Les producteurs suisses à la croisée des chemins

Bas les masques à l'interprofession sous infl uence des transformateurs. Elle prône désormais une régulation par les seuls contrats des entreprises.© ÉLISE REBIFFÉ
Bas les masques à l'interprofession sous infl uence des transformateurs. Elle prône désormais une régulation par les seuls contrats des entreprises.© ÉLISE REBIFFÉ (©)

Les producteurs ont fait le deuil d'une gestion de la production nationale par l'interprofession. Leur ultime espoir : le débat parlementaire en cours.

Illusoire dans l'UE, un vrai débat parlementaire sur la régulation des volumes aura lieu en Suisse. Avant la fin septembre, les élus du Conseil national devaient statuer sur du très concret, la motion Aebi, du nom d'un des leurs. Son objet : donner la force obligatoire non plus à l'interprofession (IP lait) mais à la Fédération suisse des producteurs de lait (FPSL) pour réguler le marché. C'est-à-dire disposer de moyens efficaces pour adapter la production laitière à la demande, afin que les producteurs bénéficient d'une plus value et obtiennent un revenu décent. Plus concrètement, il s'agirait de donner le droit à la FPSL de prélever une pénalité sur le lait produit au-delà d'une quantité de base (les droits de livraisons de 2008-2009 sans les quantités supplémentaires). Cela auprès de toutes les organisations de producteurs, ou les laiteries pour les livreurs directs, cette taxe pouvant atteindre 0,30 CHF/kg. Les revenus de cette taxe seraient ensuite affectés aux opérations de dégagement du marché et gérés par l'interprofession. Il ne s'agit donc pas de limiter la production, mais bien de responsabiliser ceux qui veulent produire plus que ce que le marché peut supporter, en leur faisant assumer, à eux seuls et pas à tous les producteurs, les coûts de la valorisation des volumes excédentaires. Bref, le principe du « pollueur-payeur ». Le Conseil fédéral a rejeté cette motion, estimant qu'elle reviendrait à des quotas de droit privé avec le soutien de l'État et un monopole pour la FPSL, inacceptable au regard du droit de la concurrence.

Mais ce Conseil fédéral n'est que le pouvoir exécutif qui obéit à l'Assemblée fédérale, autorité suprême de la Confédération. Cette dernière se compose de deux Parlements : le Conseil national (chambre basse, 200 élus du peuple) et le Conseil des États (chambre haute, 46 élus des cantons), dotés des mêmes compétences et obligés de s'accorder pour toutes décisions.

L'approbation des deux chambres parlementaires sera nécessaire

Pour contraindre le Conseil fédéral à donner la force obligatoire aux producteurs, il faudra que le Conseil national valide la motion Aebi, que le conseil des États en fasse autant à sa session de décembre, et qu'entre- temps l'assemblée des délégués de la FPSL l'accepte. La partie est donc loin d'être gagnée. « Nous sommes à la croisée des chemins », confie-t-on à la FPSL qui met son ultime espoir de voir une maîtrise de la production dans ce débat parlementaire. Elle vient en effet de faire son deuil d'une régulation de l'offre de lait au niveau national par l'interprofession. C'était pourtant l'objet même de sa création en juillet 2009 pour gérer l'après-quotas. L'IP lait l'a en effet officiellement enterré le 21 septembre, prônant une régulation par les seuls contrats des entreprises. À elles seules de définir leurs besoins en volumes A (marché national protégé et soutenu), B (export vers l'UE) et C (marché mondial) avec les prix qui vont avec. Cette position a été prise à la majorité requise et donc sans que le collège producteurs ne réunisse en son sein une minorité de blocage. La forte pression exercée par des laiteries sur ces OP et une ambiance libérale qui gagne parmi des producteurs de plus en plus résignés expliquent cela.

Selon toute vraisemblance, le Conseil national devrait valider la motion. 126 élus l'ont déjà signée. Mais ils devront confirmer leur vote et résister au lobby des laiteries et des OP « libérales » qu'elles contrôlent. « La partie va se jouer à 50/50 », dit-on ici.

JEAN-MICHEL VOCORET

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

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