
Toutes les filières animales régressent. Le phénomène est si important qu’il impacte l’activité des industries de la transformation et l’emploi dans les zones rurales. La France découvre que les productions animales et de transformations agroalimentaires sont délocalisables ! Or quand une ferme abandonne l'élevage, il ne revient pas. Après la Confédération paysanne il y a quelques semaines à Paris, la Fnsea tire une nouvelle fois la sonnette d'alarme ce week-end pour dénoncer le péril !
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Retrouvez le reportage sur la manifestation "L'élevage, cause nationale" organisée par la Fnsea dimanche 23 juin
Il y a trois ans, au printemps 2010, les céréaliers montaient à Paris pour dénoncer la faiblesse des prix des céréales pour la seconde campagne consécutive et l’entrée en application du bilan de santé de la Pac. Trois mille tracteurs défilaient sur les boulevards parisiens. Mais depuis, la hausse impressionnante des cours mondiaux et leur maintien à un niveau élevé font flamber les revenus. L’an passé, l’écart était de 1 à 5 entre les revenus des céréaliers et ceux des éleveurs. Il pourrait être moins élevé cette année si le repli des céréales dure.
En production animale, la situation est totalement différente. Dimanche 23 juin, ce sont les éleveurs de la Fnsea, de toutes les filières de production et de toute la France, qui montent à Paris accompagnés de leurs animaux. Ils font vivre les territoires les plus ruraux auxquels les Français sont attachés sans parvenir à vivre de leur travail. En effet, le redéploiement des aides consécutivement au Bilan de santé de la Pac n’a pas été suffisant pour augmenter durablement leurs revenus.
L’élevage est devenu une cause nationale pour la Confédération paysanne et le Modef dès l'automne 2012, lorsqu'ils ont lancé une campagne au Space à Rennes. Et c'est un mois avant la Fnsea que la CP a opté pour Paris afin d'associer la population à la défense de son modèle agricole ainsi qu'à celle de l'élevage.
Un cercle vicieux pour les filières d'élevage
Les filières animales sont entraînées dans un cercle vicieux dont elles ne parviennent pas à sortir : plus les importations d’animaux vivants et de produits dérivés pallient les déficits de production, plus la France importe sur son marché intérieur les prix pratiqués en dehors de ses frontières et plus les productions d’animaux régressent faute de rentabilité. C’est l’ensemble des filières, de la production à la transformation qui sont concurrencées par celles de nos voisins européens. Des filières victimes de distorsions sociales, fiscales et environnementales vis-à-vis de nos plus proches voisins, l’Allemagne en tête. Chez notre voisin outre-Rhin, il n’existe pas de salaire minimum et le pays abuse des procédures de rattachement qui lui permet de payer des salariés quelques euros par heure.
L’élevage est aussi devenu une cause nationale car les filières animales sont victimes d’un mouvement de fond qu’il est difficile d’inverser. Les installations en productions animales reculent et n’assurent plus les renouvellements de génération depuis longtemps. Avec la fin des quotas et la volatilité des prix du lait, la filière laitière n’est pas épargnée par le phénomène même si le nombre de nouveaux installés est le plus important.
Alors que Stéphane Le Foll promeut des systèmes de polyculture-élevage plus autonomes et plus écologiques, de plus en plus d’agriculteurs à la tête de ces exploitations sont tentés d’abandonner l’élevage pour ne produire que des céréales, plus rémunératrices et moins chronophages.
Des productions animales en baisse
Pour la Fnsea, la France dispose pourtant d'atouts pour être non seulement leader en productions animales mais aussi pour approvisionner l’Europe. Il n’en est rien. Notre pays importe au moins 40 % des poulets consommés par les Français. La production de porcs fléchit de mois en mois et la mise aux normes des bâtiments des truies gestantes pourrait accélérer le phénomène dans les toutes prochaines semaines.
Une des conséquences de la mise aux normes des cages des poules pondeuses est l’envolée des prix qui a permis, dans un premier temps, aux éleveurs ayant « sauté le pas » de financer une partie de leurs investissements. Mais aussi, depuis des mois, une envolée des importations d’œufs qui ont fait effondrer les prix, en provenance de pays où les élevages ne sont pas soumis aux mêmes normes. A vouloir être trop bon élève sur tout ce qui relève de la protection de l’environnement, la France rend quasi impossible pour les éleveurs de renouveler leurs bâtiments ou de regrouper leurs élevages dans des constructions neuves.
La majorité des éleveurs français sont en fait sur la défensive. La conjoncture des prix les incite à limiter leurs pertes plutôt qu’à produire plus. En production laitière, la France ne réalise pas son quota depuis des années et les progrès constatés en 2011 sont annulés : la collecte décroche depuis un an et est inférieure à la moyenne quinquennale. Les pertes de revenu sont colossales et s’évaluent pour la filière en centaines de millions d’euros.
Le prix du lait est inférieur à son niveau de 2010 alors que les prix des aliments ont augmenté de plus de 15 % en un an et sont supérieurs de 37 % à ceux de 2010. Les prix de l’énergie restent quant à eux à des niveaux élevés depuis quatre ans.
La contractualisation inachevée n’apporte pas la sécurité nécessaire puisque les prix ne sont pas liés aux coûts des aliments et aux charges en général.
Les éleveurs sont également privés de prix rémunérateurs par la filière en aval. Et quand ils augmentent, ils progressent moins vite que les charges. Et surtout, sans se soucier de savoir si les éleveurs pourront dégager un revenu.
Les industriels pris à leur propre piège
La profession agricole et les hommes politiques ont affirmé pendant des années que les empois liés à l’agro-industrie n'étaient pas délocalisables. Il n’en est rien. Et c’est même parce qu’ils peuvent l’être que les déficits de production des filières animales s’aggravent. Faute d’animaux, de rentabilité intrinsèque (car ce sont aussi elles qui ne sont pas assez compétitives) et de marges suffisantes partagées avec les producteurs, les industries sont prises à leur propre piège. Ayant une vision "courtermiste", elles refusent toute contractualisation sérieuse pour assurer leur approvisionnement et les revenus des éleveurs. Persuadées que ces derniers ne se détourneraient pas de la profession.
Comme nous l’avons dit précédemment, il n’en est rien. De grands abattoirs et industries de transformation ferment. Ce qui prive les éleveurs de débouchés à proximité et accentue par conséquent l’abandon entier de pans de productions animales.
La France ne peut pas se contenter d’un excédent commercial d’animaux vivants de 1,6 milliard d’euros en 2012 qui repose tout simplement sur le fait que notre pays a les prairies et les champs pour les élever. Elle est devenue déficitaire en œufs et faute de production d’ovins, elle importe plus de la moitié des animaux consommés. Elle achète 5,5 milliards d’euros de produits transformés générant un déficit de 685 millions d’euros qui a doublé par rapport à 2011.
Pour la Fnsea, l’élevage est aussi une cause nationale car les agriculteurs sont victimes des conséquences de décisions et de choix sociaux et environnementaux pris depuis des années et dont les répercussions sur les filières animales et les filières de transformation n'ont pas été mesurées à moyen terme. Certaines sont mêmes excessives et en contradiction avec les objectifs affichés comme la Directive nitrates qui pénalise les élevages en systèmes herbagers pourtant les plus écologiques. Enfin, la Pac de 2014 ne donne aucune lisibilité pour les mois à venir. Or les chevreaux, les génisses et les ovins qui seront primés en 2015 sont déjà nés !
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