AUX PAYS-BAS : LA VOLONTÉ D'ÊTRE RÉACTIF ET COMPÉTITIF

La référence laitière de Frans Keurentjes est presque le double du quota moyen néerlandais. Son potentiel de production est trois fois supérieur.
La référence laitière de Frans Keurentjes est presque le double du quota moyen néerlandais. Son potentiel de production est trois fois supérieur. (©)

Entreprenant, Frans Keurentjes colle au marché. Face à la crise, il n'hésite pas à réduire son quota pour une baisse drastique des charges.

JE PRÉVOIS UN PRIX moyen du lait à 260 /1 000 kg en 2009-2010. » Un effondrement par rapport aux années précédentes. L'an passé, Frans Keurentjes a perçu 326,30 €/1 000 kg, en 2007- 2008, 380,70 €. Ces variations importantes sont, pour lui, révélatrices de la nouvelle politique décidée par l'Union pour le secteur laitier. « L'UE a choisi d'ouvrir le secteur laitier à plus de compétition. La seule chose à faire est de s'adapter. » Il a pris des orientations radicales pour résister à l'effondrement du prix du lait.

1. FOURNIR UNE RATION « LOW COST »

Frans n'hésite pas à abaisser le niveau d'étable de 8 000 kg à 7 000 kg de lait standard par vache. L'objectif est de fournir une ration « low cost » à ses laitières conduites en zéro pâturage. Tout en maintenant à volonté une ration fourragère composée pour deux tiers d'ensilage d'herbe et un tiers de maïs-ensilage, il a établi ses prévisions sur une quantité de concentrés de 3 kg par vache en moyenne sur l'année, contre 6 kg l'an passé. Les premiers mois sont encourageants. En début de campagne, le coût de concentrés s'élevait à 25,20 €/1 000 kg contre 54,90 €/1 000 kg à la même période l'an passé. Cette décision technique n'a pas été sans conséquence dans un premier temps. Le nombre de mammites a augmenté. Les problèmes de boiteries se sont accrus. La fertilité s'est dégradée. « Pour y remédier, j'ai l'intention d'introduire le taureau dans le troupeau. En situation de crise, il faut remettre en cause ses pratiques et accepter ce qui nous paraissait inacceptable il y a encore quelques mois. »

2. ABANDONNER LA LOCATION DE QUOTA

L'éleveur a établi ce plan d'action sur un quota de 900 000 kg alors qu'il disposait de 1,4 à 1,5 million de litres de quota les deux précédentes campagnes. Il louait la différence à raison de 200 €/1 000 kg soit un coût réparti sur l'ensemble du volume livré de 63,90 €/1 000 kg en 2008-2009 et de 97,70 €/1 000 kg en 2007- 2008. À l'image de ses collègues néerlandais, Frans a une vision entreprenariale de son métier, quitte à chambouler la configuration de son exploitation pour coller au marché. « J'ai anticipé la suppression des quotas en vendant, à l'automne 2007, un tiers de ma référence alors que le prix du quota était encore élevé. Je pensais que les tarifs de location s'effondreraient. Cela n'a pas été le cas. »

Avec un prix moyen du lait en baisse de 55 €/1 000 kg en 2008-2009, l'exploitation n'a pas résisté au prix de location prohibitif. Sa comptabilité affiche un déficit de 18 €/1 000 kg contre un bénéfice de 93,40 €/1 000 kg en 2007-2008 (1). Autre conséquence : son coût de quota décroche de la moyenne EDF néerlandaise avec un surplus de charge de 69 €/1 000 kg. La chute du prix du lait a levé ses dernières hésitations à ne plus louer de références. La réduction du niveau de quota, couplée à celle du niveau d'étable, porte l'effectif du troupeau à 130 laitières, contre 190 les années précédentes. « J'ai recherché la meilleure efficacité à l'échelle de l'exploitation. Il a fallu trouver le bon équilibre entre le nombre de vaches et leur niveau de production. » Et Frans d'ajouter :

« Spéculer sur le prix des quotas était une erreur. J'essaie de renforcer ma structure pour être parmi les meilleurs. Si j'ai des mauvais résultats, je m'en attribue la seule responsabilité. »

3. UN SALARIÉ LICENCIÉ EN AVRIL

L'éleveur estime qu'une exploitation résistera plus aisément à une conjoncture tendue si ses charges fixes sont, autant que possible, limitées. « En situation de crise, l'éleveur est contraint d'y faire face. Les charges opérationnelles sont plus facilement ajustables. » L'absence de parc de matériels suit cette stratégie. Frans est seulement équipé de trois vieux tracteurs, d'un chargeur et d'une mélangeuse. Il sous-traite tous les travaux sur maïs et prairies à une entreprise, ce qui lui donne un coût du travail plus élevé que la moyenne EDF européenne.

En contrepartie, son coût de matériel est plus faible. La crise laitière et le résultat négatif 2008-2009 l'obligent à s'attaquer au coût du travail. Dans le prolongement de l'abaissement de sa référence laitière, il a licencié, en avril dernier, l'un des deux salariés jusque-là à temps plein. En raison de problèmes de santé, Frans n'assure pas les travaux de la ferme et intervient à raison de 0,2 UTH (gestion). Son fils, étudiant, et son épouse assument, à eux deux, un tiers de temps.

4. DIMINUER LA SAU DE 30 HECTARES

La réduction des charges foncières est la quatrième piste que Frans explore. Cette année, il valorise 70 ha, contre une centaine en 2008. « Jusqu'à l'an passé, je tirais profit des écarts de prix de location de terre selon leur valorisation. Je mettais en location un tiers de ma surface auprès de mes voisins cultivateurs à raison de 2 000 /ha. J'en louais autant mais à 1 000 /ha. J'ai arrêté ce deuxième volet mais je continue le premier. »

Les 70 ha de SAU répondent à la fois aux besoins fourragers de l'élevage et à la dérogation sur la directive nitrates obtenue par les Pays-Bas (jusqu'à 250 kg d'azote organique par hectare de prairies).

« En 2009-2010, l'objectif est de résister à la crise laitière. J'espère que le prix du lait remontera ensuite. La ferme est conçue pour héberger 200 laitières et produire 1,5 Ml. Tout dépendra du prix de location ou d'achat de quotas. Malgré leur abandon en 2015, l'achat reste à1 /kg. »

CLAIRE HUE

(1) L'exploitation prend en charge la location. La vente de quotas n'a pas été enregistrée dans ses recettes, mais versée sur un compte privé.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
journée technique sur la tuberculose bovine

La tuberculose bovine fait frémir les éleveurs bas-normands

Maladies
Thomas Pitrel dans sa prairie de ray-grass

« La prairie multi-espèce a étouffé le ray-grass sauvage »

Herbe

Tapez un ou plusieurs mots-clés...