Il est parfois difficile de tarir une bonne productrice à l’approche du vêlage. Est-ce vraiment utile de maintenir l’objectif d’un veau par vache par an ? On peut être tenté d’allonger volontairement les lactations de ses vaches. Dans ce cas, quels effets sur la production, la reproduction et les résultats économiques de l’atelier ?
Garder une vache laitière en production plus de 300 jours, la question revient souvent dans les discussions. La valeur des veaux vendus à 3 semaines est un petit poste au regard des autres produits, lait et viande. La majorité des vaches sont capables de maintenir une production très acceptable, au-delà de 450 à 500 jours, voire 600 jours. L’autre intérêt est de gérer moins de vêlages, moins de vaches taries et de vaches en préparation vêlage, moins de veaux… Ce gain de temps est toujours relatif, mais quand le temps est très contraint, la question se pose légitimement.
De nombreux essais ont été menés depuis 15 ans, sur des mises à la reproduction décalées. En général, l’intervalle bas est retenu à 50 jours, entre le vêlage et la mise à la reproduction. Plusieurs essais oscillent entre 80 et 100 jours, voire à 125 jours ou 200 jours, pour cette date de mise à la reproduction (la première IA).
Quels effets sur la production laitière ?
Des écarts existent forcément en allongeant la lactation des vaches. Les effets sont surtout visibles sur les multipares. Le tableau ci-dessous, montre des essais menés aux Pays-Bas en 2022. Ils affichent 4 kg de lait par vache par jour, sur les multipares, dans des systèmes intensifs. Les effets sont plus neutres sur les primipares. La majorité des essais montrent des effets similaires.
Intervalle vêlage – 1ère IA visée en jours
50
125
200
Primipares — kg lait par jour de lactation
23,3
22,7
23,5
Multipares — kg lait par jour de lactation
29,5
28,0
25,6
Des essais menés en France à l’Inrae, en système herbager très économe, montrent les mêmes effets. Moins de lait, avec plus de taux. D’un point de vue économique, c’est très variable d’un élevage à l’autre. La pertinence de ce choix repose sur un équilibre entre le gain de temps, le volume livré et l’efficacité économique au litre de lait.
Lactation
Classique
Prolongée
Durée de lactation (j)
284
569
Lait par vache (kg/VL/an)
4 622
4 259
TB (g/kg)
40,1
41,6
TP (g/kg)
31,7
33,6
Intervalle vêlage — 1ère IA (j)
76
408
IVV (j)
378
705
POMIÈS D., FOURNIER F., FARRUGGIA A. – INRAE Vet Agro Sup. 2016
Quel impact sur la reproduction ?
Les effets sont assez proches entre des mises à la reproduction après 50 ou 125 jours, en termes de fertilité. Au-delà, à 200 jours, la fertilité s’améliore réellement. Dans le détail, les vaches sont mieux cyclées, plus régulières… d’où de meilleurs résultats. Le tableau ci-dessous traduit les principales observations sur des reports tardifs à très tardifs :
Intervalle vêlage – 1ère IA visé (j)
50
125
200
Cycles normaux autour de l’IA visée (%)
58
77
92
Fertilité (%)
44
42
63
Intervalle vêlage IA fécondante (j)
86
162
219
Intervalle 1ère IA – IA fécondante (j)
36
37
19
JUNNAN et al – Animal Reproduction Science 2022 (Pays-Bas)
Est-ce vraiment pénalisant d’un point de vue économique ?
L’étude menée à la ferme expérimentale de Trévarez (29) entre 2005 et 2011 a comparé 2 lots de vaches. Un lot est conduit en vêlages classiques, avec des écarts de vêlages 12 mois, l’autre avec des mises à la reproduction volontairement décalées, pour des écarts de vêlage de 18 mois. En pratique, les vaches produisent un peu moins de lait (- 640 l/VL/an), mais compensé par une meilleure valorisation des taux. L’autre avantage est la réduction du coût alimentaire aux 1 000 litres.
D’un point de vue économique, le système a un rôle prépondérant. À volume constant, dans cet exemple avec 600 000 litres livrés, il faut 7 vaches de plus pour produire le même volume. Le gain calculé était de + 10 €/1 000 l de marge brute. En revanche, à effectif constant, l’élevage livre 48 000 l de lait en moins par an, avec un impact de -10 €/1000 l. Avec la conjoncture actuelle, l’effet est même plus marqué.
Le volume est rarement le facteur limitant aujourd’hui. L’intérêt économique est très limité avec la conjoncture actuelle. Néanmoins sur des primipares, l’allongement volontaire de la lactation est toutefois peu pénalisant. C’est une possibilité pour assurer la prise d’état et la fertilité. Sur des multipares, la perte de lait est très pénalisante, et d’autant plus que la productivité des vaches est élevée. Mais le pratiquer sur une petite partie des vaches, pour décaler les vêlages par exemple, aura peu d’effet économique au global de l’exploitation.
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