Reprise « progressive » dans les élevages après le vide sanitaire

Après six semaines de vide sanitaire, les oies et canards faisaient « progressivement » leur retour lundi chez les éleveurs de cinq départements du Sud-Ouest, qui misent sur les premiers canards gras d'ici début septembre pour une présence du foie gras sur les tables en fin d'année.

« On fait cela progressivement, on essaie logiquement de faire reprendre en premier ceux qui avaient été arrêtés en premier. Cette semaine reprend un éleveur qui avait été arrêté trois à quatre jours avant Noël, et un autre qui avait été arrêté le 19 janvier. Ensuite, cela va s'échelonner », a expliqué à l'AFP Richard Violle, technicien auprès de la Coopérative du foie gras de Chalosse (Landes), qui regroupe une soixantaine de producteurs, petits éleveurs ou éleveurs-gaveurs travaillant « en traditionnel ».

« J'espère que d'ici fin juin ou début juillet tout le monde aura repris », renchérit Jean-Luc Broca, éleveur-gaveur Label Rouge à Garlin et président de cette coopérative. Selon ces éleveurs, les premiers canards gras devraient être « disponibles entre la toute fin août et les premières semaines de septembre ». Mais la production totale habituelle de la coopérative, 500.000 canards environ, « ne devrait pas dépasser 230.000 » cette année, déplorent-ils.

Le 17 avril, un vide sanitaire « obligatoire » de six semaines avait été mis en place dans 1.134 communes du Sud-ouest pour tenter de juguler définitivement l'épizootie de grippe aviaire H5N8 apparue fin novembre et particulièrement virulente. Un autre virus H5N1 apparu en 2015/2016 avait déjà touché la filière. Ce vide sanitaire venait compléter l'abattage préventif des palmipèdes mis en place début janvier. Plus de 4 millions ont ainsi été euthanasiés, essentiellement dans Les Landes et le Gers, premiers départements producteurs. Le 5 mai, le gouvernement a annoncé officiellement la fin de l'épidémie.

Pour les éleveurs, cette deuxième crise de grippe aviaire, qui a poussé toute la filière à réviser ses pratiques, a néanmoins permis « certaines avancées ». « Démonstration a été faite que le principal risque, et de loin, ce sont les manquements à la biosécurité, dans les transports en particulier, et non pas tant le fait que les canards soient dehors, ou les contacts avec la faune sauvage. Et pour nous qui sommes dans le traditionnel, avec des petits éleveurs en autarcie, avec pas ou très peu de transport, c'est important : on a le sentiment que si tout le monde fait comme il faut désormais en matière de transports, on n'aura pas de souci », explique Richard Violle.

Fortes pertes

« C'est la levée du vide sanitaire, pas la reprise de l'activité », a souligné Lionel Candelon, porte-parole de l'association des Canards en colère. « On pense que dans les trois semaines, 10 à 15 % de la production aura redémarré, le problème c'est que pour que les 100 % reprennent, ce sera septembre. »

Mais déjà, des difficultés se font sentir pour remettre la machine en route. « Beaucoup d'éleveurs n'ont pas retrouvé de canetons », a ainsi indiqué Bernard Malabirade, de la FDSEA du Gers. L'épizootie a de fait affecté l'ensemble de la chaîne de production, y compris les couvoirs.

« Il faut planifier le travail de l'ensemble des éleveurs et gaveurs, et les cannes repro[ductrices] ont elles aussi été abattues ou ont été malades, il faut reconstituer ce cheptel reproducteur », a précisé Sylvie Robin, éleveuse pour la coopérative Vivadour, dans le Gers. Sur son exploitation, elle pourra replacer des animaux seulement fin juillet. « On va être vide au total sept mois, donc sept mois de manque à gagner. En marge nette, il va nous manquer 70.000 euros », a-t-elle détaillé.

Les pertes financières de l'ensemble de la filières sont estimées à plus de 350 millions d'euros, selon le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog). Au total, ce sont près de 12 millions de canards perdus pour la production française, un chiffre qui inclus 4,5 millions d'animaux abattus dans le cadre du plan préventif du ministère de l'agriculture du précédent gouvernement et 7,5 millions de palmipèdes qui n'ont pas pu être mis en production durant l'épizootie et le vide sanitaire.

Du retard dans les indemnisations

Un dispositif d'aide devrait être mis en place par le gouvernement. Mais, « il y a des retards, et nous avons fait des courriers pour signifier ça au nouveau ministre », a indiqué M. Malabirade. « Tout le programme est dans les tuyaux, le ministre n'a qu'à appuyer sur le bouton. On attend que les engagements soient tenus, et dans les meilleurs délais. »

D'autant que les éleveurs attendent également le versement du solde (30 %) des indemnisations mises en place pour compenser les pertes liées à l'épidémie 2015-2017. « Malheureusement, on n'a pas une date précise du versement de ce solde, ce qui créé de l'agacement », a déclaré à la presse Marie-Pierre Pé, déléguée générale du Cifog.

Le retour des palmipèdes « est quand même un soulagement, l'épidémie est derrière nous, on espère avoir une belle fin d'année », a ajouté M. Malabirade, de la FDSEA du Gers. Du fait de la diminution de la production et des investissements nécessaires pour répondre aux nouvelles règles de production, il faut s'attendre à des hausses de prix du foie gras.

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