Droit de la concurrence oblige, pas question pour Bruxelles de laisser une interprofession jouer un rôle dans la régulation du marché en jouant sur les volumes. La Suisse, pourtant dirigée par des libéraux, n'a pas la même lecture de ce droit « sacro-saint ». Du moins pour sa filière laitière, pour laquelle elle semble prête à des exceptions. Berne est sur le point d'agréer un dispositif de gestion des quantités de lait d'industrie (non transformé en fromages) qui donnerait des boutons à l'Europe du Nord. Élaboré par l'interprofession, il a pour ambition de redonner une stabilité à toute une filière dans la tourmente depuis la fin des quotas gérés par l'État le 1er mai dernier.
Le gouvernement suisse n'attendait pour lui donner son feu vert que les quatre-vingt-six délégués de base de cette interprofession l'approuvent… C'est chose faite depuis le 27 novembre.
Berne se devait d'attendre ce plébiscite, le dispositif ayant fait l'objet d'âpres négociations entre producteurs, transformateurs et distributeurs représentés à l'interprofession. Cette dernière n'a pas été créée pour rien dans l'urgence, en juin dernier. Il s'agissait de permettre à ces acteurs, arrivés à une situation de blocage, de renouer un dialogue constructif, et de donner de vraies perspectives à la filière.
Ce modèle novateur repose sur une segmentation du marché à trois échelons, assortie d'un engagement de transparence des laiteries sur les volumes en jeu. Coeur du dispositif, le lait sous contrat correspond aux besoins du marché suisse, assurant son écoulement à un prix « suisse » théoriquement plus rémunérateur qu'à l'export. L'excédent produit au-delà de ce lait contractuel devra obligatoirement être commercialisé via une bourse contrôlée par l'interprofession, au prix de l'offre et de la demande. Quand ni le lait contractuel ni le lait de bourse ne pourront être commercialisés, l'interprofession pourra dégager une certaine quantité de lait pour alléger le marché. D'où le troisième segment de marché. Autre prérogative qui fonctionne de fait depuis cet été, l'interprofession peut, en toute légalité, publier tous les trois mois une recommandation d'évolution du prix servant de base aux négociations du lait sous contrat.
L'interprofession se verrait octroyer la force obligatoire
À partir de janvier 2010 s'y ajoutera une autre prérogative de poids : la possibilité de gérer par trimestre les quantités sous contrat selon les perspectives du marché, à la hausse ou à la baisse. Cela selon un mécanisme bien précis, et en fonction d'un indice d'évolution sur lequel tous les acteurs se sont accordés. Les quantités engagées sous contrat en 2009 serviront de base. Non seulement Berne devrait valider ce dispositif de gestion de volumes. Mais il a donné de nombreux gages, laissant penser qu'il lui octroierait la force obligatoire générale pour un an (renouvelable chaque année). Comprenez l'outil juridique permettant à l'interprofession d'imposer ses règles à ses adhérents ou pas (contraintes financières à définir à la clé), gage de son efficacité.
JEAN-MICHEL VOCORET
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