Jean-Luc Ménard : « Efficace pour réduire son temps de travail, mais... »

Jean-Luc Ménard, spécialiste des questions d'automatisation de l'alimentation à l'Institut de l'Elevage. (© Terre-net Média)

Web-agri.fr : Quel regard portez-vous sur le développement de l’automatisation de l’alimentation (AA) en élevage bovin ?
Jean-Luc Ménard : C’est  une opportunité nouvelle pour les éleveurs de réduire le temps d’astreinte dédié à l’alimentation animale de l’élevage. Mais la réduction du temps de travail n’est pas une problématique récente en soi. Des solutions existent depuis longtemps, comme le libre-service au silo (technique la plus ancienne), le libre-service mécanisé, les auges libre-service ou encore les pousses fourrages. Des éleveurs sont regroupés en groupements d’employeurs ou en Cuma de distribution équipée d’une mélangeuse par exemple. Ce qu’il est vraiment important de faire avec l’AA (compte tenu de l’importance de l’investissement, entre 130 et 170.000€ ndlr), c’est de la comparer avec les solutions existantes.

WA : La diminution du temps d’astreinte est-elle réelle, ou est-ce un argument commercial ?

JL-M : Nous estimons qu’elle représente 75 % de gain de temps par rapport à un système conventionnel. Et sur ce point précis, l’AA est l’une des solutions les plus efficaces. Quelles que soient les autres techniques, la réduction du temps d’astreinte ne dépasse pas 50 %. Mais l’AA nécessite un investissement financier important. Les constructeurs avancent d’autres arguments et effets positifs, notamment sur l’amélioration de la productivité laitière. Mais sur ce point précis, je pense que nous manquons de références techniques et chiffrées pour évaluer les conséquences sur la production laitière. Ceci dit, je pense que les effets seront plus limités que certains chiffres annoncés.

Jeantil est le dernier constructeur a arrivé sur ce marché, avec un nouveau système complet récompensé d'une citation dans le cadre du palmarès des Sima innovation awards 2013. (© Jeantil)

WA : Autrement dit, l’augmentation de la fréquence quotidienne de distribution de l’aliment n’aurait pas d’effet significatif ?
JL-M : Je pense que cela mérite d’être vérifié. Des études sont en cours, notamment sur la station expérimentale d’Arvalis Institut du végétal de la Jaillière (44). Il y a des chercheurs suisses avec qui nous sommes en relation, qui travaillent le sujet depuis quatre ans, mais il nous faut maintenant vérifier leur résultat sur les exploitations françaises.

WA : Quid de la présence de l’éleveur et de la surveillance du troupeau ?
JL-M : Ça pose question effectivement. Le couloir de distribution de l’aliment est un lieu de passage de l’éleveur et un lieu de surveillance très important. Mais même si on utilise de plus en plus de technologie pour surveiller les animaux, l’œil de l’éleveur est très important. Et il faudra trouver d’autre façon de surveiller les animaux.

WA : Quel système d’élevage est le plus adapté à l’automatisation de l’alimentation ?
JL-M : Les grands troupeaux dont la gestion s’effectue par lots et où l’alimentation s’organise autour de nombreuses rations. La réduction de la charge de travail peut ainsi être conséquente. Je pense que c’est très intéressant dans les troupeaux qui utilisent beaucoup de rations différentes. Et avec l’agrandissement des élevages laitiers, les éleveurs s’orientent de plus en plus vers des lots alimentaires pour gérer les grands troupeaux.

Cliquez sur l'image pour retrouver l'ensemble des solutions existantes sur le marché pour automatiser l'alimentation de son élevage. (© Terre-net Média)