lait de ces mêmes vaches (MIR). La corrélation s’élève à 0,85. Ces travaux s’inscrivent dans des projets internationaux dirigés par les équipes canadiennes.
En utilisant l’intelligence artificielle, les chercheurs ont réussi à prédire les émissions individuelles de méthane par les vaches à partir des données spectrales de leur lait. Cette découverte a été déterminante car elle a permis de valoriser les données de 700 000 vaches canadiennes présentes dans les troupeaux au contrôle laitier pour réaliser des évaluations génétiques. Ce sont les données des vaches en première lactation qui ont été utilisées. Le Canada enregistre les données MIR depuis 2013 et dispose donc d’une large base de données.
Une héritabilité élevée, à 23 %
C’est ainsi qu’un nouvel index officiel est né, dénommé « efficience du méthane ». Il est calculé par Lactanet, la principale entreprise en charge de l’amélioration des troupeaux laitiers au Canada et qui est responsable du contrôle laitier, des évaluations génétiques, des logiciels de gestion de troupeau, du transfert des connaissances et de la traçabilité des bovins laitiers. Elle a travaillé sur ce sujet avec Semex Alliance qui a breveté ce nouvel index. Les deux entreprises ont reçu conjointement un prix de l’innovation, remis par la Fédération internationale du lait en octobre dernier.
L’efficience du méthane est publiée pour les taureaux holsteins et se base sur toutes les données disponibles concernant sur la généalogie, les performances et le génotype. Cette production de méthane est génétiquement indépendante du volume de lait et des taux. Autrement dit, l’index est conçu de manière à sélectionner les animaux les moins émetteurs de méthane pour une même quantité de lait produite, avec des taux identiques. Aucune corrélation indésirable avec d’autres caractères n’a été décelée. Il existe même une légère relation positive avec les index canadiens de santé-fertilité et de résistance aux maladies métaboliques. Le CD est supérieur à 70 % chez les jeunes taureaux. L’héritabilité est estimée à 23 %, un niveau très élevé.
Ce caractère est exprimé sous forme de valeur d’élevage relative (VER). La moyenne se situe à 100 et parmi les 2 000 taureaux déjà évalués, les trois quarts se trouvent entre 95 et 105. Plus la VER d’un taureau est élevée, moins ses filles produiront de méthane. Un écart de 5 points correspond à une production de méthane réduite de 3 kg par an. Lactanet a calculé que la baisse potentielle s’élève à 1,5 % par vache et par an. Cela peut sembler faible, mais d’ici à 2050, la réduction d’émissions pourrait s’élever à 20-30 %.
Une évaluation accessible pour les vaches
Parallèlement à la publication des index pour les taureaux, ceux des femelles des troupeaux inscrits au contrôle laitier canadien ont été communiqués. Les autres élevages auront aussi accès à ces informations mais elles seront payantes. Semex a inclus cette évaluation dans le génotypage classique qu’elle propose à ses clients (30 €). Ainsi, les éleveurs peuvent d’ores et déjà savoir lesquelles de leurs vaches sont plus ou moins émettrices.
L’efficience du méthane traduisant aussi l’utilisation de l’énergie par les bovins laitiers, son utilisation en sélection permet en plus d’atteindre un meilleur niveau d’efficacité. Si l’apport de la sélection pour réduire les émissions est lent, il a le mérite d’être cumulatif. Il s’agit donc d’une stratégie à long terme qui peut inclure, outre l’efficience du méthane, d’autres caractères tels que l’efficacité alimentaire, mais aussi la longévité, la fertilité la résistance aux maladies et la productivité laitière. Tout ce qui contribue à allonger les carrières des animaux va dans le sens d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre des élevages laitiers. Au Canada, Lactanet publie des évaluations de l’efficience alimentaire depuis 2021.
Dans l’immédiat, cet index n’est disponible qu’en race holstein. À l’avenir, des équations de prédiction seront établies pour d’autres races. La France travaille aussi sur ce sujet. Dans le cadre du programme Méthane 2030, le début de la sélection génomique sur ce critère est annoncé en 2026.
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