Un dérivé de l’ail à l’étude contre les mammites

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Allimax NF, produit phytothérapique à base d'ail, est commercialisé en tant que complément alimentaire sous forme de bolus ou d’huile concentrée.
Allimax NF, produit phytothérapique à base d'ail, est commercialisé en tant que complément alimentaire sous forme de bolus ou d’huile concentrée. (© C.Thiriet)

Deux études réalisées en Rhône Alpes-Auvergne pointent l’intérêt d’Allimax NF, un produit phytothérapique issu de l’ail, dans le traitement des mammites subcliniques (à cellules). Sur les mammites cliniques, les résultats sont plus nuancés.

Les travaux menés en 2021 et 2022 par la société Pectofeed et le groupe rhône-alpin Bernard Agriculture s’inscrivent dans une perspective de « demédication ». « À terme, l’usage des antibiotiques sera interdit ou soumis à des conditions drastiques, pointe Laurent Gerbel du groupe Bernard Agriculture. C’est déjà le cas en volailles ou en porcs. En dehors du renforcement de l’immunité par la prévention, les solutions actuelles sont très limitées. Les bactéricides alternatifs efficaces sont inexistants. Or en élevage laitier l’enjeu est majeur : pathologie numéro un avec 40 % des vaches concernées chaque année(1), les mammites engendrent des coûts importants pour les exploitations (80-150 € par mammite subclinique, 200-400 € pour les cliniques) ainsi que pour les filières laitières (risque de résidus d’antibiotiques dans les tanks et les citernes). »

Effet antibactérien de l’allicine

Dans ce contexte, l’allicine, composé organo-soufré issu de l’ail, est une voie à explorer. « Les propriétés de l’allicine sont connues depuis longtemps, mais la difficulté était de stabiliser ces composés très volatils », explique Olivier Lefranc, distributeur d’Allimax NF en France. Fabriqué en Hollande, le produit phytothérapique est commercialisé sans AMM (autorisation de mise en marché) en tant que complément alimentaire sous forme de bolus(2) ou d’huile concentrée (drogage). Anti-inflammatoire, l’allicine a un effet antibactérien. « Les composés de dégradation de seconde génération de l’allicine empêchent la création du biofilm bactérien à l’origine du phénomène d’antibiorésistance », précise Olivier Lefranc.

En l’absence d’étude préalable, en particulier en Hollande où Allimax NF est distribué depuis 2008, Olivier Lefranc et Laurent Gerbel se sont associés pour tenter de mesurer et d’objectiver les effets du produit.

Une première étude avec identification bactérienne a été menée par Camille Termoz dans le cadre d’un mémoire d’ingénieur de l’Ensat Toulouse. Conduite dans 18 élevages d’Auvergne-Rhône-Alpes, elle a montré un effet supérieur de l’Allimax NF en présence de mammites subcliniques (cellules) : 83 % de guérison contre 50 % sous antibiotiques. Sur les mammites cliniques, les taux de guérison avec Allimax NF ont varié selon les pathogènes en cause. Efficace sur certains germes (Staphylocoques aureus/dorés, colibacillaires/E.coli), le produit le serait moins sur d’autres (streptocoques uberis).

Ces résultats toutefois doivent être interprétés avec prudence compte tenu de la taille limitée de l’échantillon. Au lieu de 150 vaches traitées, seules 64 ont été intégrées dans l’essai. 35 ont été traitées à l’Allimax NF, 21 aux antibiotiques, 8 avec l’Allimax NF et les antibiotiques. Par ailleurs, l’étude a été réalisée sur quatre mois seulement au lieu de six, qui plus est en période estivale, pas la plus propice pour les mammites environnementales (Streptocoques uberis).

Réduction du taux de cellules

Une seconde étude a été réalisée par Maxence Lassaigne, en BTS PA sur la période 2021-2022 dans 24 élevages utilisateurs d’Allimax NF sur 82 laitières (50 % de mammites cliniques, 50 % de subcliniques). L’effet du produit phytothérapique sur la réduction du taux de cellules a été démontré avec une évolution particulièrement nette sur les jeunes vaches (réduction par trois en un mois).

Sur du lait AOP saint-nectaire ou reblochon, l’utilisation du bolus sans odeur d’ail (fabriqué à partir des molécules organo-sulfurées les moins odorantes) a été testée. « On perd un peu en efficacité, et l’effet est moins rapide. »

Le 12 janvier dernier, lors de la présentation du produit dans l’Ain, des éleveurs laitiers se sont interrogés. « Je serais tenté d’utiliser Allimax NF en première intention, mais le coût (65 € le bonus, en boîte de cinq) est un frein », a expliqué l’un d’eux. « Les conditions dans lesquelles le produit sera efficace ou non sont encore difficiles à identifier, a pointé un second. On manque d’éléments par rapport aux Streptocoques uberis, très développés dans la région l’hiver. »

« Le coût du traitement est couvert en partie par la reprise en lait plus rapide ainsi que par son impact positif global sur la santé de la vache, avance le représentant de Pectofeed. Les propriétés détoxifiantes du produit sur le foie permettent de récupérer un quartier atteint dans le cadre de mammites colibacillaires. » Et de poursuivre : « Antibactérien, l’allicine a aussi un effet anti-inflammatoire, métabolique et antiparasitaire positif. Un bolus ingéré par la vache dix jours avant vêlage réduit les métrites et les diarrhées sur les veaux, favorise un meilleur démarrage en lactation. L’efficacité est améliorée par l’utilisation conjointe de vinaigre de cidre. Il faut raisonner le traitement sur l’ensemble de la lactation et se questionner : selon le stade et la valeur de la vache, qu’est-on prêt à investir ? »

Pour mesurer l’efficacité et l’impact d’Allimax NF sur la lactation et la santé de la vache, une étude complémentaire est actuellement menée sur les vaches taries. Il s’agit d’ici le mois d’août prochain de comparer dans quinze exploitations, l’état de 100 vaches traitées aux antibiotiques avec celui de 100 laitières soignées à l’Allimax NF (un bolus dix jours avant la date prévisionnelle de vêlage) et d’un lot témoin sain sans traitement.

Les paramètres mesurés seront les conditions de vêlages et ses suites (délivrance, métrite), la santé du veau, le démarrage en lactation (appétit, etc.), la production et la qualité du lait sur toute la lactation (cellules, TB, TP), la reproduction, la santé de la mamelle et celle de l’animal en général (pathologies, évolution du poids du vêlage à 90 jours).

(1)Selon l’Institut de l’élevage, 2013

(2)Trois types de bolus : bolus normal-25, bolus extra-fort et bolus sans odeur

Aperçu des marchés
Vaches, charolaises, U= France 7,05 €/kg net +0,06
Vaches, charolaises, R= France 6,92 €/kg net +0,08
Maïs Rendu Bordeaux Bordeaux 190 €/t =
Colza rendu Rouen Rouen 465 €/t +3

Météo
Philippe Bernhard à droite et Hervé Massot président et DG d'Alsace Lait

Alsace Lait a besoin de lait pour ses ambitions régionales

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