Quelle stratégie pour engraisser les réformes laitières ?

Article réservé aux abonnés.

vaches partant à la réforme dans une foire aux bestiaux
Le poids de carcasse est très hétérogène, plsu d'un tiers des vaches abbattues étant maigres car non engraissées. (© C.FAIMALI/GFA)

Le prix de vente des réformes laitières peut inciter des éleveurs à mieux finir leurs vaches. Quelle stratégie d’engraissement adopter ? Faut-il privilégier une reprise d’état en fin de lactation ou bien engraisser les réformes après une phase de tarissement ?

En 2022, le poids de carcasse moyen des vaches laitières atteignait 315 kgc (kg de carcasses), toutes races confondues (Dossier annuel Bovins viande : Année 2022-Perspectives 2023, Idele). Cette moyenne masque une forte hétérogénéité, avec plus d’un tiers de ces vaches abattues maigres (notes d’état 1 ou 2 à l’abattoir). En effet, de nombreux éleveurs n’engraissent pas leurs vaches, par manque de place, de fourrages ou faute d’en percevoir l’intérêt économique.

La hausse des cotations bovins favorable

Pourtant, l’engraissement des réformes laitières peut être rentable. Au début de l’année 2022, les cotations des bovins se sont envolées. Le prix d’une vache laitière de réforme P= est supérieur à 4 €/kgc depuis mars 2022. Le manque de disponibilité incite les industriels à maintenir les prix à un haut niveau. Le produit viande représente désormais un poids non négligeable dans le chiffre d’affaires de l’atelier lait. Par rapport à 2021, le produit issu des ventes d’animaux a augmenté de 20 €/1 000 litres, soit + 14 000 € pour un élevage produisant 700 000 litres avec un taux de réforme de 29 %.

Cette hausse des cotations a également accentué les écarts sur le prix moyen des réformes entre les exploitations qui finissent leurs animaux et celles qui n’ont pas cette stratégie.

La perception et les pratiques des éleveurs sur l’engraissement sont très variables. Certains préfèrent allonger la durée de lactation des vaches pour les laisser reprendre de l’état. D’autres finissent les vaches après les avoir taries. Pour ces deux stratégies, plusieurs prérequis techniques s’imposent.

LE COMMENTAIRE DE L’EXPERT : « Attention aux impacts indirects »

L’engraissement des vaches à réformer représente un réel gain économique, à condition d’avoir des fourrages, de la main-d’œuvre, des bâtiments ou des prairies disponibles à cet effet. Pour trois mois d’engraissement, il faut compter environ 1,1 t de MS/VL. Chez Jean Gresse, avec 20 vaches de réforme à engraisser par an, cela représenterait entre 20 et 25 t de MS de consommation fourragère supplémentaire. La stratégie de finition pourra être adaptée selon la campagne fourragère et les stocks.

Bien rationalisé, le travail sur le lot des vaches taries à l’engrais peut être faible, mais il n’est tout de même pas à négliger. En considérant un temps d’astreinte de 1 à 2 min/vache/j, soit environ 2,5 heures de travail par vache tarie engraissée, la marge générée assure une rémunération d’environ 20 €/heure. Pour la stratégie de reprise d’état des vaches en lactation, l’impact sur le travail est plus difficilement quantifiable. Une partie de l’astreinte sera diluée dans le troupeau, mais le temps de traite sera allongé, un élément dissuasif pour beaucoup.

L’engraissement des vaches en lactation coûte plus cher, mais cela est largement compensé par le produit généré par la vente de lait. Attention néanmoins aux risques d’accidents liés à la présence de ces animaux supplémentaires dans le troupeau. Ces vaches vides peuvent potentiel­lement revenir en chaleur et provoquer glissades et compétition avec les autres animaux. Pour Jean Gresse, la stratégie de finition des vaches en lait représenterait une hausse des effectifs d’environ 3-4 VL. Une augmentation facilement absorbable compte tenu des infra­structures non saturées.

Dans un système saturé, le gain marginal serait bien moins intéressant, avec des vaches peu productives prenant la place d’autres VL. De même, cette stratégie est difficilement applicable aux élevages robotisés où le nombre de vaches par stalle est moins modulable.

LA CONCLUSION DE L’EXPERT : « Un réel potentiel économique pour les éleveurs et la filière »

La finition des vaches de réformes génère presque toujours une marge positive. Elle l’est davantage lorsque la finition est bien couplée à la période de vente. Jusqu’en 2020, on observait une saisonnalité dans les cotations avec un marché porteur sur l’été. Cette tendance semble à nouveau se produire avec une baisse des cotations depuis octobre 2023. Une reprise d’état au pâturage, couplée à une vente des réformes sur mai-août est donc une stratégie favorable qui allie faible coût alimentaire et bonne valorisation commerciale à la vente.

Si la finition des réformes concurrence les autres animaux, et se fait donc au détriment des performances techniques des vaches en lactation, alors l’engraissement n’est pas souhaitable. Là encore, une finition dehors permettra de limiter ce risque de concurrence et aura un moindre impact sur le travail.

Le solde d’échange de viande bovine en France était déficitaire de 140 000 tec (tonnes équivalent carcasse) en 2022 (Idele, 2023). Un gain de 30 kgc sur l’ensemble des vaches laitières abattues chaque année (900 000 têtes en 2022) représenterait un total d’environ 27 000 tec de viande produite supplémentaire.

Les tarifs du moment doivent inciter les éleveurs à chercher un meilleur produit réforme, d’autant plus que le manque d’offre d’animaux à abattre devrait permettre un maintien des cotations à un niveau relativement élevé.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo

« L’IA ne remplace pas notre métier, elle le facilite »

Monitoring

Tapez un ou plusieurs mots-clés...