ÉLIXIR : DES MADISON ET MANIZALÈS CONTRASTÉS

L'ANNÉE 2009 ÉTAIT SOUS L'EMPRISE des petits-fils d'Élixir, souche moins favorable au maintien de la variabilité génétique. Élixir compte à son actif 25 360 filles de service et ses fils ont su se rendre attrayants grâce à leurs profils variés. Les éleveurs ont été en particulier séduits par Madison, Manizalès, Monkey ou Madagascar qui enregistrent aujourd'hui entre 6 000 et 8 500 filles de service. Cette empreinte sur la race normande se retrouve sur les petits-fils. Après les six retenus en 2009, les entreprises de sélection en ont reconnu six autres depuis le début de l'année. Elles attendaient notamment les fils de Madison, toujours très bien placés en lait (1 433 kg), en cellules et longévité (un bémol sur la fertilité), mais détériorateurs sur tous les postes de la mamelle. Malheureusement, il n'a pas su transmettre son potentiel laitier.

Université aurait pu lui tenir tête (1 841 kg), mais sa mamelle à - 1,2 l'a sorti de la course. Au bout du compte, sur les 41 fils indexés, trois jeunes polygéniques sont diffusés. Agréé l'an passé, l'index lait d'Uvigny, déjà bas, n'a pas résisté. Il s'établit aujourd'hui à 233 kg, entraînant Uvigny à 123 points d'Isu. Espérons que les deux nouveaux, Ustensil (142 d'Isu) et Vampineau (134 d'Isu), ne suivront pas le même chemin. Tous deux présentent un index lait de 750 à 800 kg. « Avec Ustensil, on tient enfin l'un des produits utilisables de Madison, estime Matthieu Chambrial, du schéma de sélection GNA. Il présente un profil production-morphologie équilibré. » Les qualités de mamelles maternelles (note de 8 sur 10 de la mère en quatrième lactation) ont pris le dessus pour décrocher une synthèse de 0,7. Ustensil élargit seulement l'écart avant des trayons. En revanche, il conforte fortement l'attache avant (2), l'équilibre des quartiers et la distance plancher-jarret. Autres atouts : son TP positif, ses aplombs et, sous l'influence de Madison, ses fonctionnels, en particulier la longévité à 1,4. « Avec une facilité de naissance de 83 %, il est interdit sur génisses », signale Matthieu Chambrial qui constate que d'une façon générale le millésime 2010 part avec un handicap sur ce poste. Par ailleurs, sans sang Diamètre, Ustensil ouvre le champ des accouplements.

LA COMBINAISON DU LAIT ET DE L'APTITUDE BOUCHÈRE

Cela vaut aussi pour Vampineau qui se différencie de son demi-frère par son caractère mixte. À performances laitières équivalentes (mais TP négatif), il fournit des bassins larges, mais très renversés et des poitrines larges et profondes pour une note globale format de 1,3. Et surtout, Vampineau a la particularité de produire des animaux à aptitude bouchère (1,4). Le cumul des qualités bouchères de ses deux grands-pères Élixir et Entoi a permis de le hisser dans le top 20 de la race sur ce poste. En dépit de la baisse de son Isu de 6 points entre février et juin, les Normands ont donc choisi de maintenir sa diffusion. A contrario, le nouveau taureau n'est pas aussi déviant qu'Entoi, Élixir et Madison sur la mamelle (- 0,2). Il s'accorde la coquetterie d'un plancher relativement haut (0,6) et une attache avant longue (0,6).

Ce profil, somme toute rare, butera sans doute sur ses aplombs détériorateurs et un écart avant des trayons très négatif. « Comme Ustensil, Vampineau est interdit sur génisses », complète Matthieu Chambrial. L'autre fils d'Élixir, Manizalès, apporte sa pierre à l'édifice familial. Il a su résister à la concurrence depuis sa sortie en 2003. Avec 132 d'Isu, il transmet un squelette grand et un bassin large. Et surtout il améliore tous les postes de la mamelle, les aplombs (1,3) et, comme son demi-frère, les fonctionnels cellules et longévité. Seul bémol : un TP négatif pour un niveau laitier faible (341 kg). Absent des indexations polygéniques 2009, il prend sa revanche… à partir des génomiques dans les catalogues des entreprises de sélection l'an passé. Certes, Unnoël, sorti en octobre, avait sauvé l'honneur. À 140 points d'Isu, c'est un Manizalès bis, mais un cran laitier au-dessus (788 kg). Dommage qu'il n'ait pas hérité des excellents aplombs de Manizalès.

MANIZALÈS A REMPLI SON CONTRAT

Moins testée que les Madison (24 fils indexés contre 41), cette branche a mieux réussi l'épreuve de la mise en service. Le millésime 2010 en affiche quatre. Aux trois ex-génomiques 2009, Visuel, Virbac et Vidocq, s'ajoute Vomicol. En livrant une configuration très équilibrée, le premier est accroché au peloton de tête (150 d'Isu). Grâce à l'accouplement complémentaire au niveau des format et mamelle, Visuel a tiré parti des qualités de son père et de son grand-père maternel Idris, ce qui produit des animaux grands et développés, pour malgré tout une naissance des veaux assez facile (88 % contre une moyenne de 89 %). « Les premiers veaux issus des taureaux génomiques étaient des animaux fins, a observé Matthieu Chambrial. La descendance de Visuel démarre peut-être avec une ossature fine pour ensuite vite pousser. » Selon lui, il faudra veiller malgré tout à corriger le bassin incliné que donne le jeune mâle. De même, il faudra renforcer la mamelle (0,4), fragile sur presque tous les postes (sauf le plancher et l'attache arrière). Ce tableau séduisant est complété par un niveau laitier flirtant avec les 900 kg et un TP légèrement positif grâce à Idris. À noter aussi l'index cellules de 1,6 qui est renforcé par la résistance aux mammites cliniques (0,6), nouveau critère qui complète la gamme des fonctionnels. Ce profil ouvre la voie à une diversité d'accouplements, renforcée par l'absence de Diamètre dans son pedigree. Ne pas oublier tout de même que Visuel cumule les deux origines très utilisées d'Élixir et Valabri.

Le deuxième Manizalès, Vomicol (148 d'Isu), a une morphologie à l'opposé. Il se positionne comme leader de la race pour la mamelle (2). « Sa grand-mère maternelle, Mandoline, lui a transmis sa conformation bien dessinée et attachée. Il enrichit son palmarès déjà comblé par son fils Télérama, agréé en 2008 principalement pour la note de synthèse mamelle aujourd'hui à 1,1. La mise en valeur de la souche Mandoline traduit les efforts de GNA sur ce critère », se réjouit l'animateur. Malheureusement, son stock de doses actuellement limité (Vomicol est malade) va freiner son développement ces prochains mois. Dommage car, comme Visuel, Vomicol offre une palette d'accouplements. La mamelle combinée à des performances laitières de bon niveau (632 kg pour 0,6 de TP), des aplombs solides, des index fonctionnels à l'image de Manizalès et un format neutre (- 0,1) autorisent de multiples solutions, à commencer par les filles de Nivéa, nombreuses à accoupler et sans sang Diamètre. Ce n'est pas le cas de Vomicol.

Même analyse pour Virbac (141 d'Isu) dont Diamètre est l'arrière-grand-père maternel. Il est le seul Manizalès avec un index fertilité dépassant 0,5, couplé à un index cellules à 1,3. De quoi rassurer les éleveurs qui, à sa sortie polygénique en février, souhaitaient profiter de son potentiel laitier (TP notamment). L'arrivée de douze filles dans son indexation a fait chuter son lait de 214 kg pour atteindre 544 kg et 141 d'Isu. Les amateurs de morphologie ne devront pas compter sur Virbac (0,1 en format et mamelle), même s'il élargit le bassin (1) et donne des mamelles attachées (0,6 en attache avant, 1 en attache arrière et neutre en ligament). « Avec Velorio en attente à 140 d'Isu, cinq Manizalès affichent un Isu d'au moins 140 points. »

Vidocq, lui, cultive sa différence. Son niveau laitier limité à 500 kg, accentué par un TP négatif, l'a entraîné à 121 d'Isu. Bien en dessous de l'index Sam affiché l'an passé (148 points).

Les changements de calcul Sam l'ont abaissé à 128 d'ISS. S'appuyant sur son index tardif de précocité, les Normands espèrent un ressaisissement. Ses réelles qualités de mamelle (1,1), ses aplombs solides et un format légèrement améliorateur ont fait pencher la balance en sa faveur. Comme neuf autres 2010, il ne répand pas Diamètre mais Paramètre (Hollydays) et Valabri. •