Que faire lorsqu'un client ou un confrère agriculteur broie du noir ? Tous les intervenants en élevage peuvent se mobiliser et devenir des « agri-sentinelles » formées à repérer un agriculteur au bord du suicide, alerter et agir en conséquence.
Prés de 10 000 personnes (techniciens, inséminateurs, vétérinaires, etc.) circulent quotidiennement dans les élevages bovins français et sont en première ligne pour identifier des agriculteurs en détresse. Mais que peuvent-elles faire lorsqu'elles rencontrent un éleveur prêt à mettre fin à ses jours ?
« L’objectif du réseau Agri-sentinelles c’est que tous les intervenants en élevage volontaires puissent agir comme « sentinelles » pour repérer les agriculteurs qui ne vont pas bien et alerter les services compétents qui pourront les aider à surmonter leurs difficultés. », résume Elsa Delanoue, sociologue et coordinatrice du réseau Agri-sentinelles pour l’Insitut de l'élevage, l’Ifip et l’Itavi.
De nombreux dispositifs existent déjà dans la prévention du suicide en agriculture tels qu’Agri-écoute de la MSA ou Solidarité paysans. Le réseau Agri-sentinelles n’a pas vocation à s’y substituer, mais plutôt à alerter et à orienter les agriculteurs pour faciliter leur accès à un de ces dispositifs.
« Le réseau Agri-sentinelles se mettra en route début 2019 et proposera les premières formations auprès des sentinelles volontaires, détaille Delphine Neumeister de l'Institut de l'élevage. Il nous faut aussi baliser le rôle des sentinelles qui ne doivent pas devenir des assistants sociaux ou des psychologues, et intégrer le devoir de respect de la vie privée de l’éleveur. »
le suicide agricole n'est pas lié à la conjoncture économique
La rupture des liens sociaux ou familiaux est l'un des facteurs les plus importants pour repérer les agriculteurs au bord du suicide, néanmoins « il n’y a pas toujours de signes avant-coureurs chez les gens qui passent à l’acte. Il y a beaucoup d’impulsivité. C’est pourquoi on peut tous se sentir impuissants face à un suicide », fait remarquer Nicolas Deffontaines, sociologue à l’Université du Havre.
« On fait souvent l’écueil de croire que les agriculteurs se suicident pour des causes économiques suite aux différentes crises que leurs filières subissent. Bien qu’il y eu une légère augmentation du taux de suicide durant la crise laitière de 2009-2010, les chiffres restent stables - autour de 150 suicides par an. Les causes sont multiples, et ceux depuis plus de quatre décennies. Ce n’est pas un phénomène nouveau ou conjoncturel. »
Les données montrent que, depuis longtemps, les agriculteurs se suicident davantage que les autres catégories socio-professionnelles. Chez les hommes agriculteurs, c'est même la première cause de mortalité externe, devant les accidents. Le risque est plus élevé chez les agriculteurs exploitants de petites surfaces (moins de 50 ha par rapport à ceux de plus de 200 ha) et chez les éleveurs bovins lait et viande, par rapport aux autres filières agricoles. Le taux de suicide est plus élevé dans les régions d’élevage (Bretagne, Pays de la Loire, Massif central,…), mais l’on remarque qu’il est aussi plus élevé que la moyenne nationale pour le reste de la population dans ces régions.
Il y a trois suicides d’homme pour un de femme, une proportion que l’on retrouve dans le reste de la population française. Une différence : le taux augmente chez les hommes de plus de 50 ans à l’approche de la retraite, alors que ce taux a plutôt tendance à se réduire chez les français de cet âge. Cela est souvent lié au fait que la ferme familiale ne soit pas reprise. En effet, « généralement les tensions familiales sont au cœur des enjeux, explique Nicolas Deffontaines. Le fils est préparé au métier dès son plus jeune âge, arrivé en milieu de carrière il est chargé du rôle de continuation de l’exploitation familiale et à la fois tenu par des exigences familiales vis-à-vis de sa compagne, ses enfants ou ses parents. »
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