Les épizooties ont généré un manque à gagner de 294 M€ pour la filière viande en 2024

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Vaches dans le brouillard
La filière allaitante enregistre 150 000 vêlages en moins sur 2024, directement imputés à la baisse de la fertilité causée par les épizooties. (©ahavelaar | AdobeStock)

Sur la campagne 2024, les épizooties accentuent la décapitalisation bovine, avec des répercussions à retardement sur les volumes disponibles sur le marché du maigre, puis du bovin fini.

Au premier abord, la surmortalité générée par les épizooties est faible : compter + 0,3 % sur le cheptel laitier comme allaitant. Mais une fois convertie en nombre de têtes, la valeur prend une tout autre ampleur « nous sommes à 11 000 vaches perdues sur le cheptel viande, et 11 500 sur le troupeau laitier », décrypte Eva Groshens, agroéconomiste pour l’Institut de l’élevage à l’occasion du Sommet de l’élevage. « C’est beaucoup quand on sait que la France a perdu 80 000 vaches allaitantes et 81 000 vaches laitières en 2024, cela représente 14 % de la décapitalisation ».

Les conséquences de la FCO et de la MHE ne se limitent pas à une hausse de la mortalité. Elles affectent la reproduction. « L’impact sur la fertilité est très marqué dans le Sud-Ouest, sur la zone d’entrée de la MHE ». D’après l’Institut de l’élevage, la sous-fertilité prive le cheptel de 150 000 naissances sur la campagne 2024-2025 en bovin viande, et 65 000 en bovin laitier.

Les statisticiens observent également une surmortalité chez les jeunes veaux, notamment sur la zone touchée par la FCO-3. Les épizooties ont provoqué la mort d’environ 29 000 veaux allaitants de moins de deux mois, ainsi que celle de 15 000 veaux laitiers.

La sous-fertilité représente les trois quarts du manque à gagner

Entre mortalité des mères et impact sur les naissances, les vagues épizootiques constituent un manque à gagner considérable pour la filière. L’Idele évalue le montant global des pertes sur la filière viande à 294 millions d’euros. Et ça n’est pas la perte de vaches qui gonfle les chiffres, mais plutôt la sous-fertilité. « La baisse du nombre de veaux sevrés génère un manque à gagner de 223 millions d’euros », estime Eva Groshens.

Les conséquences sur la filière laitière sont plus difficiles à analyser. « Le fait est que la production apparente est très élevée sur l’année 2024, avec des cours incitatifs. Mais la production aurait sans doute été meilleure sans aléa sanitaire », explique l’économiste. « Les Hauts-de-France, très touchés par la FCO l’année dernière, affichent une hausse de production contenue alors que la Bretagne ou la Normandie ont fortement augmenté leur production ».

Des impacts jusqu’en 2027

Au-delà du manque à gagner, les vagues épizootiques impactent le nombre d’animaux disponibles sur le marché du maigre à long terme. « La baisse de naissance n’affecte les engraisseurs que dans un second temps, et les abatteurs dans un troisième », explique Eva Groshens à l'occasion du Grand Angle Viande. « Les animaux engraissés en 2025 sont pour certains nés avant la crise sanitaire. Les conséquences seront surtout sur 2026 et 2027 ».

Reste ensuite à modéliser le nombre d’animaux disponibles sur les prochaines années. Plusieurs hypothèses existent. Le plus optimiste — un retour à la normale à compter de l’automne 2025 — induit une baisse de la production de viande bovine de 1,5 % en 2026, et une baisse de 2,6 % en 2027. Si le contexte sanitaire reste dégradé sur le prochain semestre, « on pourrait imaginer une baisse de la production plus rapide », conjecture l’économiste. Mais entre les deux scénarios, c’est surtout la rapidité de la baisse qui diffère : « le point d’atterrissage à horizon 2030 est grosso modo le même ».

En 2030, le cheptel bovin pourrait retomber au niveau de 1900

D’après les projections, la décapitalisation couplée à l’impact des épizooties sur le cheptel devrait amener la Ferme France à produire 1 188 milliers de téc de viande bovine en 2030. C’est 100 milliers de téc de moins qu’en 2024.

La démographie reste le principal moteur de la baisse du cheptel. « Les projections estimaient que 50 % des éleveurs de 2018 seraient partis en retraite en 2027 », explique Christophe Perrot, chargé de mission économie des territoires à l’Institut. Mais compte tenu de la hausse du prix de la viande, certains temporisent leur départ. « Je pense que le pic de la vague démographique est encore devant nous ». Un contexte qui conforte le scénario d’une France à 7 millions de vaches en 2030. Et retomber à 7 millions de vaches, « c’est retrouver le niveau de cheptel du XIXème siècle », alerte Eva Groshens.

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