
Moi, agriculteur, sacrifié face à l’intérêt supérieur de la nation. Moi et tant d’autres.
Dans la terminologie militaire, un dommage collatéral désigne les victimes civiles ou alliées, ainsi que les dommages causés à leurs équipements et installations de façon accidentelle. Mon exploitation fait partie du domaine d’un château. Elle se trouve « collée » au monument. Depuis des générations, les propriétaires et les fermiers vivaient en bonne intelligence. En 2016, le domaine a été vendu à un jeune entrepreneur du pays. Aujourd’hui, il ouvre l’édifice et ses alentours au public.
Malgré tous les accords signés entre les parties pour me garantir une jouissance paisible jusqu’à ma retraite en 2020, le propriétaire multiplie les pressions pour obtenir de nouveaux avantages. Outre le caractère vexatoire de ses réflexions, il pousse le vice jusqu’à encercler petit à petit la ferme pour me pousser à la faute.
À tous ceux qui pensent que le statut du fermage protège efficacement le fermier, sachez que lorsque vous avez à vous battre contre une personne rouée à toutes les procédures, la partie n’est pas gagnée. La municipalité, bien consciente du problème, ne peut pas prendre parti pour un différend de droit privé. Et puis, que vaut la disparition d’une exploitation contre un projet touristique pesant potentiellement 30 000 visiteurs ? Au-delà de mon propre cas (mais ça fait du bien d’en parler), l’agriculture est souvent sacrifiée face aux « intérêts supérieurs de la nation ».
Quand il est question de vendre des avions Rafale ou Airbus à un pays, c’est souvent contre l’importation de produits agricoles : dommage collatéral. Le bétonnage des terres pour une zone artisanale, industrielle, le lotissement, le rond-point, la route ou la ligne TGV : dommage collatéral.
Ne pas tenir compte de l’augmentation des coûts de production et acheter nos produits au même prix qu’il y a vingt ans pour garantir la rentabilité de la chaîne en aval et assurer une alimentation à bas coût : dommage collatéral.
L’antériorité d’une exploitation est de plus en plus remise en cause. Un éleveur du Cantal est condamné par ses nouveaux voisins à déplacer son étable. Là, c’est un coq qui chante trop fort. Ailleurs, c’est le tracteur qui démarre trop tôt ou trop tard : dommage collatéral. La concentration galopante prônée par certains pousse à l’élimination des plus faibles : dommage collatéral. Mon voisin produit du porc. Sa coopérative (la plus grosse en France) veut lancer une filière sans antibiotiques. Ils sont 18 naisseurs engraisseurs sur plus de 2 000 à tenter l’aventure. Cette expérience devrait être intégralement prise en charge dans le cadre du budget recherche et développement de l’entreprise. Mais on ne propose à mon voisin que quelques centimes supplémentaires, loin de couvrir l’ensemble des frais, des risques et du temps passé. Si ça marche, la coop reversera-t-elle des dividendes ? S’il se plante : dommage collatéral.
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