Prenez garde aux daturas dans le maïs

Article réservé aux abonnés.

Le datura adulte peut mesurer plus d' 1 mètre de haut. Les fleurs sont blanches de grande taille et évoluent en capsules couvertes d’épines. Le fruit forme une bogue épineuse contenant les graines.
Le datura adulte peut mesurer plus d' 1 mètre de haut. Les fleurs sont blanches de grande taille et évoluent en capsules couvertes d’épines. Le fruit forme une bogue épineuse contenant les graines. (© Christian Watier)

Cette plante très toxique et difficile à éradiquer quand elle s’implante dans une parcelle peut être mortelle pour les bovins via l’ensilage de maïs. Il faut souvent combiner plusieurs moyens de lutte.

Connaissez-vous le datura ou pomme épineuse, chasse taupe, herbe des sorciers et autres noms vernaculaires pour désigner cette solanacée de triste réputation qu’il faut absolument bannir de vos parcelles ? Depuis les années 1972, les agriculteurs du Sud-Ouest et des Charentes connaissent la nuisibilité de cette plante dans leurs cultures de maïs et de tournesol. Mais les Pays de la Loire, et maintenant la Bretagne ou les Hauts-de-France, sont aussi colonisés. Ce sont les systèmes à base de monoculture ou les rotations courtes avec une céréale d’hiver, type blé ou maïs, qui ont fait progresser l’espèce. En 2020, une enquête d’Arvalis a montré que, quelle que soit la rotation, les producteurs peuvent rencontrer des difficultés pour maîtriser le datura.

Mortels alcaloïdes

Son développement végétatif abondant rend cette plante très concurrentielle des cultures estivales et notamment du maïs. Mais c’est avant tout son extrême toxicité qui pose un problème. Tout est toxique dans le datura : par ordre croissant les racines, les fleurs, les feuilles et surtout les graines (anguleuses de couleur brun noir). Les doses d’alcaloïdes tropaniques présents (atropine et scopolamine) peuvent être mortelles pour l’homme et les animaux. Ils agissent sur le système nerveux central (troubles digestifs et cardiaques, état d’agitation, hallucinations, convulsions, coma) et de très faibles quantités suffisent. Ainsi pour un homme de 70 kg, 1/25e de graine provoquera une crise aiguë. Un seul pied de datura pour 25 m2 suffit à provoquer des intoxications mortelles de bovins via le maïs ensilage et il n’existe pas d’antidote. Dix plantes de datura suffisent à contaminer 1 ha de maïs. L’objectif est donc bien de n’avoir aucun pied de datura dans toutes les parcelles de l’exploitation.

Des graines indestructibles

Or, c’est une plante annuelle très compliquée à éradiquer. Sa semence est viable même après 40 ans d’enfouissement dans le sol. La profondeur de germination et de levée peut atteindre 15 centimètres. Cela rend le labour inefficace dans la lutte. Avec la production d’environ 500 graines par plante, l’invasion peut être très rapide. Et pour ajouter encore de la difficulté, les levées sont très échelonnées, d’avril à septembre, ce qui complexifie la lutte directe. Le décalage de la date de semis n’est donc pas efficace et des levées importantes de datura peuvent avoir lieu après le désherbage du maïs.

Aujourd’hui, le risque datura dépasse largement le Sud-Ouest et s’invite sur tout le territoire. « Il faut une très grande vigilance sur les monocultures de maïs fourrage. Rappelons qu’en Bretagne, 13 % des rotations avec du maïs fourrage sont en monoculture », avertit Benjamin Collin d’Arvalis. Dans les parcelles, le datura se rencontre souvent dans les tournières, les passages d’enrouleurs ou les zones de dégâts de sanglier. « Il faut également surveiller les bords de champs, de route, les chemins de terre ou les abords des bâtiments. Il est également impératif de détruire les levées estivales après la récolte des cultures d’automne et avant le semis des couverts », insiste Benjamin Collin.

© C.Watier - Les levées de daturas peuvent être tardives et s’échelonner jusqu’en septembre, compliquant la lutte par les herbicides.

Une application tardive de l’herbicide

Il n’y a pas d’impasse technique à proprement parler dans le désherbage chimique des maïs pour le datura. De nombreux produits de prélevée ou de postlevée sont très efficaces au moment de l’application mais ils ne perdurent pas assez dans le temps pour répondre aux relevées permanentes de cette adventice. Beaucoup de producteurs jugent donc leur stratégie de désherbage insuffisante. « Il faut au minimum deux passages : un premier en prélevée ou postlevée précoce suivi d’un second le plus tardif possible avant le recouvrement de l’interrang. Le désherbage mécanique est envisageable mais uniquement en condition sèche car la plante présente une grande capacité de repiquage. »

Surtout pas de graines

Les mesures préventives doivent aussi être mises en place. Nous l’avons vu, étant donné la biologie de l’espèce, le décalage de la date de semis, le labour ou les déchaumages et faux semis ne présentent pas d’intérêt. Le labour a même tendance à favoriser les levées échelonnées qui compliquent la stratégie de désherbage. À l’inverse, un travail superficiel du sol ou un semis direct suscite des levées plus groupées. Les parcelles aux rotations alternant culture d’hiver, culture de printemps et cultures d’été sont aussi moins menacées par le datura. Arvalis insiste aussi sur un impératif : ne pas laisser monter à graine les daturas pendant l’interculture. Pour les plantes qui n’ont pas été détruites par le désherbage, il n’y a pas d’autre choix qu’un broyage avant la montée en graine, sinon un arrachage manuel en prenant soin de sortir les plantes de la parcelle et de porter des gants. Et il est important de surveiller les bords des parcelles et les fossés. Il faut aussi veiller au bon nettoyage du matériel de récolte pour éviter la contamination entre parcelles.

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

Alsace Lait

Tapez un ou plusieurs mots-clés...