
LA SITUATION
Patrick et Michel A. se sont installés en Gaec avec leurs parents il y a trente ans. Ils ont accueilli pour les remplacer Christophe en 2004 et Éric en 2009. Afin de tester leur « compatibilité » avec leurs valeurs, les frères leur ont proposé de commencer par une année de salariat. Ils sont convaincus que de bonnes relations entre les associés sont garantes de la réussite de l’entreprise. Cela se traduit par de l’entraide sur les quatre ateliers – même si chacun est plus spécifiquement en charge d’un –, par l’écoute de l’autre mais aussi par une capacité à exprimer son point de vue et par de la convivialité.
Christophe et Éric ont passé cette période d’essai avec succès. Les quatre associés ont développé l’exploitation et sont à la tête 350 ha, dont 200 ha de cultures de vente et 150 ha de surfaces fourragères principales destinés au troupeau de 100 holsteins, et un atelier de taurillons. Une microméthanisation complète l’ensemble. Mi-2023, Patrick a averti ses trois collègues de son départ à la retraite en 2024. Son fils Hugo, âgé de 23 ans, s’est déclaré intéressé pour lui succéder. Comme à Christophe et Éric, il lui est demandé de réaliser une année de salariat. En parallèle, ils m’ont sollicitée pour, du côté de Michel, Christophe et Éric, remettre à plat leurs objectifs personnels et professionnels, et du côté de Hugo définir ses attentes et ses craintes.
LES PERSONNALITÉS ET LES OBJECTIFS
Patrick, Michel, Christophe et Éric ont des personnalités contrastées mais le quatuor s’est appuyé durant quinze ans sur les qualités des associés, chacun faisant des efforts pour gommer ses défauts. Tous sont motivés par une conduite technico-économique performante. Michel, 58 ans, prend vite des décisions. Il souhaite aujourd’hui plus de temps libre.
Plus jeune de 20 ans, Éric est toujours en recherche de nouveautés. Il consacre beaucoup de temps à l’exploitation et doit se forcer à écouter ses associés, en particulier Christophe qui est discret. Ce dernier, 48 ans, a du mal à prendre la parole. Ses collègues l’y encouragent. Il n’aime ni travailler ni prendre des décisions seul. Jusqu’à présent, c’était Patrick, de caractère posé, qui conciliait les différentes personnalités quand cela était nécessaire. Même s’il ne s’attribue pas ce rôle, son fils Hugo est capable de prendre le relais. Il sait prendre du recul face à une situation délicate, et se maîtriser pour laisser son interlocuteur présenter ses arguments sans l’interrompre. Il préfère optimiser les ateliers existants, plutôt que les développer.
CE QUE FAIT DÉJÀ LE GAEC
Le Gaec a le souci de faire circuler l’information, ce qui désamorce les malentendus.
Un local où se rencontrer. Il est équipé d’un bureau et d’un poste informatique, principalement utilisé par Michel qui est responsable de la partie administrative. Cela n’empêche pas ses collègues d’y accéder. Les associés peuvent se retrouver autour d’une table. Un coin cuisine est aménagé.
Un café tous les matins à 9 h 30. Étant donné la diversité des ateliers, la cohésion du Gaec passe par un échange très régulier des informations dans un cadre convivial. Grâce à un agenda partagé, les associés ont connaissance des rendez-vous et du planning des uns et des autres. Un tableau est également fixé au mur pour inscrire les tâches urgentes et les « infos » de dernière minute. Mais c’est surtout le café pris ensemble tous les matins à 9 h 30 qui est au cœur du réacteur du Gaec. La pause dure quarante-cinq minutes. Il est demandé à chacun d’être mentalement présent, par exemple en ne consultant pas son smartphone ou en ne répondant pas à un appel.
Des règles d’astreinte et de congés claires. Chaque associé a un week-end d’astreinte par mois, du vendredi soir au dimanche soir. Un étudiant est embauché pour le seconder sur le troupeau laitier et les taurillons. Les congés sont de trois semaines par an, dont deux au maximum cumulées.
TROIS NOUVELLES SOLUTIONS
Après six mois de collaboration, Michel, Christophe, Éric et Hugo souhaitent conforter ce fonctionnement pour construire un nouvel équilibre au sein du Gaec. Trois nouvelles modalités sont décidées.
1. Manger ensemble un midi par mois.
En plus du café quotidien, ils ont convenu d’une pause du midi une fois par mois ensemble. À tour de rôle, chacun invite ses collègues à prendre le repas à son domicile. L’objectif est de cultiver la convivialité pour fortifier les liens. Selon eux, se rencontrer dans un autre cadre que celui de la ferme ouvre plus facilement les échanges à la sphère privée.
2. Créer un groupe WhatsApp.
La pause du matin ne suffit pas à faire circuler toutes les informations. Le Gaec en a fait la mauvaise expérience sur une décision finale d’achat de matériel que Michel et Éric ont prise en urgence. Christophe et Hugo le leur ont reproché. Ils ont décidé de créer un groupe WhatsApp pour fluidifier leurs échanges et leur décision.
3. Convenir d’horaires de travail communs.
Jusqu’à l’arrivée de Hugo, chaque associé organisait à sa façon son activité et ses horaires. Constatant que la plage d’arrivée varie certains jours de 6 heures à 9 heures, Hugo demande que l’horaire maximal soit à 7 h 30 pour garantir une certaine équité. Celui qui a terminé son travail va aider les autres. Cette nouvelle règle entretient l’esprit d’entraide qui anime le Gaec.
MES CONSEILS
Plus on prépare en amont le changement d’associé, mieux c’est. Le futur associé a des attentes, mais aussi des limites qu’il refusera de dépasser. Il en est de même pour les associés en place. Avant que le premier investisse des parts sociales dans le Gaec, il est indispensable que les objectifs des uns et des autres soient définis et que les associés formulent clairement le cadre dans lequel le postulant travaillera. Il vaut mieux stopper le projet plutôt que s’engager dans une association qui conduira à un échec. Les conséquences économiques et humaines seront lourdes.
Avoir des personnalités compatibles. Tester l’association par un parrainage ou une période de salariat est un bon moyen de vérifier si les modes de travail convergent. En cas de discordance, les éleveurs pourront s’interroger sur les efforts qu’ils sont prêts à fournir pour bâtir des relations harmonieuses et sur ce qu’ils refusent de vivre.
Créer un climat de confiance. Cela passe par l’écoute sans couper la parole à celui ou celle en train d’argumenter son point de vue. Cela demande un effort. Le jeu de l’image à double sens peut aider les associés à prendre conscience de leurs visions différentes, à changer leur regard et envisager d’autres possibilités. Les interprétations différentes surprennent toujours !
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