
Le programme Recital vise à définir des recommandations régionalisées sur la conduite des Cive. Il vient de faire le bilan après trois ans de travaux.
Les cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) tendent à se développer en lien avec la méthanisation. Le réseau Recital a été créé par divers intervenants intéressés à ces activités (1), qui ont mené des travaux dans différentes régions afin d’apporter des connaissances aux agriculteurs concernés. La communication des résultats est en cours et l’ensemble des conclusions sera présenté sur le site web d’Arvalis.
Cive d’été, une option risquée
Semées entre fin juin et début juillet pour une récolte en octobre, les Cive d’été présentent des potentiels de rendements de nuls à très bons. La date de récolte de la précédente conditionne la réussite avec de meilleures perspectives de rendements quand celle-ci est précoce. L’irrigation est intéressante pour assurer au moins la levée dans certaines situations, mais elle engendre des coûts importants et peut entrer en concurrence avec l’irrigation d’autres cultures alimentaires. Par ailleurs, les Cive d’été diminuent la sensibilité à l’érosion.
Dans ces conditions, mieux vaut choisir des espèces peu coûteuses (sorgho multicoupe, moha, mélanges simples) et ne pas considérer cette culture comme un gisement sûr. Le semis sous couvert pourrait peut-être sécuriser ces Cive, une pratique qui mériterait d’être testée.
Cive d’hiver, des rendements hétérogènes
Ces Cive sont semées entre mi-septembre et mi-octobre et récoltées fin avril, jusqu’au 10 mai. Pour les principales espèces, le rendement médian affiche de 6 à 7 t de MS, mais si l’on peut parvenir à 10 t dans le Sud-Ouest, le nord-ouest se situe autour de 6 t. D’une manière générale, repousser la date de récolte permet d’améliorer le rendement. Mais, attention aux effets négatifs sur la culture suivante. Les essais ont montré qu’on ne perd pas de rendement en associant une légumineuse.
Le choix de l’espèce ne saurait se limiter au potentiel de rendement. La résistance au gel, à la verse, aux ravageurs, ainsi que la capacité de repousse doivent être prises en compte. L’avoine est sensible au gel tandis que le seigle à tendance à verser. Le pouvoir méthanogène évolue avec le stade de la culture. Il ne constitue pas un critère de choix majeur des espèces, il vaut mieux rechercher une production élevée de biomasse. L’adaptation de l’espèce aux conditions pédoclimatiques et à la rotation est plus importante. Dans le Grand Ouest, le seigle et le triticale offrent un bon compromis. Mais il faut éviter les rotations avec une présence forte des céréales pour ne pas augmenter le risque de piétin-échaudage.
Le choix de la variété compte autant que celui de l’espèce. Dans le Grand Ouest, les variétés précoces, à épiaison, et résistantes aux maladies sont à privilégier.
Conduite : trouver les bons compromis
Semer tôt contribue à garantir le rendement. Fin septembre, les conditions de levée sont généralement bonnes et l’on gagne au moins 1 t de MS/ha par rapport à un semis réalisé un mois plus tard. Cependant, des semis précoces exposent aux risques de pucerons, piétin-échaudage ou gel sur les variétés précoces à montaison.
Les Cive d’hiver valorisent bien la fertilisation. On peut apporter jusqu’à 90-100 kgN, de préférence à partir de février sous forme de digestat. Le choix de la date de récolte est crucial pour le rendement, mais aussi pour le développement de la culture suivante. Il faut trouver le meilleur compromis entre les deux. Il se situe à fin avril dans le Sud-Ouest et jusqu’au 10 mai dans le Nord-Est. En moyenne, le gain de rendement s’élève à 1 t de MS/ha/semaine entre fin avril et début mai. Une récolte après le 10 mai pénalise fortement la culture suivante, la réserve en eau ayant peu de chance de se reconstituer.
En début de cycle, la hauteur du couvert donne une bonne indication du volume de biomasse. Mais, plus que la hauteur, c’est la densité qui fait le rendement. En céréales seules, viser de 250 à 300 graines/m2, contre 240 graines de céréales et 40 graines de vesce en mélange.
Dans l’idéal, le fourrage récolté doit avoir une teneur en MS supérieure à 25 %. Sinon, un préfanage est nécessaire et la récupération des jus devra être efficace au silo. Il faut savoir que cette teneur baisse de 2 à 3 points si le mélange contient des légumineuses. L’arrivée au stade de floraison est un bon indicateur du moment de la récolte.
Stockage identique à l’ensilage classique
On parvient à une bonne conservation des cives avec les mêmes pratiques que pour un ensilage destiné à nourrir des animaux. Si la récolte est stockée dans de bonnes conditions d’anaérobie, le pouvoir méthanogène ne s’altère pas durant le stockage. Les jus possèdent un fort pouvoir méthanogène, une raison supplémentaire de les récupérer s’il y en a. La couverture du silo est indispensable aussi pour préserver le potentiel.
Enfin, toujours comme pour un fourrage destiné aux animaux, la largeur du front d’attaque doit permettre une avancée assez rapide pour éviter une dégradation.
Des avantages, mais aussi des risques
Le programme Recital s’est penché sur les coûts des Cive, sur leur impact environnemental et sur le temps de travail qu’elles exigent. Les intervenants ont simulé l’introduction de Cive d’hiver dans le Grand Ouest, sans protection phytosanitaire et avec une fertilisation par du digestat. En toute logique, produire trois cultures en deux ans alourdit la charge de travail. Et ce, d’autant plus que les travaux supplémentaires sont à réaliser au cours de périodes déjà tendues.
L’indice de fréquence de traitement s’améliore mais en considérant que la gestion des repousses n’implique pas de traitements supplémentaires. Le coût de production a été calculé en intégrant notamment les pertes sur la culture suivante et la rémunération de la main-d’œuvre. Pour un rendement de 8 t de MS/ha, on parvient en moyenne à 100 €/t de MS ou 37 €/MWh.
Au final, les Cive sont intéressantes pour couvrir le sol et limiter l’érosion et la lixiviation. Elles favorisent la vie biologique du sol et améliorent sa structure tout en fixant du carbone (voir l’encadré). Elles permettent aussi de produire de l’énergie renouvelable et de réduire les émissions de gaz à effet de serre, tout en créant un revenu complémentaire.
En contrepartie, elles nécessitent de la main-d’œuvre et de la technicité. Elles peuvent parfois entrer en concurrence avec d’autres cultures. Profiter à plein de leurs avantages implique une bonne gestion du site de stockage et des digestats. Ils doivent être enfouis et bien répartis sur l’ensemble de la surface de l’exploitation. Enfin, les travaux d’épandage et de récolte sont à réaliser dans de bonnes conditions pour ne pas tasser le sol.
(1) Arvalis, Cavac, chambres d’agriculture, Aile, Euralis, Association des agriculteurs méthaniseurs de France, Oxyane et Engie, avec le soutien de l’Ademe et la participation de GRDF.
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