
Les conditions météorologiques du printemps ont bien souvent empêché les éleveurs de récolter l’herbe au stade optimum. Souvent assez peu digestibles et pauvres en protéine, ces fourrages devront néanmoins être valorisés.
Incorporer de l’herbe (ensilage ou enrubanné) en complément du maïs dans les rations hivernales permet d’apporter des protéines et donc de réduire les achats de correcteur azoté. Cette stratégie fonctionne avec des récoltes d’herbe riche en MAT. Cette année, les chantiers d’ensilage ont souvent été retardés et la qualité des fourrages n’est pas au rendez-vous.
Responsable nutrition et génisses chez Innoval, Maël Raulo rappelle les fondamentaux de l’appréciation de la valeur des fourrages. « En cas de récolte d’herbe tardive, les plantes sont plus hautes et plus dures. Les protéines se trouvent diluées, d’où une baisse de la teneur en MAT. Mais, surtout, la digestibilité est pénalisée. » En effet, l’herbe contient des parois digestibles, (pectine et hémicellulose) et non digestibles (lignine). Cette dernière est prédominante dans l’herbe haute qui se rigidifie. Dans les analyses de fourrages, la teneur totale en parois est nommée NDF (neutral detergent fiber), celle des parois peu digestibles est appelée ADL (acid detergent lignine). Plus cette dernière est élevée, moins le fourrage est digestible. Les analyses réalisées sur la zone Innoval en 2024 montrent, pour l’ADL, des valeurs de 309 en moyenne, mais de 339 pour le quart le moins bon. C’est beaucoup.

L’encombrement pénalise l’ingestion
Cette teneur en parois a une influence sur l’encombrement des fourrages (UEL) qui augmente avec elle. Ainsi, un fourrage récolté jeune pourra avoir une teneur en MAT de 17 % pour un encombrement de 1,03 UEL quand une herbe plus avancée se situera respectivement autour de 12 % de MAT et 1,12 UEL. Dans des rations distribuées à volonté, l’écart d’ingestion entre les deux peut atteindre 2 kg de MS/vache/jour. Le calcul peut être étendu aux PDI ingérés. On arrive ainsi à une baisse de la production laitière permise par les fourrages de l’ordre de 2 kg/vache/jour. De plus, ce fourrage encombrant risque de se substituer au maïs quand il est présent en grande quantité dans la ration.
Ces particularités des récoltes d’herbe de 2024 imposent d’adapter la complémentation. « Il faut compter 3,8 kg de MS d’ensilage d’herbe à 12 % de MAT pour compenser 1 kg de soja 48, un peu moins pour du colza », expose Maël Raulo. Cela représente un encombrement élevé. Dans la simulation ci-dessus, l’apport d’ensilage d’herbe est limité à 10 kg brut. Le maïs utilisé présente les caractéristiques suivantes : 34,4 % de MS, 35,5 % d’amidon, 20 % de cellulose brute, 434 de NDF, 0,93 UFL (1). Dans tous les cas, la faible teneur en MAT de l’herbe doit être compensée par le correcteur azoté, voire par un peu d’urée en plus. En effet, l’apport d’azote soluble doit être suffisant pour assurer une bonne rumination.
Risque de hausse du coût alimentaire
Quand les objectifs de production laitière sont élevés, la ration devra aussi être enrichie en énergie, ici avec du blé. En fonction du prix de ces intrants, le coût alimentaire sera plus ou moins fortement en augmentation. Plusieurs leviers peuvent être utilisés pour limiter la complémentation, en fonction des situations particulières à chaque élevage. Les ensilages d’herbe peuvent être distribués en priorité aux génisses sachant qu’elles ont besoin d’un fourrage à 14-15 % de MAT pour une croissance correcte. Si la richesse en protéine est inférieure à ce seuil, on peut accepter une croissance plus lente, et donc un décalage des lots. Sinon, il est nécessaire d’ajouter du correcteur azoté.
Par ailleurs, la digestibilité des fourrages peut être améliorée en apportant des levures qui vont digérer la totalité des parois. Cette pratique doit être adoptée au moins durant trois mois pour être efficace. Il en coûte de 19 à 22 c/vache/jour et le retour sur investissement doit donc être évalué. Les enzymes ont une action comparable pour un surcoût supérieur.
Enfin, des leçons peuvent être tirées de ces conditions particulières. En cas de récolte trop tardive, il est intéressant de couper des brins plus courts (12-15 mm). Cela limite le tri à l‘auge et améliore l’ingestion.
(1) Il s’agit des résultats moyens observés par l’ULM, les ensilages de maïs étant très en retard sur la zone Innoval.
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